La téléréalité explose sur toutes les chaînes, le spectateur en veut toujours plus, il réclame du drame, des larmes, de la violence, du sang... Riche homme d'affaires, Breckel a la solution et entend bien proposer un programme d'un genre nouveau. A grand renfort de billets verts, il fait donc libérer les criminels les plus dangereux, venus des quatre coins du monde. Tous sont regroupés sur une petite île truffée de caméras. Leur but ? Tuer pour survivre. Car au bout de 72 heures, il ne devra rester qu'un seul survivant, et seul celui-là pourra accéder à la liberté. Diffusée sur internet, l'émission attire bien évidemment les foules et semble se dérouler comme prévu. Mais rapidement, un grain de sable hypertrophié nommé Jack Conrad se glisse dans l'engrenage...
Bien qu'il existe depuis de nombreuses années, le catch dans sa forme américaine connaît un premier envol commercial dans les années 80 avec des figures comme Hulk Hogan, The Undertaker ou Triple H. On parle alors de Hulkmania et Hogan apparaît dans ROCKY 3 avant d'aligner les clins d'œil dans quelques séries télévisées comme L'AGENCE TOUS RISQUES, LA CROISIERE S'AMUSE ou DOLLY. La Star aura finalement sa propre série (THUNDER IN PARADISE) et tiendra quelques premiers rôles dans de modestes séries B avant de sombrer peu à peu. Avec Hulk Hogan, c'est l'image de la World Championship Wrestling (WCW) qui s'effrite également... Entre temps, elle aura été racheté par la World Wrestling Federation (WWF), sa principale concurrente, qui deviendra elle même, bien plus tard, la World Wrestling Entertainment (WWE), une fois le troisième millénaire entamé. Plus médiatique, plus adulescent et davantage orienté «bad boys», le catch nouveau est arrivé, avec en tête de proue des noms comme The Rock, John Cena ou Stone Cold. Désireuse de développer l'image médiatique de ses Stars, la WWE se lance très rapidement dans l'industrie du jeu vidéo et du cinéma. En 2003, WWE Films nous offre donc son premier métrage sous le titre BIENVENUE DANS LA JUNGLE. Particulièrement sympathique et décomplexé, ce film vient entériner le charisme cinématographique de Dwayne «The Rock» Johnson après LE RETOUR DE LA MOMIE et LE ROI SCORPION. Cela permet aussi de continuer à développer l'image positive des catcheurs de la nouvelle génération. TOLERANCE ZERO confirmera l'année suivante et en 2006, Glenn «Kane» Jacobs incarnera un tueur terriblement balaise dans l'agréable Slasher SEE NO EVIL. Dwayne Johnson ayant définitivement pris son envol cinématographique, John Cena deviendra l'acteur clef de WWE Films avec THE MARINE (2006), 12 ROUNDS (2009) et LEGENDARY (2010).
Mais entre temps, en 2007, la WWE Films aura également donné sa chance au massif «Stone Cold» Steve Austin. Le bonhomme avait alors déjà interprété quelques rôles à la télévision (dont un détective dans NASH BRIDGES) et incarné un maton dans MI-TEMPS AU MITARD aux côtés de son confrère «The Great Khali» (SUR LA PISTE DU MARSUPILAMI). Mais LES CONDAMNES dont il est question ici sera sa première tête d'affiche, avant qu'il n'emballe les recommandables DAMAGE, HUNT TO KILL et qu'il donne bien du mal à Stallone dans THE EXPENDABLES... Dans LES CONDAMNES, Steve Austin est un détenu dangereux sorti de prison pour les besoins d'un jeu télévisé mortel. Le postulat n'est donc guère différent de celui d'un RUNNING MAN (version cinéma) ou LA COURSE A LA MORT (remake de 2008) et sa suite. Il rejoint même d'une manière plus générale ces nombreux métrages où seul le plus fort aura la vie sauve. Nous citerons en vrac LA référence BATTLE ROYALE, l'inventif ULTIMATE GAME ou la récente pudibonderie HUNGER GAMES...
Malgré un certain manque d'originalité du concept et une sortie discrète en DVD, LES CONDAMNES n'en est pas moins une série B dopée à la testostérone de buffles. Aux côtés de Steve Austin, on retrouve ainsi un Vinnie Jones éclatant en psychopathe, ainsi qu'un Nathan Jones encore une fois très impressionnant du haut de ses 2,11 mètres... En compagnie d'autres acteurs moins connus, les brutes s'empoigneront 109 minutes durant, dans un festival de pêches, clefs de bras et effets gores. En cela, le film de Scott Wiper s'impose comme l'antithèse d'un HUNGER GAMES. Pas de strass, pas de jolies robes ou de meurtres hors-champ. On a là un film frontal et divertissant, sans le moindre temps mort ou la plus petite frilosité. Egalement co-scénariste, Wiper pousse même le bouchon en mettant en scène un couple de taulards, un viol, un suicide et un déchirement qui font étonnamment mouche au sein d'un métrage a priori modeste. En réalité, LES CONDAMNES surprend tout simplement en offrant ce qu'Hollywood n'ose plus vraiment depuis plus de vingt ans. A savoir des méchants très méchants, et des héros-bulldozers que rien ne semble pouvoir arrêter.
Alors bien évidemment, le jeu de certains acteurs montre assez régulièrement ses limites. On pourra même pointer du doigt le protagoniste, auquel Steve Austin offre une carrure et une vraie présence à l'écran, mais aussi quelques lignes de dialogues assez laborieuses. Sur-gonflé par des années de consommation d'anabolisants, notre homme se montre pour le moins rigide et sa mâchoire elle-même semble dramatiquement indécrispable... Nous pardonnerons cependant cette paralysie faciale aux vues des spectaculaires empoignades et altercations, mais aussi d'une histoire rythmée et moins crétine qu'il n'y parait. Conformément aux règles du genre, nous avons en effet une modeste critique des médias, la course à l'audimat, des «arrangements» entre la production et certains participants etc. LES CONDAMNES alterne ainsi assez soigneusement les séquences se déroulant devant et derrière les caméras, pour un final mêlant bien évidemment le tout dans une explosion du concept même de téléréalité.
Bien qu'il ne renouvelle absolument pas le genre et n'apporte pas véritablement d'idées neuves, LES CONDAMES peut au moins se targuer d'être un divertissement de qualité. Modeste, généreux et dynamique, le film propose en outre un cadre naturel et forestier appréciable et bien filmé. Si Steve Austin n'a en aucun cas le charisme d'un Dwayne Johnson, il remplit néanmoins son contrat, pulvérisant gaiement tous les obstacles lui barrant la route. Nous voilà donc revenu l'espace de quelques minutes à la bonne époque des COBRA, DANS LES GRIFFES DU DRAGON ROUGE ou LE CONTRAT. Ouf, ça fait du bien de temps en temps !
Nous l'évoquions, LES CONDAMES est sorti un peu partout en DVD, sans passer par la case cinéma. En France, c'est l'éditeur Metropolitan qui s'en est chargé et nous propose, comme bien souvent, un disque de qualité. L'image est ainsi restituée en 1.77, par le biais d'un transfert 16/9 irréprochable. Impossible de déceler la moindre anicroche ou la plus petite trace de compression. La définition est en outre très correcte et les couleurs parfaitement restituées, retranscrivant bien l'environnement végétal du film. Le film mixe en outre les images tournées en 35mm et les prises de vue numériques de moindre qualité. Aucun souci notable, la différence entre les deux est (volontairement) visible, permettant quelques transitions agréables entre l'image fixe et parfois frustrante vue par les internautes connectés au jeu, et celle, bien plus mobile et révélatrice, vue par le spectateur du film LES CONDAMES...
Sur le plan sonore, le constat est à peu près identique avec le choix entre la piste anglaise (en Dolby Digital 5.1 EX) et le doublage français (en Dolby Digital 5.1 EX également). Les deux sont particulièrement dynamiques mais la version originale dispose d'un meilleur équilibre entre les effets sonores et les dialogues. En ce qui concerne le doublage en lui-même, il fait son office, sans réellement briller cependant. La piste originale est encore une fois à privilégier, et permettra en outre de savourer le jeu de certains acteurs (hum...). Un sous-titrage français sans faute portera secours aux non-anglophones.
Abordons maintenant l'interactivité du disque, laquelle est finalement plutôt dense pour un métrage de ce calibre. On commence dès l'insertion du disque avec une première vague de bandes-annonces de l'éditeur. Le recommandable BRAQUAGE A L'ANGLAISE ouvre le bal, suivi de MONSIEUR WOODCOCK et des comédies écervelées que sont BALLES DE FEU et HAROLD & KUMAR S'EVADENT DE GUANTANAMO. Curieusement, nous ne retrouverons que deux de ces quatre bandes-annonces dans la section des suppléments. Celle-ci nous offrira cependant le choix entre les versions originales et françaises des différents trailers. Elle ajoutera également ceux de THE CONDEMNED, IN HELL et UN SEUL DEVIENDRA INVINCIBLE DERNIER ROUND.
Le DVD propose en outre un making-of, visualisable d'une traite ou par chapitre. S'étirant sur une durée globale de trente-six minutes et découpé en cinq parties, ce documentaire aborde différentes facettes de la production. La première section, traitant des personnages et de leurs motivations, est assez laborieuse et n'apporte pas grand-chose. Le chapitre dédié à la mise en place de la salle de contrôle, et des dizaines d'écrans qu'elle comporte, est déjà bien plus intéressant. Du même tonneau, nous aurons également quelques explications pertinentes quant à l'usage de différents types de caméra, et de différents points de vue. Mais la section la plus intéressante reste sans aucun doute celle décrivant l'entrainement des acteurs, et l'apprentissage de chorégraphies. Aucun des intervenants n'en sortira grandi sur le plan intellectuel mais les efforts physiques fournis sont notables. Les connaisseurs seront en outre ravis de retrouver Richard Norton, un artiste martial étonnant et peu connu dont la carrière aura réellement débuté en 1980 avec Chuck Norris, via un double rôle et quelques combats hallucinants dans LA FUREUR DU JUSTE. Après une poignée de métrages hollywoodiens d'envergure modeste, le bonhomme aura rejoint Hong Kong et collaboré avec Sammo Hung et Jackie Chan. Assez discret, le monsieur nous explique donc dans ce documentaire comment il a tenté de gommer le style de combat ample et graphique de Steve Austin pour quelque chose de plus brutal, davantage orienté vers le combat de rue. Pari modestement réussi nous semble-t-il...
Toujours dans la section bonus, nous trouverons un comparatif «film / storyboard» de deux séquences. L'intérêt semble ici moindre, d'autant que les croquis collent parfaitement avec le résultat final. Pas de surprise donc. Achevons donc ce débrief en évoquant la section «Promotion du film» qui offre deux petits documentaires. Le premier nous montre Steve Austin et Vinnie Jones redécouvrir une vidéo de leur première rencontre quelques années plus tôt, lors d'un match de catch. L'acteur britannique, et ancien footballeur hargneux, était alors monté sur le ring pour coller deux ou trois pêches et serrer quelques mains. Le document est encore une fois sans grand intérêt, insistant sur le fait que les deux hommes sont potes, ce dont on se fout cordialement ! Le deuxième bout de pellicule nous dévoile Steve Austin se livrant à une séquence de dédicaces en Australie, non loin du lieu de tournage. Sans surprise, l'égo de notre musculeux prend beaucoup de place et la niaiserie de certains «fans» s'avère tout de même assez alarmante...