Monami est une jolie lycéenne le jour et une redoutable vampire la nuit. En tombant amoureuse de Mizushima, son camarade de classe, Monami déclenche la colère de sa promise Keiko, la fille du professeur de science. Lors de l'inévitable affrontement entre les deux rivales, Keiko va perdre la vie. Pas grave, elle fera un excellent sujet d'expérience pour son père jouant au savant fou réanimateur dans les sous-sols de l'école.
Depuis quelques années, le Japon nous a offert les films gores parmi les plus outrancièrement dingos du marché. Citons par exemple MEATBALL MACHINE de Yudai Yamaguchi et Junichi Yamamoto, une sorte de TETSUO version boucherie / charcuterie. Citons aussi le très fun MACHINE GIRL de Noboru Iguchi et son écolière amputée du bras à qui l'on greffe une mitraillette géante. Derrière les maquillages et les hectolictres de sang déversés par ces deux ovnis, nous trouvons Yoshihiro Nishimura, un artiste underground bien décidé à imposer sa patte délirante. Quand l'homme passe à la réalisation, ça donne TOKYO GORE POLICE, un maelström d'images totalement exubérant où le sang inonde sans cesse l'écran, où l'humour vient railler les caricatures de la société japonaise, le tout dilué dans des vapeurs d'érotisme inspiré de «l'ero-guro» (qui associe sexualité et monstruosité).
Le succès de TOKYO GORE POLICE et (plus largement) de cette «nouvelle vague» de gore nippon met bien entendu Yoshihiro Nishimura à l'honneur. En tant que maquilleur, ce dernier ne chôme pas puisqu'il enchaîne les productions tordues qui feront les évènements de demain (comme ROBO-GEISHA de Noboru Iguchi ou SAMURAI PRINCESS de Kengo Kaji). L'homme trouve également le temps de repasser derrière la caméra pour les besoins de VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL. Accaparé une nouvelle fois par les très nombreux effets spéciaux de maquillage du titre, Nishimura partage sa casquette de metteur en scène avec Naoyuki Tomomatsu dont nous avions adoré son STACY. Ce dernier signe par ailleurs le scénario du film adapté d'un obscur manga de Shungiku Uchida, une femme auteur et également comédienne qui incarnait la traumatisante mère de famille de VISITOR Q de Takashi Miike.
VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL ne change pas la recette des précédents délires japonais suscités. Très gore, le film est aussi très amusant grâce aux effets «cartoon» de Nishimura. Le but n'est pas ici de mettre mal à l'aise ou de provoquer la nausée mais bien de nous amuser via une outrance qui n'est pas sans rappeler celle du BRAINDEAD de Peter Jackson ou encore la fameuse scène du chevalier noir dans MONTHY PYTHON : SACRE GRAAL. VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL jubile à nous concocter quelques séquences d'action ou absolument tout est permis, comme d'éplucher un visage via un lambeau de peau arraché à la base du cou. Totalement irréalistes, les effets montrent même volontairement leurs «trucs» pour rajouter une couche supplémentaire d'humour.
Si les scènes d'action gore remportent immédiatement l'adhésion, Nishimura et Tomomatsu n'oublient pas pour autant le reste du film. Bien décidés à ne pas répéter les quelques longueurs repérées dans TOKYO GORE POLICE et MACHINE GIRL, les deux hommes serrent les vis de leur narration et s'orientent ouvertement vers la comédie parodiant les films d'adolescents. VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL se passe majoritairement dans un lycée où tout le monde a un sérieux grain ! Nous retrouvons une bande de japonaises dépressives ne vivant que pour se tailler les veines, une escouade de filles «ganguro» mimant jusqu'à l'absurde leur volonté d'appartenir à la «black culture» (une mode existant véritablement au Japon), l'infirmière de l'école qui est bien entendu une super bombe, ou encore le réalisateur des JU-ON, Takashi Shimizu, qui tient le rôle du professeur de chinois. Tout ce petit monde va être une source de gags inépuisables pour notre histoire de triangle amoureux entre un jeune homme tiraillé entre une fille vampire (incarnée par «l'idole» Yukie Kawamura) et une fille «Frankenstein» réanimée par son père savant fou (Eri Otoguro, l'héroïne de ONECHANBARA de Yohei Fukuda). La confrontation homérique entre les deux «créatures» se fera du haut de la fameuse tour de Tokyo qui avait déjà servi de décor à l'introduction de TOKYO GORE POLICE.
Moins foisonnant que TOKYO GORE POLICE, VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL est à la fois plus modeste (surtout dans sa photographie) et néanmoins plus maîtrisé. L'histoire est bien tenue et on ne s'ennuie pas une seconde face à un spectacle qui ne recule devant rien. Citons par exemple la «Frankenstein Girl» qui vole dans les airs après s'être vissée son bras sur la tête, bras tournoyant tel une hélice d'hélicoptère. Le film s'autorise quand même quelques apartés, comme un flash-back montrant la mère de la «Vampire Girl» (interprétée par la fascinante Eihi Shiina) aux prises avec un «sumo de l'enfer». Si rien de tout cela est bien sérieux, le film se permet pourtant quelques pointes de romantisme faisant mouche. On se surprend à s'émouvoir de l'idylle entre nos adolescents malgré la folie ambiante. Il faut sans aucun doute y voir l'influence de Naoyuki Tomomatsu qui avait déjà réussi un tel pari avec son génial STACY. En bref, VAMPIRE GIRL VS FRANKENSTEIN GIRL est une nouvelle très bonne surprise en provenance du Japon. Du cinéma complètement décomplexé, d'une liberté folle et incroyablement divertissant. Du gore génialement fun qui fait du bien après quelques années majoritairement tournées vers des tendances plus glauques et hardcore.