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Critique du film
MURDER SET PIECES 2004

 

A Las Vegas, un homme (dont nous ne connaîtrons jamais le nom) est photographe le jour et serial killer la nuit. D'origine allemande, fils d'officier nazi, Il séduit des femmes avant de les tuer sauvagement.

Daté de 2004, MURDER-SET-PIECES est précédé d'une réputation exécrable et haineuse. Alors qu'il désirait tourner une sorte de remake hardcore du MANIAC de William Lustig, son auteur et réalisateur Nick Palumbo se voit traîné dans la boue et accusé d'anti-sémitisme et de misogynie. Il faut dire qu'avec MURDER-SET-PIECES, Palumbo pousse le bouchon très loin en mixant images du 11 septembre et imagerie nazi, sexualité et brutalité, tortures de femmes et meurtre d'enfant, le tout sous des trombes de gore «réaliste». Le metteur en scène voulait choquer, c'est réussi. Tellement bien réussi d'ailleurs que le pauvre bougre du en chier des ronds de chapeau pour que son œuvre voit le jour. Tourné en 35mm, ce sont tout d'abord les différents laboratoires qui refusent catégoriquement de développer le film pensant avoir affaire à des images non intégralement simulées. Pour couronner le tout, les labos préviennent la police qui fait arrêter l'un des producteurs.

Le film enfin terminé, il est purement et simplement banni en Angleterre, en Irlande ainsi qu'en Norvège. Il finira par sortir aux Etats-Unis en 2008, mais allégé de 23 minutes (un record) pour le rendre présentable selon la classification américaine. Entre-temps, Palumbo et son équipe ne parviennent pas à jouer sur le bouche à oreille pour valoriser la diffusion du film : MURDER-SET-PIECES est rejeté par la plupart des festivals d'horreurs et les magazines spécialisés de référence boycottent purement et simplement le métrage suite à sa violence «douteuse». Même Bill Lustig, que Palumbo espère avoir comme «parrain», est outré par le résultat. Lustig juge que le film va trop loin et que le jeune cinéaste devrait en avoir honte. Mais ce dernier ne se démonte pas. Avec le matériel à sa disposition, il remonte le film et livre un Director's cut en DVD. Alors en procès avec ses producteurs, Palumbo se rend coupable de la sale blague de trop en remplaçant le nom de ses anciens associés par celui d'officiers nazis. Une boulette qui lança une violente polémique sur le net où MURDER-SET-PIECES peinait déjà à faire parler de lui.

Bien, bien, bien… C'est donc avec fébrilité que l'on s'attend à découvrir la «chose» en espérant faire preuve d'objectivité. Premier constat : MURDER-SET-PIECES est un spectacle effectivement bien dégueulasse à ne pas mettre sous n'importe quels yeux. Mais, contrairement à la nuée de productions débiles simulant du snuff en vidéo, le film de Palumbo a pour lui d'être un film de cinéma. Doté d'un budget de plus de deux millions de dollars, MURDER-SET-PIECES a les moyens de ses ambitions. Si les comédiens sont dans l'ensemble médiocres, la photographie est de qualité et la mise en scène plutôt inventive. Palumbo ne tire finalement pas ses scènes chocs en longueur et use de petites trouvailles (comme des inserts sur des poupées) pour créer un peu d'ambiance durant les scènes de sévices. Le réalisateur veut clairement se rapprocher des classiques des années 70/80 ayant bousculé l'opinion et multiplie les clins d'œil à MANIAC, à MASSACRE A LA TRONCONNEUSE (comme cette ouverture au flash sur un cadavre) ou encore le roman American Psycho de Bret Easton Ellis. Cinéphile, Palumbo s'offre quelques apparitions de trognes (oubliées) du fantastique comme Tony Todd (éternel CANDYMAN), ou encore Gunnar Hansen et Edwin Neal (respectivement Leatherface et l'autostoppeur du MASSACRE A LA TRONCONNEUSE version 74).

La polémique, si réelle polémique il y a, serait plutôt à chercher du côté «mauvais goût» de MURDER-SET-PIECES. Car, quitte à choquer, Palumbo et son équipe se permettent un peu tout et n'importe quoi sans pour autant sembler assumer quoi que ce soit. L'imagerie néo-nazi est à ce titre particulièrement crétine. Non prévue dans le script à l'origine, Palumbo décide de l'intégrer au chausse-pied quand il se rend compte que son comédien principal (Sven Garrett) est d'origine allemande. Car un serial killer, ça fait déjà peur. Mais un serial killer qui parle allemand quand il est en colère, c'est ce qu'on appelle en marketing un «plus produit». Toute la provocation du film est dans le même ton : impulsive, non maîtrisée, dotée d'aucun propos. On a donc du mal à prendre MURDER-SET-PIECES au sérieux tant certains dérapages (comme le meurtre de la fillette) sont trop grossiers et puérils dans leurs objectifs de «choquer le bourgeois».

A tester connement les limites, Palumbo se sera cassé les dents. C'est dommage, car débarrassé de quelques couches de stupidité, MURDER-SET-PIECES est un spectacle extrêmement efficace. On suit la routine de notre serial killer dans une position inconfortable, entre passivité et rejet. A quelques instants, on ressent le réel malaise qui était le ciment des piliers du genre comme MANIAC ou encore HENRY, PORTRAIT D'UN SERIAL KILLER. Dommage que le metteur en scène, trop fasciné par le trash, ait négligé ce qui faisait réellement la force de ces classiques : le côté tragique des tueurs, premiers prisonniers de leurs atrocités. Palumbo pense juste s'en sortir avec une psychologie de bazar lorgnant du côté de la petite enfance. C'est finalement bien léger pour un film voulant nous traumatiser.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
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