L'expédition Malcolm est en quête du Scorpion d'Or, un fabuleux joyau capable de transformer la pierre en or. Les locaux voient cependant d'un mauvais œil le fait que des étrangers viennent piller leurs terres. A leur tête, le mystérieux Scorpion veut stopper les fouilles ou, mieux encore, s'emparer de la précieuse relique. L'expédition semble donc bien mal tourner lorsqu'un dénommé Shazam apparaît devant le jeune et naïf Bill Patson. Parce qu'il a le cœur pur et désintéressé, Shazam dotera Bill de super pouvoirs, lui permettant de se transformer à loisir en Captain Marvel ! Grâce à cette puissance nouvellement acquise, l'expédition rejoint le sol américain sans trop de casse. Reste que le terrible Scorpion n'a pas encore dit son dernier mot et entend bien parvenir à ses fins…
Concept cinématographique anté-télévisuel, le Serial est une aventure découpée en plusieurs parties, généralement de douze à quinze épisodes. La durée de ces épisodes flirtait avec le quart d'heure, exception faite du pilote qui pouvait dans certains cas dépasser la demi-heure. La diffusion de ces «séries» se faisait donc en salle, avant le film et ce à un rythme hebdomadaire. Voir une série dans son intégralité nécessitait donc non seulement d'être fidèle à son cinéma mais aussi de s'y rendre une fois par semaine. Compte tenu du nombre d'épisodes, trois à quatre mois d'assiduité étaient demandés au spectateur. Autant dire que rares étaient ceux qui pouvaient se vanter d'avoir vu un Serial dans son intégralité ! Qu'importe car le Serial tirait sa force et ses codes de ce postulat. A savoir que le scénario n'était guère développé mais que chaque épisode se devait d'être entraînant et riche en action ou rebondissements. Bourrés d'idées farfelues et de personnages caricaturaux, les Serials étaient donc un spectacle «populaire», riche et décomplexé. Leur production s'étala de 1929 à 1956 marquant ainsi les esprits de nombre de cinéastes en devenir, comme par exemple Steven Spielberg ou George Lucas…
Bien que le monde du Serial soit sans surprise peuplé de figures héroïques en tous genres, les ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL chroniquées ici sont les premières à mettre en image un véritable «Super héros», armé d'une stature imposante et de super pouvoirs bien réels. Parmi ceux-ci, une force incroyable, une peau pare-balle, la capacité de voler et celle de garder sa coupe de cheveux intacte. Cette panoplie de pouvoirs, le Capitaine Marvel la possédait déjà sur le papier, lorsque Fawcett Comics publia une première aventure en février 1940. Scénarisé par Bill Parker et mis en images par Charles Clarence Beck, le Capitaine Marvel était alors une sorte de décalque de Superman, apparu pour sa part en 1938. Les deux héros partageaient ainsi de nombreux traits de caractère, des capacités surhumaines très voisines et une esthétique vestimentaire assez douteuse. Qu'importe car en ces temps de guerre, l'Amérique a besoin de héros. Et plus on en a, mieux on se porte ! A ce titre et contrairement à Superman, Capitaine Marvel est à l'origine un «monsieur tout le monde». Un jeune américain simple mais juste, droit et prêt à tout pour que la justice de son pays triomphe. Bien qu'il soit donc particulièrement manichéen, le Capitaine Marvel évitera cependant de devenir l'outil de propagande anti-nazi que fut son confrère Kryptonien, lequel s'opposait alors dans sa version animée aux productions allemandes de la Deutsche Zeichenfilm. Vous l'aurez compris, le Marvel tel que vu au cinéma est donc plutôt du genre à faire le ménage au pas de sa porte et à s'opposer au grand banditisme qui gangrène les Etats-Unis.
Le Serial dont il est question dans ces lignes reflète assez bien cet état d'esprit, faisant la part belle aux gangsters et aux hommes de mains déterminés. Saluons à ce titre leur incroyable inventivité puisqu'ils n'auront de cesse de couper les freins des véhicules, de poser des bombes ou d'user d'instruments aussi persuasifs que farfelus. Mention spéciale à la guillotine qui décapite ses victimes après qu'un rayon les ait terrassés ! On retrouve donc dans ces ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL tout ce qui a pu faire, et fait encore, le charme de ces Serials décomplexés et généreux. Le rythme est enlevé, les retournements de situation spectaculaires et les interventions du héros magiques. La naïveté de certaines idées n'a d'égale que leur roublardise, privilégiant de manière systématique la tension au détriment de la logique. Et dans ce domaine, ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL est indiscutablement une perle. Les codes du Serial sont non seulement respectés à la lettre, mais aussi transcendés par un postulat ouvertement «fantastique» et donc imprévisible. Quel que soit votre problème, le Capitaine Marvel a la solution ! Une chance pour le personnage de Betty (joué par Louise Currie) dont on ne compte plus le nombre de fois où elle sera enfermée dans un véhicule partant à la dérive.
Cette relative «décontraction scénaristique» n'est pas pour autant synonyme d'un travail bâclé. Bien au contraire car ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL est en réalité un divertissement particulièrement soigné. Les décors sont ainsi très nombreux et l'on passe sans peine d'un cadre urbain à un désert aride. Plus fort encore, les séquences durant lesquelles notre héros vole sont de belles réussites aux effets spéciaux étonnants. La force herculéenne du Capitaine Marvel est elle aussi bien rendue car s'il arrive que notre homme bouscule quelques sympathiques mannequins mous (qui raviront les amateurs), il est également courant que l'acteur Tom Tyler soulève de véritables individus à bout de bras ! Une bien belle prouesse que n'aurait pu réaliser Frank Coghlan Jr., interprète du chétif Bill Patson, alter-ego de Marvel.
Enjoué et dynamique, ces ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL s'inscrivent donc dans le haut du panier des 250 Serials (environ) qui furent à l'époque produits aux Etat-Unis. Une réussite de plus à mettre au crédit de John English et William Witney, duo qui mettra en boite pas moins de dix-sept Serials pour le compte de la Republic Pictures. Parmi ceux-ci, on notera quelques véritables pépites comme DICK TRACY'S G-MEN, JUNGLE GIRL ou encore DRUMS OF FU MANCHU. Disponibles en France depuis peu, ces aventures en douze ou quinze chapitres se dégustent aujourd'hui encore avec grand plaisir, au rythme d'un ou deux épisodes par jour, préservant ainsi la notion de «Cliffhanger» indissociable (et fondamentale) du Serial.
Ces éditions Françaises, c'est à Bach Films que nous les devons. Plutôt timide, l'éditeur avait amorcé le mouvement en 2008 avec l'excellent FLASH GORDON CONQUERS THE UNIVERSE de 1940. Avaient ensuite suivi le FLASH GORDON'S TRIP TO MARS de 1938 et le FLASH GORDON : SPACE SOLDIERS de 1936. En cette année 2010, Bach Films a clairement accéléré la cadence puisqu'on dénombre aujourd'hui pas moins de treize Serials (et pas des moindres) à leur catalogue. Les derniers titres répondent tous plus ou moins au même schéma éditorial. A savoir que le Serial, commercialisé pour une quinzaine d'euros, voit ses épisodes répartis sur deux disques. Le boîtier DVD referme un livret de 24 pages, concaténation de deux articles écris par Roland Lacourbe et paru dans la revue Ecran de 1978. Particulièrement intéressant, ce booklet permet une immersion rapide dans l'univers du Serial, ses codes et ses grands noms.
Roland Lacourbe revient par ailleurs dans un bonus vidéo d'environ onze minutes, consacré entièrement au Capitaine Marvel et à la genèse de son adaptation. L'homme nous livre quelques anecdotes intéressantes, notamment lorsqu'il évoque l'adaptation envisagée de Superman et ses alternatives que seront finalement MYSTERIOUS DOCTOR SATAN et ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL. Le bonhomme maîtrise son sujet et nous fait donc ici partager sa passion de manière agréable et fluide. Ce ne sera pas vraiment le cas du documentaire suivant, traitant de la Science-Fiction sur une durée de vingt-six minutes. Tourné pour la télévision, ce supplément s'avère plus passe-partout et, pour l'amateur de Fantastique, ne fera qu'enfoncer des portes ouvertes. Reste que son visionnage n'a rien de désagréable et que l'on croisera quelques images intéressantes, comme par exemple un extrait de la bande annonce de TARANTULA, absente des différentes éditions DVD.
Outre ces deux bonus, l'éditeur Bach Films a la bonne idée d'offrir à l'acheteur curieux de nombreux épisodes d'autres Serials ou dessins animés. Bien évidemment commerciale, cette démarche n'en est pas moins louable dans la mesure où elle permet d'avoir une petite idée de ce qu'offrent les autres titres de l'éditeur. Ceux qui ont apprécié ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL devraient ainsi se régaler à la vision de deux épisodes de FLASH GORDON. Le premier épisode de KING OF THE ROCKET MEN renoue pour sa part avec les hommes volants alors que le pilote de DICK TRACY'S G-MEN nous confrontera à nouveau avec de vils truands armés. Enfin, nous trouverons sur le disque deux courts-métrages d'animation des studios Fleischer. Là encore, nous resterons dans une certaine logique éditoriale puisque c'est de SUPERMAN dont il s'agit. Magnifiques et forts bien animés, ces deux petites perles proposées en version française clôturent avec panache le tour de cette riche édition.
Très complet sur le plan éditorial, ce double disque ne démérite pas vraiment sur le plan technique. L'image de ADVENTURES OF CAPTAIN MARVEL respecte le ratio 1.33 d'origine et l'encodage 4/3, bien que visible, se fait relativement discret. Bien évidemment, les poussières et artéfacts sont assez nombreux mais les contrastes offrent une belle dynamique à l'image. La définition est très correcte et nous ne nous attendions pas à un tel résultat pour ce type produit, bien souvent tourné à l'économie.
Sur le plan sonore, c'est sans surprise que nous retrouvons la piste originale mono d'époque. Le résultat est bien évidemment plat et par instants étouffé. Le contraire aurait été étonnant et l'essentiel demeure à nos yeux la clarté des dialogues, mais aussi du sous-titrage francophone. Celui-ci est clair, visible, dénué de faute mais malheureusement inamovible.