Le 17 novembre 1961, le plus jeune fils du vice-président Nelson Aldrich Rockefeller est porté disparu en Nouvelle Guinée. Selon toutes évidences, l'homme aurait fini dans l'estomac d'un crocodile ou dans ceux d'indigènes festoyant. Désireuse de connaître la vérité, la mère du disparu décide d'offrir une récompense à quiconque ramènera des preuves quant à la mort (ou pas) de son fiston. Avec plusieurs décennies de retards, quatre jeunes aventuriers tentent d'apporter à leurs vacances une pointe d'exotisme et de chasse aux trésors. Ils décident donc de partir en quête du disparu et ce en plein territoire cannibale…
Alors qu'il vient tout juste de se fourvoyer en écrivant le script de l'insipide NEXT, Jonathan Hensleigh est brusquement victime d'un étrange éclair de génie. De cette étincelle divine nait un audacieux concept à même de bouleverser le paysage cinématographique horrifique actuel. L'idée serait de mettre en scène un groupe de jeunes individus s'aventurant en Nouvelle Guinée et plus particulièrement en territoire cannibale. Afin d'apporter au récit une touche d'effrayante authenticité, il serait bon de livrer une image «brute», non trafiquée et libérée des éclairages artificiels qui contribuent généralement à la magie du cinéma. Mieux encore, il faudrait une caméra tremblotante et des cadrages à même de faire hurler un metteur en scène dit «professionnel»... En fait, l'idéal serait de confier la caméra aux jeunes abrutis du film afin qu'ils se mettent eux-mêmes en image ! «Mais c'est bien sûr, je suis un génie !» a dû s'esclaffer Hensleigh suite à cette illumination. Car en effet, contrairement au lecteur de ces lignes qui sent poindre le plagiat à plein nez, l'homme déclare ne s'être en aucun cas inspiré du CANNIBAL HOLOCAUST de Ruggero Dedoato. L'affirmation a bien évidemment de quoi surprendre, surtout en regard du marketing qui essaie aujourd'hui de rattacher les deux films, mais qu'importe et laissons à notre réalisateur/scénariste inspiré le bénéfice du doute...
Si toute ressemblance avec un film existant ou ayant existé n'est ici que fortuite, force est tout de même de constater que le hasard fait bien les choses. Car au delà du concept et de la thématique, nous retrouvons dans ce WELCOME TO THE JUNGLE nombre de séquences «choc» faisant écho à celles du métrage de Dedoato. Ainsi, l'une des plus célèbres images de CANNIBAL HOLOCAUST est bien évidemment celle de la femme empalée. Dans sa version, Jonathan Hensleigh propose une séquence équivalente en dévoilant l'un de ses personnages transpercé et accroché par un rondin de bois... Si cette courte scène pointe bien évidemment du doigt la mauvaise foi du cinéaste, elle est aussi très révélatrice de son incapacité à se réapproprier une idée vieille de 27 années. Car malgré une imagerie très similaire (un cadavre et un pieu) et une approche identique (le spectateur voit d'abord l'horreur par l'intermédiaire des protagonistes), WELCOME TO THE JUNGLE échoue et «plante» littéralement une séquence pourtant supposée «clef». Sur cet exemple bien précis, nous pourrions mettre en cause le jeu passable des acteurs ou l'aspect moins «graphique» de l'empalement mais le vrai problème vient en réalité de la mise en scène dans sa globalité.
Avec son film, Jonathan Hensleigh semble ainsi s'être fourvoyé dans un triste amalgame entre «cinéma réalité» et «amateurisme en roues libres». La nuance est pourtant de taille et la vision de WELCOME TO THE JUNGLE semble même nous démontrer qu'il existe un véritable gouffre entre la création d'une réalité tangible façon Ruggero Dedoato et celle d'une spontanéité plate telle que la filme Hensleigh. Dans le premier cas, nous assistons à la mise en scène réfléchie d'une imagerie artificielle que l'on fait tout pour rendre réaliste et effrayante. Dans le second, nous avons le sentiment d'une improvisation mettant malheureusement de côté toute notion d'efficacité. Jonathan Hensleigh tombe donc dans l'un des pièges du cinéma à la première personne et lorgne ici davantage vers la télé-réalité, laquelle privilégie l'aspect «authentique» (hum...) des images au détriment d'un mécanisme dramatique parfaitement mûri. En passant à côté du concept qu'il cherche à exploiter, Hensleigh commet une erreur impardonnable et bien évidemment fatale à l'implication du spectateur. Reste qu'il ne s'agit pas là du seul problème que compte le métrage...
En effet, s'il est bien une chose qu'il convient de dénoncer suite à la vision de WELCOME TO THE JUNGLE, c'est son manque évident de rythme. Mou de bout en bout, le film ne propose malheureusement rien d'autre que d'interminables dialogues entre deux couples imbéciles amenés à faire chemins séparés. Soyons honnête et reconnaissons que l'on discerne, de loin, une volonté de créer des personnages qui ne soient pas que de simples enveloppes vides. Reste que là encore, le résultat n'est pas probant, le manque de talent refait des siennes et très vite, notre petit groupe d'individus sombre dans la parodie et les clichés. D'un côté, nous aurons donc droit au couple de fêtards crétins alors que de l'autre, nous aurons un tandem platonique, réfléchi et même un brin moralisateur. Les joutes verbales entre «clans», pathétiques et laborieuses, s'éterniseront dès lors jusqu'à la cinquante quatrième minute marquant l'arrivée, ô combien attendue, des premiers autochtones peinturlurés.
Bien que discrets, les cannibales de WELCOME TO THE JUNGLE sont l'un des rares points inattaquables du métrage. A dire vrai, le cinéma transalpin nous a tellement habitué à d'étonnants indigènes que ceux-ci nous apparaissent plutôt comme réalistes et grimés avec soin. Nous ne sommes donc clairement pas dans l'un des derniers opus gastronomiques de Bruno Mattei ! Dans le même ordre d'idée, les effets gores, indispensables à tous films d'anthropophages se respectant, tiennent la route et assurent une mise en bouche satisfaisante. Malheureusement, nous devrons nous contenter d'un simple et maigre apéritif car le dîner sera bel et bien absent le soir de votre visionnage. WELCOME TO THE JUNGLE est en effet un film incroyablement avare qui, face à ses aînés italiens de trente ans, fait bien pâle figure. Nos cannibales nouvelle génération semblent ainsi à la diète et nous n'aurons droit à aucune des «consommations sur place» auquel le genre nous avait habitué. L'époque serait-elle dédiée à ce point à la restauration rapide et à la mal-bouffe ? Quoiqu'il en soit, le film de Jonathan Hensleigh se montre particulièrement laborieux lors de son entrée en matière, horriblement amer durant son plat principal et carrément indigeste lorsqu'arrive l'heure de la conclusion. Nous tenons là l'illustration parfaite d'un cinéma hypocrite, se réclamant de l'horreur graphique tout en prenant grand soin de rester acceptable et propre sur lui.
En s'attaquant aux films de cannibales et plus particulièrement au CANNIBAL HOLOCAUST de Ruggero Dedoato, Jonathan Hensleigh accepte de se livrer au petit jeu de la comparaison. Malheureusement pour lui, son WELCOME TO THE JUNGLE ne fait à l'évidence pas le poids et peinera à combler les amateurs, même les moins exigeants. L'âge d'or des folies italiennes n'est plus et nous n'aurons ici droit qu'à du cinéma d'exploitation gentillet, plat et sans surprise. Certes, certains excès transalpins étaient sujets à controverse mais même sans cela, l'efficacité et la générosité restaient des valeurs essentielles qu'aucun n'aurait osé sacrifier. Hensleigh commet pourtant cet affront et se paye de surcroît le luxe de nous livrer un métrage «à la première personne» raté et ponctué d'incohérences involontaires bien qu'amusantes. Le poste de réalisateur ne semble décidément pas convenir à notre homme qui, après un PUNISHER bien peu convaincant en 2004, sombre ici davantage encore dans la facilité et la fadeur…
Après avoir édité le film en DVD (chroniqué dans nos colonnes), l'éditeur français Emylia récidive et s'attaque maintenant à la haute définition. Si le travail sur l'image est ici de qualité, force est de constater que le bilan n'est pas des plus concluants. La faute n'incombe pas à l'éditeur mais bel et bien à la nature même du film, tourné en DV et privilégiant sans scrupule l'amateurisme laid. Ainsi, la plupart des plans n'offrent pas un niveau de détail propre à mettre en avant le potentiel d'une définition accrue. Les mises au point hasardeuses s'enchaînent et, lorsque ce n'est pas le cas, les plans tremblotants prennent le relais. En de rares occasions toutefois, l'image se montre stable, parfaitement réglée et à la limite du professionnel. Lors de ces trop rares instants, le support Blu-Ray étale son savoir-faire et nous délivre une image étonnante de profondeur et de contraste. Reste que nous sommes bien loin des résultats obtenus avec des films comme REC ou CLOVERFIELD par exemple. La différence de budget (avec le second) est sans doute à prendre en compte mais ne nous leurrons pas : C'est davantage d'un problème de compétences dont il est question ici. Reste que l'éditeur fait donc au mieux et nous livre un travail pour le moins respectueux du film qu'il commercialise. Le format d'origine est à ce titre respecté et affiche par conséquent un ratio 1.77. Ajoutons en outre que le petit souci évoqué sur notre chronique de l'édition DVD n'est ici pas présent.
Sur le plan sonore, le constat est à peu de choses près équivalent. A savoir que les pistes originale et française (toutes deux en Dolby Digital 5.1) s'avèrent aussi claires que possible mais qu'elles n'offrent bien évidemment pas l'immersion à laquelle peu aujourd'hui prétendre un film réalisé avec soin. Nous dirons donc que la précision est de mise mais que les sensations sont absentes. Notons par ailleurs qu'il semble indispensable d'opter ici pour la version originale anglaise. Pour vous y aider, Emylia propose un sous-titrage francophone de qualité qui vous épargnera un doublage français plus que passable. Croyez-le ou pas mais ce dernier aurait même tendance à enfoncer davantage le film, déjà situé fort bas dans notre estime. Écouter les protagonistes en version française, c'est l'assurance d'avoir envie de les boulotter crus, et ce bien avant l'arrivée tardive des anthropophages !
Sur le plan éditorial, Emylia se montre paresseux et ne nous offre absolument rien ! Le menu, assez réussi, propose cependant une option «Extra» qui n'entraînera que la déception du malheureux DVDPhile. Ce «bonus» se contente en effet de dévoiler quelques minuscules jaquettes dont on peine à distinguer les titres. Nous aurions espéré les bandes annonces associées mais il n'en sera malheureusement rien... Notons enfin le fonctionnement peu conventionnel des menus qui optent pour une approche similaire à celle d'un système d'exploitation type Windows. A savoir qu'un clic sur une option ouvre une sous-fenêtre et que pour revenir au menu principal, il nous faudra la fermer en cliquant sur une petite croix... Étrange idée...