Un jeune couple sur la route des vacances se fait prendre en otage par un taulard en cavale et sa petite amie junkie. Arrivés dans une station service pour ravitailler le véhicule, ils sont agressés par un homme infecté par un étrange virus. Reclus dans la boutique de la station, otages comme malfrats devront se serrer les coudes pour survivre.
On vous avait déjà parlé de SPLINTER à l'occasion de sa présentation au Festival du Film Fantastique de Gérardmer. Sa distribution française directement en DVD nous donne l'occasion de revenir sur ce petit film qui mérite vraiment que l'on y prête attention. SPLINTER est le premier long-métrage de Toby Wilkins, un infographiste dont les courts-métrages avaient tapé dans l'œil de l'équipe de Ghost House (la société de production de Sam Raimi). Avant de mettre en scène THE GRUDGE 3, Wilkins porte ici à l'écran un scénario simple et efficace qu'il veut dans la droite lignée des films d'horreur des années 80.
Classique, SPLINTER évite pourtant les clichés grâce à son écriture intelligente et adulte. L'idée de la prise d'otage est excellente car elle permet d'isoler le petit groupe immédiatement (le criminel détruisant tous les téléphones et refusant l'aide de la police). Le champ est donc libre pour un survival en huis clos à seulement quatre personnages, huis clos qui n'est pas sans citer John Carpenter et ASSAUT. En face d'eux, une menace indéfinissable les attend. Le «monstre» du film est un parasite infectant les corps, prenant leur contrôle avec une force capable de leur briser les os. Graphiquement très «beau» (le virus dresse des épines noires sur la chair contaminée), cet organisme à l'origine nébuleuse a également la particularité d'agglomérer ou bien de dissocier les morceaux de corps qu'il utilise. On pense bien entendu ici à THE THING à nouveau de Carpenter, RE-ANIMATOR 2 de Brian Yuzna pour ces visions de patchwork de chair dodelinant, ou encore au zombie purulent et concassé de NIGHTMARE DETECTIVE de Shinya Tsukamoto. Et quand un bout de main contaminée s'infiltre dans la station service, c'est bien évidemment EVIL DEAD 2 qui est directement cité.
Ce «monstre» génial, à l'excellent concept, nous venge de l'inepte CABIN FEVER d'Eli Roth qui nous promettait une idée similaire sans la tenir une seule seconde. Pour autant, SPLINTER ne se montre pas vraiment digne de ses ambitions. Les séquences avec le monstre sont malheureusement ratées, la faute à une caméra ultra tremblotante et des effets d'animation fouillis sur une créature déjà difficilement lisible. Le résultat à l'écran tient de la marmelade kinétique, un effet de (non) style épuisant pour le spectateur qui n'a toujours pas chassé la migraine occasionnée par les champions de l'image parkinsonniene comme 28 SEMAINES PLUS TARD de Juan Carlos Fresnadillo ou encore le français MUTANTS de David Morley.
Passé cette faute de goût, SPLINTER est une réussite grâce à ses très bons personnages campés avec conviction par de solides comédiens. Le film joue sur le caractère des uns et des autres pour faire rebondir son intrigue. Le prisonnier en cavale va ainsi passer d'ordure violente à protecteur obsédé par l'honneur de ne jamais abandonner personne. De son côté, le jeune homme pris en otage va d'abord se montrer pleutre et victime car incapable de s'imposer physiquement. Il deviendra pourtant le leader en cours de route, lorsque ses compétences en biologie fondamentale donneront des clefs de survie au groupe. Malin, le scénario de SPLINTER nous réserve également de purs moments de suspense «énormes», comme on en fait plus depuis vingt ans. On pense à cette étonnante tentative d'évasion effectuée par un personnage s'étant fait descendre sa température corporelle pour échapper à la vigilance du monstre, ou encore à cette amputation à «l'arrache» qui laissera pourtant le patient frais comme un gardon dès la scène suivante. Qu'importe, on marche comme au premier jour grâce à l'imagination et l'énergie de la mise en scène.
Présenté dans de multiples festivals à travers le monde, SPLINTER ne fait étonnamment pas l'unanimité chez les amateurs de Fantastique. C'est pourtant une excellente surprise, se plaçant aisément en haut du panier des films d'horreur de l'année. Hors mode (non, ce n'est pas un film «d'infectés»), SPLINTER assure un spectacle sans temps mort comme en témoigne sa courte durée. Inutile de dire que, pour nous, SPLINTER aurait mérité une sortie sur nos écrans en lieu et place d'autres titres à la légitimité plus discutable. La facture très soignée du film (la photographie est superbe) ainsi que son potentiel hautement divertissant n'auront cependant pas suffit aux distributeurs français. Dommage.
Sorti directement en vidéo, SPLINTER souffre, qui plus est, d'un traitement presque minimaliste que l'on réserve d'habitude aux fonds de catalogue. Au revoir les making-of et autres commentaires audio de l'édition américaine. L'édition française ne nous propose qu'une simple bande-annonce en guise de bonus. Heureusement, le disque ne transige pas sur la qualité technique. L'image est parfaite tandis que les pistes audios spatialisées sont vraiment ébouriffantes. C'est bien entendu l'essentiel pour découvrir le film dans des conditions optimales.