Madame Delambre téléphone à son beau-frère pour lui annoncer qu'elle vient de tuer son mari. Un meurtre étonnant puisque la victime s'est retrouvée écrasée sous une presse hydraulique. Aux yeux de la police et de François Delambre, tout cela ne tient pas debout et il leur est évident qu'on leur cache la vérité…
A priori, tout le monde connaît la trame de LA MOUCHE NOIRE. Un scientifique met au point une machine permettant de téléporter la matière d'un endroit vers un autre. Avant d'obtenir un résultat parfait, les expériences ne sont pas toujours probantes. Comme tout scientifique, son invention lui brûle les doigts. En fait, c'est un peu la même chose avec tous les savants au cinéma. Emportés par leur ambition et leur prétention, ils en oublient d'être prudents. Pas étonnant que des "cobayes" en fassent les frais. Et encore, on ne parle pas de savants fous… Bien sûr, celui de LA MOUCHE NOIRE se brûlera les ailes prouvant, s'il était besoin de le rappeler, que l'homme n'est rien de plus qu'un insecte dans l'univers, alors de là à toucher à ses secrets…
Aujourd'hui, quand on parle de la MOUCHE, la plupart des gens pensent au film de David Cronenberg. On ne les en blâmera pas tant son remake est une adaptation intelligente de l'histoire originale. Pourtant, il serait triste de passer à côté du film original : LA MOUCHE NOIRE. Réalisé à la fin des années 50, il n'est pas question ici de rivaliser avec les prouesses techniques des effets spéciaux d'aujourd'hui ni même de proposer un développement de l'histoire en adéquation avec notre société actuelle. Par exemple, le couple principal, un savant et sa femme, sont des personnages bien propres sur eux et soucieux des convenances. Il y a bien une séquence pleine de sous-entendues grivois mais à aucun moment on ne ternira le portrait de la famille modèle. Tout comme le thème principal n'est pas de parler des états d'âme du scientifique. Non, la ligne directrice est la même mais pas le traitement. Ainsi, le personne principal n'est pas vraiment le scientifique mais sa femme. Dès le début de l'histoire, elle détient les clefs du mystère de la mort de son mari et elle finira par nous les donner jusqu'à un dénouement particulièrement horrible que ne laissait pas présager l'introduction du film. A moins de l'avoir déjà vu auparavant… Le plaisir que l'on peut prendre à la vision de LA MOUCHE NOIRE ne provient donc pas des mêmes éléments que ceux de son remake. On appréciera ainsi la théorie logique qui mène à appréhender la possibilité de la téléportation. Car le film est bien plus porté sur l'aspect technique de l'histoire que son remake. Un peu trop parfois, la répétition des expériences étant souvent redondantes dans la manière de les filmer. Mais est-ce vraiment étonnant ? A l'heure actuelle, les prouesses scientifiques n'ont plus rien d'extraordinaire. A l'époque où fut réalisé le film, ces mêmes savants étaient des personnages d'exception et leurs expériences faisaient partie du domaine du spectaculaire. Ce qui avait une tendance à diaboliser leurs personnages d'où les histoires de savants, fous ou sains d'esprit, qui plantent magistralement leur boulot. La fin de LA MOUCHE NOIRE étant particulièrement... noire (fatalement).
Ultra simpliste, l'histoire est des plus linéaires. Sa construction donne quand même du dynamisme par l'utilisation d'un flashback. Simpliste ne veut pourtant pas dire que ce soit mauvais. Au contraire, il est rare de rencontrer des films aussi simples qui soient en même temps captivants. A moins d'être réfractaire aux charmes des anciens films, il est difficile de ne pas regarder LA MOUCHE NOIRE avec un certain plaisir. De plus, en tête du casting, on retrouve l'irremplaçable Vincent Price. Sans forcer le trait ni même déballer son incroyable talent, il domine le film de sa présence raffinée alors qu'il n'est, à vrai dire, qu'un second rôle.
Le remake de 1986 réalisé par David Cronenberg était sorti il y a quelques mois chez le même éditeur. Il avait la particularité d'être vendu avec LA MOUCHE 2 et il n'était pas possible de les acheter séparément. Etrangement, alors qu'aux Etats-Unis, LA MOUCHE NOIRE était elle-même vendue avec LE RETOUR DE LA MOUCHE, l'édition française est vendue indépendamment. Il faudra donc débourser plus pour obtenir les films. On suppose que le choix a été pris après la grogne de divers acheteurs ne voulant obtenir que le film de Cronenberg sans écoper de LA MOUCHE 2. Dommage car le concept de deux films, surtout lorsqu'il s'agit de suite, est a notre avis des plus attractifs.
En dehors de petites tâches noires qui apparaissent de temps à autres, l'image CinemaScope du film est de toute beauté. Elle capture à merveille les couleurs bien spécifiques de l'époque. Quand à la bande sonore codée sur cinq canaux de la version originale, elle ne pose aucun problème. En fait, le film bénéficie d'une jolie dynamique stéréo sur l'avant comme presque tous les films en CinemaScope. D'ailleurs, précisons qu'à l'heure actuelle, les dialogues des personnages sont généralement centrés. Ce n'était pas le cas sur les films en CinemaScope. Les dialogues se localisent en fonction de l'endroit où se trouvent les personnages à l'écran créant une véritable spatialisation de l'endroit où se déroule l'histoire. A vrai dire, cela sera sûrement bizarre si vous utilisez des enceintes très éloignées de votre écran. Pourtant, tout cela est fort logique dès qu'il s'agit de projeter le film sur un écran respectable dont les enceintes seront correctement placées. On pourrait se demander si une telle solution ne va pas rendre les dialogues moins clairs en se perdant sur les deux enceintes avant. Eh bien non, cela se comporte comme un charme sur une bande-son harmonieuse. En ce qui concerne les canaux arrières, ils distillent de manière très discrète quelques rares effets et surtout donnent une ampleur au rendu général dont la musique est la principale bénéficiaire. La jaquette indique une bande-son en quatre canaux. Cela s'explique sûrement par le fait que les deux canaux surround sont en Mono. Indiquer quatre canaux est donc vrai en quelque sorte mais le logo utilisé n'est pas approprié. Comparé à cela, le doublage français est un peu décevant, plutôt plat, ce qui est normal pour du Mono. Le gros problème étant les voix françaises rarement en adéquation avec le phrasé des acteurs originaux.
La bande-annonce du film est un ajout non négligeable au film. Il ne s'agit pas d'un assemblage des scènes clefs du film, puisque sa construction se fait autour d'une courte présentation de LA MOUCHE NOIRE par Vincent Price. Simpliste et efficace dans sa construction. Elle donne envie de passer immédiatement le film alors que finalement on ne voit pas grand chose. En plus de cette bande-annonce, les seuls autres bonus se limitent à quatre autres bandes-annonces de films de la FOX (LE RETOUR DE LA MOUCHE, MOUCHE, LA MOUCHE 2 et LE VOYAGE FANTASTIQUE).
Les années ont passé et le film garde tout son charme que ce soit dans l'interprétation ou le glamour ainsi que la naïveté inhérente au cinéma de cette époque. Le DVD est une belle manière de redécouvrir ces classiques et cette édition de LA MOUCHE NOIRE est excellente d'un point de vue audio/video.