Photographe professionnel, Jennifer cherche l'homme qui lui fera découvrir le septième ciel. Ce n'est pas facile et elle multiplie les rencontres pour y arriver. Il faut tout de même préciser que la jeune femme a un appétit tel qu'elle use littéralement ses amants. Batz, quant à lui, a aussi des soucis avec sa sexualité puisqu'il dispose d'un organe aussi actif que démesuré…
Réalisateur de BASKET CASE, ELMER LE REMUE MENING et FRANKENHOOKER, Frank Henenlotter va stopper net sa carrière de cinéaste lorsqu'il se rend compte qu'on ne lui laisse pas vraiment la possibilité de s'exprimer. En effet, il a déjà fait des concessions en tournant BASKET CASE 2 et BASKET CASE 3 dans le seul but d'avoir l'opportunité de réaliser des œuvres plus personnelles. Lorsqu'on lui propose de mettre en boîte un quatrième BASKET CASE, il jette l'éponge et préfère s'éloigner du milieu. Pas totalement quand même puisqu'il va rejoindre le patron de Something Weird Video, Mike Vraney, avec lequel il va dépoussiérer un grand nombre de pelloches plus ou moins obscures dans le domaine de l'érotisme et de l'exploitation. S'il ne tourne plus de longs métrages, Frank Henenlotter ne va tout de même pas abandonner totalement les caméras. Un tout jeune rapper, fan de cinéma d'horreur, va le contacter au début des années 90 en lui demandant de réaliser ses clips. Il s'agit de R.A. Thorburn, plus connu sous le nom de R.A. The Rugged Man, qui vient tout juste de signer avec un label important. De là va naître une amitié entre le cinéaste et le musicien. Lorsque ce dernier va avoir l'envie de produire un film, c'est tout naturellement vers Frank Henenlotter qu'il va se tourner. Ensemble, ils vont alors écrire trois scénarios et l'un d'entre eux est confié à un producteur. SICK IN THE HEAD va hélas traîner durant trois ans durant lesquels la production aura toutes les peines du monde à monter un financement. Une longue période de gestation qui va mener à une rupture lorsqu'on demandera à Frank Henenlotter d'orienter son métrage vers un film à la mode, SAW. Finalement, SICK IN THE HEAD ne sera donc pas tourné et le cinéaste reprendra son scénario. Plutôt que de continuer de cette façon, R.A. Thorburn propose alors de produire directement l'un de leurs trois projets. Ce ne sera pas SICK IN THE HEAD mais BAD BIOLOGY où les deux hommes décident de ne s'imposer aucune limite !
Que ceux qui ont vu les œuvres phares de Frank Henenlotter soient rassurés. Le cinéaste ne s'est pas du tout assagi avec l'âge et nous propose un véritable délire dont il a le secret. Une recette cinématographique totalement atypique que ce soit sur le fond mais aussi la forme. Car le réalisateur ne suit pas vraiment les règles classiques du cinéma. C'est particulièrement flagrant à la fin de l'introduction de BAD BIOLOGY où son personnage principal s'adresse directement à la caméra, et donc au public, pour lui recommander de ne pas aller jeter un œil dans la salle de bains. Evidemment, la curiosité est plus forte et la caméra va exaucer l'inévitable vœu des spectateurs pour nous montrer une image particulièrement osée. Mais à cet instant, il est pourtant déjà évident que Frank Henenlotter ne va pas prendre de gant avec son sujet comme il avait pu le faire dans ses films précédents. L'histoire est relativement simple puisqu'elle nous présente un homme et une femme à la recherche de l'être avec lequel ils pourront s'accomplir pleinement. Mais dès les premières secondes du film, il est très clair que cette comédie romantique va prendre un tournant plutôt bizarre. On nous présente donc Jennifer, une jeune femme que la nature a pourvu de sept clitoris, d'un appétit sexuel hors norme et de cycle de procréation ultra rapide. De son côté, Batz a des problèmes très différents puisque à force de s'injecter des stéroïdes dans le pénis, son organe s'est développé au-delà des standards masculins. Les deux sont donc destinés à se rencontrer pour tirer le coup du siècle. De ce point de départ déjà assez branque, BAD BIOLOGY va s'amuser à ajouter pas mal de rebondissements très inattendus. Le cinéaste en profite même pour régler ses comptes avec le «système». Le film nous présente le dirigeant d'un magazine qui très embarrassé par une série de photos artistiques, qui dépasse, d'après lui, les limites du bon goût, alors que manifestement l'ambition de départ est justement de se démarquer. Une partie de l'intrigue de BAD BIOLOGY peut carrément être vu comme un gros doigt tendu à la face de ceux qui ne prennent pas de risques dans un registre artistique. L'idée est d'ailleurs décuplée par le métrage dans son ensemble en foulant joyeusement du pied le «bon goût ». Et c'est justement pour cela que les films de Frank Henenlotter sont de véritables perles. L'homme n'hésite pas ainsi à adopter une vue subjective de l'intérieur du sexe de son personnage principal, comme dans le pornographique SEXE QUI PARLE, ou bien à suivre les déambulations libidineuses d'une bite géante.
Avec ses excès, BAD BIOLOGY n'a rien pour attirer les acteurs renommés. Ce n'est pas bien grave puisque Frank Henenlotter a l'habitude de travailler avec des visages nouveaux, voire des amateurs. BAD BIOLOGY ne déroge pas à la règle avec ses deux acteurs principaux qui n'avaient jamais tourné pour le cinéma. Etant donné le contexte, ils s'en tirent avec les honneurs et côtoient une distribution où l'on peut croiser dans de petits rôles le réalisateur et producteur James Glickenhaus, le rapper R.A. Thorburn, des modèles sexy et actrices porno ainsi que la comédienne Tina Krause. Celle-ci s'auto-parodie avec humour en interprétant son propre rôle d'actrice jouant dans des métrages érotiques ou horrifiques mais surtout fauchés. Des rappers et musiciens viennent aussi jouer les extras que ce soit devant la caméra ou bien en prêtant des chansons. Le générique de fin va d'ailleurs mettre très en avant les amitiés musicales du producteur R.A. Thorburn. Quoi qu'il en soit, si tout ce petit monde n'a pas forcément une grande habitude dans le registre de la comédie, la bonne humeur et l'entrain l'emportent allégrement. Renouant avec ses métrages du passé, ou plutôt en prolongeant son œuvre, Frank Henenlotter parsème ici ou là quelques clins d'œil à ses films antérieurs alors que la relation entre le héros et son sexe n'est pas sans évoquer ELMER LE REMUE MENING.
Libre de tout tenter, BAD BIOLOGY accumule les sujets scabreux et affiche des images audacieuses avec une bonhomie désarmante. Pour peu que l'on soit sur la même longueur d'onde que le cinéaste, le film prend rapidement des airs jouissifs grace auxquels le spectateur ne peut que prendre son pied. Il est d'ailleurs intéressant d'exposer le contexte dans lequel nous avons pu voir BAD BIOLOGY. Car si le film était projeté lors de l'édition 2009 du Festival du Film Fantastique de Gérardmer, on peut se demander pourquoi le film n'était pas en compétition. Surtout lorsque l'on découvre le mauvais DEADGIRL qui n'a pas ne serait-ce qu'une once de l'intelligence et de l'imagination du métrage de Frank Henenlotter. Rien que l'idée du Jury, composé entre autres de Véronique Jeannot et Pierre Mondy, face à un tel film devient un véritable fantasme.