Header Critique : DANS TON SOMMEIL (IN THEIR SLEEP)

Critique du film
DANS TON SOMMEIL 2009

IN THEIR SLEEP 

DANS TON SOMMEIL… Serait-ce toi, public, à qui le titre du film s'adresse ?

Après la mort accidentelle de son fils de 18 ans, Sarah (Anne Parillaud) a vu sa vie s'écrouler et son mari (Jean-Hugues Anglade) s'éloigner. Un an plus tard, elle renverse Arthur (Arthur Dupont) un jeune homme qui lui explique qu'il tente d'échapper à un agresseur. Ils sont alors pris tous les deux en chasse.

Les réalisateurs, Eric et Caroline Du Potet, tentent une approche du sujet entre thriller domestique et horreur. Dans le genre, on a déjà subi HAUTE TENSION ou encore ILS, en passant par THE STRANGERS… les exemples sont nombreux et la structure du genre en état de renouvellement perpétuel. Malheureusement, la prétention psychologique prend le dessus et noie quelque peu le film qui au bout du premier tiers s'essouffle complètement. On se prend à penser aux thrillers de la Hammer des années 70 (SUEUR FROIDE DANS LA NUIT, par exemple) de part l'atmosphère et la progression dramatique. Mais du fait de comprendre rapidement ce qu'il se passe, le suspense se voit réduit à néant, comme si cette partie du scénario n'intéressait pas ses auteurs. Et le spectateur aguerri voit s'égrener des références plus ou moins avouées/avouables. Surtout du côté de LA FORCE DES TENEBRES (qu'il s'agisse de la version réalisée par Richard Thorpe en 1937 ou celle inférieure de Karel Reisz en 1964) où il faut chercher l'influence la plus forte.

Le scénario s'articule autour du point de vue de Sarah, lui même entrecoupés de flash-backs explicatifs assez démonstratifs qui paralysent quelque peu le rythme léthargique du film. Il en ressort une narration un peu brouillonne et manquant, en quelque sorte, de cohérence ce qui place le métrage dans l'incapacité à donner un peu de vie à un ensemble qui sent le déjà-vu. A force de marcher sur des plates-bandes du suspense anglo-saxon tout en évitant de baisser son pantalon, le film retombe dans les affres d'une production française planplan, axé sur la sacro-sainte dérive psychologique (ici avec transfert maternel à la clé.). Le métrage devient vite assommant et ce ne sont que les quelques pointes de sons stridents qui viennent tirer le spectateur perdu dans son sommeil latent.

Quelques effets spéciaux viennent compléter la panoplie de cette nouvelle tentative de film de genre français. Timidement gore et armé d'un accident de voiture, le tout est baigné dans une ambiance nocture, obligeant certainement à un tournage de nuit qui, on le sent, a du être délicat pour l'ensemble de l'équipe. Ainsi techniquement, le film assure un niveau plus qu'honorable. Un soin évident du cadre, de la photographie nocturne, des effets de profondeur de champ jusqu'à un superbe dernier plan d'une poésie macabre réussie. Dommage que le soin technique soit au service d'une histoire développée de manière aussi peu intéressante. Si quelques scènes parviennent à être touchantes en ce qui concerne la détresse de Sarah, on n'arrive pas vraiment à ressentir autre chose, le reste du temps, qu'un ennui poli.

Anne Parillaud donne ce qu'elle peut et son énergie n'est pas à remettre en cause. Mais il existe certains moments dans le travail d'une comédienne où le ridicule ne tue plus. Il achève définitivement l'attachement à un film. Cette scène où elle hurle «salaud !» fait penser à une femme à qui on aurait volé un stock de Woolite emballé dans son sac Louis Vuitton. Et là, on décroche totalement. Thierry Frémont, acteur hautement recommandable au théâtre comme au cinéma, se livre ici à une interprétation hystérique en roue libre, tout en yeux écarquillés et muscles tendus. «Rhaaa» semble être un dialogue de choix et, puisque l'exagération est de mise, on en vient à se demander pourquoi en arriver à une telle tentative de performance d'acteur.

Le tournage était terminé depuis presque deux ans, DANS TON SOMMEIL a mis beaucoup de temps à arriver sur les écrans. Et sa présence au Festival de Gérardmer 2010 en soirée d'ouverture demeure plus qu'incongrue… Le film a vu sa sortie annoncée puis repoussée à plusieurs reprises, preuve en est de la difficulté de sortir un métrage qui a du mal à choisir ce qu'il veut être et qui risque de laisser le public indifférent, la télévision ayant depuis longtemps apporté son grain à moudre dans la «qualité française» des drames familiaux. Il est surprenant de constater qu'un film aussi banal réussisse à trouver non seulement un financement mais en plus le chemin des salles. Chemin qui, à la vue de la médiocrité du produit, devra se terminer aussi rapidement : DANS TON SOMMEIL ne possède pas suffisamment de personnalité pour espérer autre chose qu'un passage météoritique en salles, une exploitation à vitesse grand V à la télévision, l'atterrissage forcé et inévitable dans la multitude d'œuvres cinématographiques que chacun aura oublié dans deux ans. Le distributeur français, Albany Films - déjà responsable de l'équarrissage public de LADY BLOOD - a décidément du souci à se faire dans ses choix.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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