Un homme est décapité dans le salon d'une grande demeure espagnole. Une femme enterre le cadavre dans le jardin sous les yeux d'un couple d'enfants. Treize ans plus tard, les enfants sont désormais adultes. Le garçon est le fils de cette femme, la gouvernante de la maison. Quant à la fille, elle est l'héritière de l'homme qui fut tué. C'est alors qu'une série de visiteurs va faire son entrée dans cet étrange cercle familial, obligeant les uns et autres à révéler d'imprononçables secrets.
Sergio Bergonzelli est l'un de ces artisans oubliés du bis et de l'exploitation. Le gros de sa carrière s'échelonne entre le milieu des années 60 et 80, où il met en scène du film d'aventures (SURCOUF LE TIGRE DES SEPTS MERS), de l'horreur (BLOOD DELIRIUM avec John Philip Law, le héros de DANGER DIABLOLIK de Mario Bava), de l'Euro-trash (PORCO MONDO), de l'érotique (JOY) voir de l'hardcore (APOCALIPSIS SEXUAL avec Lina Romay). Production italo-espagnole tournée en 1970, IN THE FOLDS OF THE FLESH (NELLE PIEGHE DELLA CARNE) se veut comme une sorte de giallo saupoudré d'embardées trash. Le résultat, alambiqué jusqu'à l'absurde, transforme cette maigre pellicule en délire foutraque ne ressemblant finalement à pas grand-chose.
S'ouvrant sur une citation de Freud, IN THE FOLDS OF THE FLESH est si tordu qu'il mettrait sur les rotules une armée de psychanalystes. Le scénario joue la carte du mystère et du retournement de situation retournant la situation retournée par la situation qui va être à nouveau retournée par un mystère dans le mystère prompt à retourner à nouveau toutes les situations. Vous n'avez rien compris ? C'est normal ! Le film est basé sur un triangle familial impromptu : une fille qui a tué son père suite à un viol (la starlette Pier Angeli), une gouvernante au mystérieux passé (Eleonora Rossi) et le fils de la gouvernante qui élève des vautours dans le jardin. Les relations entre le fils et la fille sont particulièrement troubles, de même que la relation entre la gouvernante et le maître de maison tué au début du film. Qui est qui ? Qui a fait quoi ? Le film ne cesse de balancer les révélations les plus délirantes, allant du dédoublement de personnalité jusqu'à la confusion de la perception. Il faut bien ça pour justifier des rebondissements entre le sitcom brésilien et un épisode de Scooby-doo.
Autour de ce trio, les personnages vont et viennent (et souvent meurent) pour des motifs plus ou moins obscurs. Nous avons un malfrat, témoin au début du film de l'enterrement du maître de maison, et qui va rançonner tout ce petit monde treize ans plus tard. Nous avons aussi la visite de Michel, le cousin pot de colle aux mains baladeuses. Mais le fin du fin, sera le retour impromptu du père que l'on croyait mort pendant tout le film ! Pour pimenter ce scénario de vaudeville familial, IN THE FOLDS OF THE FLESH joue la carte du sulfureux pour tenter de garder son spectateur éveillé. Inceste, détails morbides (les personnages collectionnent les ossements humains), décapitations (cheap) en veux-tu en voilà, bain à l'acide, rien n'est trop pour relever la sauce d'une réalisation bien théâtrale. Nous aurons même droit à un flash-back de nazi-exploitation, lorsque la gouvernante nous parle de son traumatisme de jeunesse à la porte d'une chambre à gaz. Une séquence aussi gratuite que ringardement reconstituée, mais bien pratique pour se permettre de la nudité féminine frontale ou de la petite provocation historique.
Il ne faudra malheureusement pas compter sur la réalisation de Bergonzelli pour relever le niveau. L'homme abuse d'effets de styles lourds et dépassés (zooms, kaléidoscope, redondance de plans) quand il ne se borne pas à filmer de manière paresseuse des pages de dialogues sans queue ni tête. Les acteurs, en roue libre, oscillent constamment entre le correct et le ridicule. Mais bizarrement, cette absurdité organisée, grossissant toujours plus à chaque séquence, finit par devenir «l'intérêt» du film. On reste jusqu'au bout non pas pour le fin mot de l'histoire, mais pour être le témoin de cette frénésie de twists qui n'en finissent pas. Vu sous cet angle, IN THE FOLDS OF THE FLESH fera passer un moment sympathique et vintage à tous les mordus d'Euro-cult. Les autres peuvent passer d'office leur chemin devant ce pseudo giallo qui n'en est finalement pas un. Pour l'anecdote, IN THE FOLDS OF THE FLESH est le dernier film d'Eleonora Rossi. Elle décida de se retirer après le tournage, mettant fin à vingt ans de carrière. De son côté, Pier Angeli se suicidera un an plus tard, consciente qu'elle ne deviendra jamais la star internationale qu'elle rêvait d'être. Son dernier film sera OCTAMAN de Harry Essex, un pathétique film de monstre où un jeune maquilleur y faisait ses débuts, un certain Rick Baker.
Sorti à l'époque sur les écrans français sous le titre DANS LES REPLIS DE LA CHAIR, IN THE FOLDS OF THE FLESH avait depuis disparu de la circulation. C'est l'éditeur américain Severin qui nous déterre cette rareté pour une édition garantie intégrale. L'image, même si elle a été dépoussiérée pour l'occasion, n'est pas exempte de défauts liés à la détérioration de pellicule. Rien de trop rédhibitoire pour autant, surtout que la copie est présentée au format et anamorphosée pour le 16/9. La piste sonore est un stéréo là encore marqué par le poids des ans sans que celui nuise véritablement au confort du visionnage. L'unique version proposée est la version anglaise qui fait office de version originale. Rayon bonus, seule une maigre bande-annonce nous est proposée.