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Critique du film
PAUL 2011

 

Eeeeeeeet ce qui devait arriver arriva finalement. Après l'excellent SHAUN OF THE DEAD et le sympatoche HOT FUZZ, le duo Nick Frost / Simon Pegg livre avec PAUL son premier exercice américain, sous la houlette du réalisateur Greg Mottola (SUPERGRAVE, ADVENTURELAND).

Le synopsis fait, comme toujours avec eux, la part belle à l'amitié indéfectible qui les lie depuis longtemps et à leur statut décalé. Graeme (Simon Pegg) et Clive (Nick Frost) sont deux geeks venus spécialement d'Angleterre pour assister au Comic-Con et visiter en camping-car les différents sites réputés chez les fanas d'ufologie. Leur chemin croisera celui de Paul (voix de Seth Rogen), un extra-terrestre qui s'est crashé sur Terre il y a 60 ans et qui cherche aujourd'hui à échapper au gouvernement pour rentrer chez lui. Poursuivis par l'agent Zoil (excellent Jason Bateman), ils sillonneront les routes américaines pour atteindre un lieu bien connu des amateurs de science-fiction (n'en disons pas plus).

Le gros problème avec PAUL, c'est que l'on est rarement surpris. Pour qui connaît un minimum les codes du road-movie et est un tant soit peu familier avec l'humour des deux énergumènes, le film s'installe sur des rails dont il ne déviera jamais. Alors bien sûr, l'histoire demeure sympathique, mais chaque grosse blague est réduite à néant puisque le spectateur attentif l'aura vu arriver des kilomètres plus tôt. Manque de subtilité ou volonté d'alléger quelque peu l'humour pour un plus large public, la question reste posée. Pourtant, comme souvent, les personnages secondaires sont intéressants. Que ce soit le fameux agent Zoil, modèle de froideur jusqu'à un petit twist malheureusement éventé lui-aussi, ou ses suppléants aux dents longues, en passant par la femme bigote qui se découvre à travers son contact avec l'extraterrestre, ils fonctionnent, ils sont très bien joués (merci aux comédiens du Saturday Night Live) et surtout, ils sont drôles. Les péripéties que le petit groupe traverse ne sont pas très passionnantes non plus. Encore une fois, la route est balisée, pas question de faire du hors-piste. Si, évidemment, l'apparition de l'alien amène un petit grain de folie et le décalage attendu (Paul étant un alien bien beauf, qui rote, pète, se bourre la gueule et parle de cul), il n'empêche, on attendait bien mieux de la part des deux abrutis qui, il y a quelques années, flinguaient du zombie sur du Queen.

Formellement, PAUL est un film «clean», comprenez par là qu'il est correctement réalisé et monté, pas un poil qui dépasse quoi. Les effets spéciaux quant à eux, sans être aussi incroyables qu'un AVATAR par exemple, restent d'excellente facture, le soin apporté à la réalisation de l'alien est impressionnant, Paul bouge avec aisance, s'intègre parfaitement dans son environnement et sa personnalité ressort bien. Il est tour à tour énervant, rigolo, émouvant, bref, LA réussite du film, incontestablement.

Malheureusement, le rythme n'est pas au diapason. Signalons un gros passage à vide vers la moitié du métrage, un enchaînement de séquences un brin maladroit, tantôt trop courtes, tantôt trop longues, étonnant de la part d'un réalisateur qui nous avait habitué à plus efficace (SUPERGRAVE en tête) et qui donne ici l'impression de ne pas être à l'aise avec son matériau. On en viendrait presque à se demander si l'apport d'Edgar Wright sur les deux précédents films du duo n'était pas finalement plus important que ce que l'on voulait bien croire, surtout au vu de son fantastique SCOTT PILGRIM. Bref, PAUL se révèle surtout fatigant et totalement inoffensif. Du cinéma consommable en quelque sorte, aussitôt vu et aussitôt oublié. Et c'est bien dommage, parce que Pegg Frost s'échinent à créer quelque chose de sympathique, multiplient les clins d'œil aux fans (un peu trop d'ailleurs), les caméos prestigieux répondent présent (bien qu'ils soient au final bien mal exploités et un peu trop attendus). Si on ne peut remettre en cause l'honnêteté de l'entreprise, on doit en revanche se demander si les comiques anglais n'ont pas trop lissé leur humour pour montrer patte blanche au système américain tout en faisant mine de le critiquer.

In fine, PAUL pose plus de questions qu'il ne déclenche d'éclats de rire hystériques. On peut raisonnablement se demander si ce film ne marque pas l'enfermement de Pegg Frost dans une formule, certes bien rôdée et efficace par instants, mais que l'on imagine difficilement résister au temps qui passe et au changement de continent. Bien sûr il ne s'agit là que de supputations critiques, mais il faut quand même reconnaître que l'orientation ultra geek de leur humour commence à dater. A l'issue de la projection, le spectateur se retrouve dans une situation délicate : celle d'avoir malgré tout passé un bon moment, mais aussi dans celle d'avoir vu deux potes de longue date qui sont restés coincé des années en arrière alors que la vie, elle, a poursuivi son bonhomme de chemin. Et ça, c'est triste.

Rédacteur : Christophe Foltzer
45 ans
10 critiques Film & Vidéo
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