Robert Neville vit seul dans New York. Littéralement seul puisqu'il est le dernier survivant de la race humaine qui habite la ville. Le jour, il déambule dans les rues abandonnées et fait ses emplettes dans les magasins et autres réserves de New York. Lorsque la nuit tombe, il regagne son appartement où il se retranche à l'abri de créatures agressives et sensibles à la lumière du soleil…
Au milieu des années 50, Richard Matheson écrit I am Legend (Je suis une Légende). Véritable référence dans son domaine, il relate l'histoire d'un homme seul confronté à un monde qui n'est plus peuplé que de vampires. D'après l'auteur, l'idée lui serait venue à la lecture du Dracula de Bram Stoker et en imaginant un monde peuplé seulement par des hordes de vampires. Si le livre évoque les vampires, il est aussi, et surtout, une œuvre qui va influencer d'autres créatures fantastiques. Car l'ouvrage pose aussi les bases de la contamination de la race humaine et sa transformation en bêtes assoiffées de sang. Evidemment, le livre rappelle inévitablement les hordes de morts-vivants s'attaquant aux derniers survivants des films de George Romero et, par extension, à tous ceux qui ont suivi la même voie (RESIDENT EVIL, 28 JOURS PLUS TARD, etc…). Au cinéma, I am Legend va être adapté en 1964 dans une coproduction italo-américaine titré THE LAST MAN ON EARTH. En France, cette première adaptation ne connaîtra pas de sortie dans les salles et restera inédite jusqu'à des sorties en vidéo. Bien qu'il ait travaillé sur le scénario, Richard Matheson demandera à ce que son nom soit retiré de la liste des scénaristes au générique. Pour lui, son travail avait été trop altéré pour qu'il puisse associer son nom à la version qui fut projetée à l'arrivée. Quelques années plus tard, l'auteur ne participera pas à la création du SURVIVANT mettant en scène Charlton Heston. Déviant largement plus du livre d'origine, cette version prendra quelques éléments du film précédents et proposera sa propre vision de l'histoire tout en omettant complètement les aspects vampiriques des créatures de la nuit. Une vingtaine d'années plus tard, la Warner envisage de créer une nouvelle adaptation mais il faudra une bonne douzaine d'années avant que le projet ne se concrétise réellement…
Toujours détentrice des droits d'adaptation cinématographique du livre, la Warner envisage donc de faire un nouveau film dès le milieu des années 90. Un premier script est écrit par Mark Protosevich et le projet devrait se tourner rapidement mais JE SUIS UNE LEGENDE va connaître de longues pauses pour des raisons budgétaires. En effet, si le film doit être lancé avec Ridley Scott en tant que réalisateur et Arnold Schwarzenegger dans le rôle principal, la Warner stoppe tout en raison de l'estimation du budget qui est trop élevés aux yeux du studio. Même après des révisions à la baisse, l'enveloppe paraît trop élevées. Entre 1997 et 2005, la production du film va stagner même si plusieurs cinéastes seront attachés à sa réalisation tel que Rob Bowman ou encore Michael Bay. C'est seulement en 2005 que JE SUIS UNE LEGENDE va finalement trouver une certaine stabilité avec l'arrivée du producteur et scénariste Akiva Goldsman. Ce dernier amène le réalisateur et l'acteur principal avec lesquels il a déjà travaillé sur des films différents : le réalisateur Francis Lawrence a signé CONSTANTINE alors que Will Smith interprétait le rôle principal de I, ROBOT.
Cette nouvelle transposition va, comme les précédentes, faire quelques entorses à l'œuvre littéraire originale tout en adoptant les mêmes traits d'adaptation. Pas de vampires dans b>JE SUIS UNE LEGENDE et le personnage principal est un scientifique contrairement au livre. Bien évidemment, comme dans le livre, ce nouveau film conserve la narration où se mêle des flash-backs donnant un éclairage sur le passé de son personnage principal. Ainsi, la première partie du film place l'acteur Will Smith quasiment seul à l'écran, perdu au milieu des rues désertées de New York (à l'origine, le livre se déroule à Los Angeles). L'acteur et le scénario réussissent assez adroitement à nous dépeindre le drame d'un personnage qui a tout perdu alors qu'il aurait du être le sauveur de l'humanité. Plutôt tragique, le film met aussi et inévitablement en avant la solitude de son personnage. A cet effet, sa visite dans un vidéo club peuplé de mannequins est assez bien vue tout comme sa relation avec son chien. Le quotidien du personnage prend d'ailleurs inévitablement en compte les comportements d'aujourd'hui. Le Neville de 2008 se passe en boucle des films chez lui alors que celui des années 70, Charlton Heston, allait voir et revoir WOODSTOCK dans une salle de cinéma. Cette évolution, on peut aussi la retrouver dans les créatures nocturnes du film. S'il n'est plus question de vampires, tout comme dans LE SURVIVANT, le film réalisé par Francis Lawrence ne ramène pas pour autant une secte d'albinos. A la place, les créateurs du film ont opté pour une tendance plus dans l'air du temps et, ironiquement, inspirée par le livre d'origine. Les «Dark Seekers», nommés ainsi dans le film, se rapprochent bien plus des êtres humains infectés que l'on peut voir dans RESIDENT EVIL, 28 JOURS PLUS TARD ou encore la plupart des films de «morts-vivants» sortis ces dernières années. JE SUIS UNE LEGENDE s'accorde pas mal d'altérations par rapport au livre d'origine. Pourtant, il s'avère être une adaptation relativement fidèle dans son esprit tout du moins en ce qui concerne la version qui n'a pas été diffusée dans les salles de cinéma !
La pré-production du film a connu bien des soucis mais il s'avère que le JE SUIS UNE LEGENDE sorti dans les salles n'est pas exactement celui prévu à l'origine. Parmi les changements notables, on notera les créatures en image de synthèse. A l'origine, pourtant, il s'agissait d'acteurs maquillés interprétant normalement leur rôle à l'écran. Mais après quelques jours de tournage, il en fut décidé autrement et les acteurs ont été remplacés par des doublures numériques. Un choix assez étrange puisqu'il s'agit certainement d'un défaut de cette adaptation cinématographique. Car les créatures réalisées en image de synthèse, suivant les mouvements des acteurs grâce à des capteurs, n'ont pas à l'écran une apparence réelle. Cela instaure un véritable contraste avec le reste du métrage qui essaie justement de nous convaincre de la véracité des événements auxquels nous assistons. Mais le plus étrange des changements de cette adaptation, c'est la modification de la fin du film avant sa sortie en salles. Plutôt que conserver une version particulièrement osée, et largement plus fidèle à l'œuvre originale, il est décidé d'altérer le film pour nous offrir un épilogue totalement différent. Dans les salles de cinéma, le héros se sacrifie pour la race humaine tout en nous offrant une lueur d'espoir pour l'avenir ce qui n'est pas sans rappeler l'épilogue christique du SURVIVANT. Alors que dans la fin originale, le héros nous est montré sous un jour particulièrement ambigu et le dénouement, malgré les apparences, est particulièrement pessimiste quant à l'avenir de l'humanité. Cette fin occultée jusqu'à la sortie en vidéo de JE SUIS UNE LEGENDE prend ses racines au sein d'une poignée de séquences du film qui sont donc logiquement ramenée dans le «montage alternatif» qui devrait en réalité s'appeler «montage original». Peu importe, la vision de ce montage donne une dimension bien différente du film tel que vu dans les salles…
Adaptation réussie, sans pour autant être véritablement fidèle, JE SUIS UNE LEGENDE est un film de grande qualité qui souffre un peu de certains de ces choix et particulièrement de la matérialisation de ses créatures numériques. Hormis ces défauts, le film de Francis Lawrence parvient à allier grand spectacle hollywoodien avec une charge émotionnelle plus intimiste. Ce qui s'avère peu banal de nos jours…
Avec sa sortie en vidéo, JE SUIS UNE LEGENDE se débarrasse de l'un de ses défauts. A savoir un montage cinéma réducteur gommant plusieurs séquences et offrant une fin malvenue. Le montage original, plus équivoque, permet de redécouvrir le film de façon encore plus satisfaisante. Sur l'édition Blu-ray, les deux montages cohabitent via un système «Seamless Branching». Toutefois, si vous choisissez de regarder la version «alternative», vous ne pourrez pas bénéficier du doublage français. En effet, les quatre ou cinq passages inédits jusqu'ici n'ont pas été doublés en français. Si les options sonores changent, ce ne sera pas le cas de l'image et il est impossible de voir une différence entre les passages provenant du montage cinéma et ceux du montage original. Le transfert 1080p/24 au format cinéma est proprement magnifique. La profondeur de champ ainsi que le niveau de détail permettent d'apprécier les nombreux passages spectaculaires d'un New York désertée.
Pour le son, la version originale anglaise est déclinée en Dolby Digital 5.1 et Dolby TrueHD 5.1. Cette dernière piste nécessitera toutefois de disposer d'une installation à même de retranscrire toutes ces nuances. Car il est vrai que cette piste en Dolby TrueHD offre un rendu plus naturelle à l'ensemble du film. C'est d'autant plus vrai lorsque l'on retourne en arrière vers le simple Dolby Digital qui semble alors plus étriqué. Néanmoins, cela ne veut pas dire pour autant que la piste Dolby Digital 5.1 est de mauvaise qualité. Bien au contraire, elle s'avère expansive et détaillée tout en assurant très efficacement la sonorisation des images. La version Dolby TrueHD apporte surtout une plus grande subtilité dans la dynamique et les nuances. Evidemment, le Blu-ray propose aussi le doublage français avec une piste Dolby Digital 5.1 qui s'avère techniquement de très bonne facture.
Blu-ray oblige, une partie des suppléments sont en haute définition. C'est le cas de «La Science et le Film» qui est une Featurette exposant les dangers concernant les virus. C'est d'ailleurs assez surprenant car nous avons vu des sujets relativement similaires sur d'autres éditions vidéo dont INVASION sorti récemment chez Warner. Les virus sont donc les ennemis de l'humanité et après avoir vu ce mini documentaire, nous serons partagés entre diverses informations pertinentes évoquant les dons de Will Smith pour la recherche scientifique ou, de façon plus sérieuse, les véritables pandémies. Alarmant, ce sujet est, en tout cas, bien réalisé pour que l'on ne s'y ennuie pas.
Présenté en définition standard qualité DVD (576p), «La création de Je suis une Légende» est vaguement annoncé comme un long documentaire de cinquante minutes découpées en plusieurs parties. A vrai dire, il s'agit bien plus d'une compilation de Featurettes présentées à la suite. Cela se ressent d'ailleurs assez vite puisque chacune des parties passe du coq à l'âne sans compter que l'ordre de ces mini documentaires est pour le moins chaotique. On passe ainsi d'un module évoquant les séquences de l'évacuation de New York, on passe à d'autres sujets avant de revenir à celui évoqué précédemment. Rapidement, cette enfilade de suppléments devient très déconcertante. Souvent intéressant comme lors de l'évocation du tournage des scènes en voiture ou bien de l'explosion qui remue l'appartement du personnage principal, d'autres passages semblent anecdotiques voire sans intérêt. Il est donc assez dommage que ces suppléments, d'origine américaine, n'aient pas fait preuve d'un peu plus d'unité. Evidemment, aucune information ne nous sera donné sur la longue pré-production du film ni même sur les deux montages du film qui cohabitent pourtant sur ce disque.
Les derniers suppléments sont en haute définition. Il s'agit de quatre courts métrages d'animations réalisés en support de la promotion du film. L'animation n'est pas ce que l'on a vu de mieux sur un écran mais il faut préciser qu'il s'agit en fait plutôt de bandes dessinées animées. La qualité des quatre histoires est assez inégale. Etrangement, ce sont les deux passages qui ne vont pas au-delà du concept qui sont les plus intéressants. «La Mort en cadeau» est pour le moins pessimiste tout comme «Sacrifier quelques-uns uns pour le salut de tous» alors que les deux courts, issus du même auteur, ne racontent pas à proprement parlé une histoire mais s'attache à une sorte de faits divers assez courts. «L'isolement» et «Abri» ont de leur côté une véritable narration avec un début, un milieu et une fin mais peinent un peu à convaincre. Peut être parce que justement l'animation est sommaire et qu'elle s'accorde donc bien plus à un «concept» qu'à une véritable «histoire». Pour terminer, on constatera que les bandes-annonces de JE SUIS UNE LEGENDE ne sont pas proposées parmi les suppléments.