Le scientifique Chris Cronyn utilise un appareillage sophistiqué pour envoyer des signaux vers la planète Mars. Une tentative de communication qui permettrait, d'après l'homme de science, d'établir un contact avec une race extraterrestre plus avancée. Les éventuelles avancées technologiques qui pourraient être obtenu par ce biais intéressent les Soviétiques qui vont espionner les messages envoyés par Cronyn et leurs éventuels retours…
Durant les années 50, les Etats-Unis est en pleine psychose anti-communiste. Le cinéma va utiliser cette peur en reportant le péril rouge en le transformant en extraterrestres envahisseurs. Mars, la planète rouge, est alors le berceau d'infâmes conquérants d'un autre monde qui entendent bien mettre un terme à nos valeurs et donc à la démocratie. Dans ce contexte, RED PLANET MARS surprend sur bien des points puisque son intrigue prend à contre-pieds la vision habituellement maléfique de Mars. Un choix curieux mais qui n'empêche pas le film d'être un véritable métrage de propagande anti-soviétique. Cette différence avec les autres films du genre de cette période, le traitement du sujet ou encore le pamphlet à l'encontre des dirigeants de l'URSS est, aujourd'hui, pour le moins fascinant sur de nombreux plans.
A l'origine de RED PLANET MARS, il y a une pièce de théâtre de John Hoare et John L. Balderston. Ce dernier n'est pas inconnu puisqu'il était celui qui avait transposé sur les planches, aux Etats-Unis, la pièce de théâtre Dracula qui sera produit peu après par la Universal au cinéma avec, forcément, DRACULA. Le scénariste sera alors engagé par la Universal et il va œuvrer sur nombre d'autres films de l'âge d'or de l'horreur à cette époque : FRANKENSTEIN, LA MOMIE… L'œuvre originale, «Red Planet», est récupérée par le producteur Anthony Veiller qui va l'adapter lui-même pour le grand écran avec John L. Balderston. Anthony Veiller n'est pas un débutant en ce qui concerne l'écriture et on l'a déjà nominé aux Oscars pour l'écriture du scénario des TUEURS de Robert Siodmak. Le rôle principal est donné à un jeune débutant nommé Peter Graves. Durant les années 50, il va ainsi participer à nombre de série B d'un niveau parfois très discutable tel que KILLERS FROM SPACE avant de devenir le héros de la série MISSION IMPOSSIBLE. Pour réaliser le film, on mise sur Harry Horner qui a surtout œuvré jusque là en chapeautant le design de métrages divers dont quelques Tarzan produit pour le compte de la RKO. C'est d'ailleurs surtout à ce poste qu'il passera à la postérité et il travaillera d'ailleurs par la suite pour Robert Rossen, Sydney Pollack, Robert Wise ou Walter Hill. Mais, pour l'heure, il va donc s'occuper de mettre en boîte RED PLANET MARS avec de maigres moyens. Ce n'est finalement pas tellement important puisque malgré son titre, le film garde les pieds sur Terre et adopte un traitement réaliste qui met de côté les fantaisies habituelles de la science-fiction. Tout au plus, l'aspect scientifique demande d'équiper deux laboratoires, un officiel aux Etats-Unis et un clandestin quelque part sur les cimes des Andes. Pour le reste, les passages les plus spectaculaires se résumeront à un incendie et à une avalanche. Le reste nécessitera surtout une mise en scène relativement habile pour ne pas trop montrer que le bouleversement politique de la planète se fait avec des moyens limités !
RED PLANET MARS est, comme déjà dit, un métrage fascinant. Et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, le film approche son sujet avec une rigueur réaliste qui impose le respect dans la première partie du film. Le mystère des échanges de messages cryptiques avec Mars et l'intrigue soviétique parallèle attise la curiosité. Sans être exceptionnel, l'interprétation des acteurs s'avère relativement solide et participe au sérieux d'une entreprise qui va chavirer inexorablement à partir d'une grande révélation aux environs de la moitié du film. Traitant d'une communication avec une race extraterrestre avancée, le film va nous dépeindre l'impact sur la société américaine mais aussi plus largement planétaire. Certains rebondissements sont d'ailleurs pour le moins inattendus et le gouvernement américain ira même jusqu'à tenter de mettre un terme aux envois de messages entre Mars et la Terre pour cause de sécurité mondiale. A ce titre, la première partie du film est plutôt exemplaire dans son traitement et retient donc le spectateur qui se demande, tout comme le héros, où tout cela va nous mener. Malin, le film fait des habitants de Mars une entité bénéfique qui ne veut aucun mal aux Terriens. Après tout, à quoi bon, nous avons déjà les Communistes. C'est un peu le constat du film qui ne s'embarrasse pas à aller chercher dans les étoiles une métaphore de la menace soviétique. C'est d'ailleurs tout autant une qualité mais aussi un énorme défaut de ce film. Mais RED PLANET MARS enfonce lourdement le clou en amenant de façon totalement inattendue, ou presque, des réflexions théologiques. Nos amis les Martiens auraient été touchés par le même message religieux que la Terre. Mieux, les habitants de la planète rouge pourraient très bien être une race touchée par le divin. La coloration très religieuse du récit va alors s'intensifier. Le sérieux du film va alors péricliter pour entrer dans la propagande pure qui nous amène confronter religion bénéfique avec politique maléfique (le communisme). Les événements qui en résultent nous offrent un spectacle d'une grande naïveté dont l'un des ressorts n'est pas sans rappeler l'histoire du prêtre orthodoxe qui ose finalement affirmer sa foi face au parti dans DON CAMILLO EN RUSSIE. Cette référence au film de Luigi Comencini donne une bonne idée du gouffre abyssal dans lequel s'enfonce RED PLANET MARS puisqu'il ne s'agit en rien d'une comédie. Et d'ailleurs, la naïveté du propos, un peu con con, tranche avec des propos ou séquences violentes. Par exemple, les dirigeants soviétiques se montrent réellement diabolique en planifiant une famine pour remettre de l'ordre dans les émeutes en tablant que quelques milliers ou millions de morts vont remettre les pendules à l'heure. De même, on assiste à une répression armée donnant lieu à un massacre de villageois qui n'expriment rien d'autre qu'un avis contraire à celui du parti. Cet aspect du métrage, la cassure du récit et sa progression durement propagandiste sont finalement tout autant fascinant que la première partie du film !
Mais RED PLANET MARS réserve encore quelques surprises… bonne et mauvaise… L'épilogue amène une nouvelle révélation sur les messages de Mars qui teinte le film d'une ironie monumentale. L'histoire aurait pu s'arrêter ainsi en nous offrant une fin «heureuse» mais tout particulièrement ambiguë. Il aurait alors été possible de disserter sur le contenu du film, sur la portée des messages politiques et religieux. Malheureusement, un dernier élément surprise donne un sacré coup dans l'aile aux quelques minutes précédentes jusque là très sardoniques. Dommage mais cela n'empêche pas, aujourd'hui, de redécouvrir RED PLANET MARS avec l'œil critique du spectateur du XXIème siècle et de découvrir un film très surprenant par ses choix, son développement et surtout en allant extrêmement loin dans sa charge anti-soviétique.
Edité par le label l'Atelier 13 en Espagne, RED PLANET MARS a l'énorme avantage d'être proposé avec un sous-titrage français. Hélas, le livret de 12 pages illustrés est, quant à lui, entièrement en espagnole. Impossible de lancer la pierre à l'éditeur puisque cette édition DVD cible avant tout son pays d'origine, l'Espagne. Le sous-titrage français contient quelques petites fautes mais permet d'offrir une traduction francophone à ceux qui ne comprennent pas l'anglais. Notons quand même qu'il y a manifestement une erreur sur l'authoring du disque puisque si vous choisissez «Version anglaise sous-titrée français», vous activez les sous-titrages espagnols. Il faut donc choisir le sous-titrage avec la touche de la télécommande au début du film pour éviter ce désagréments. Car la seule piste sonore est donc une version originale anglaise en mono. Plat et pas toujours d'une clarté exemplaire, la bande sonore fait son office sans apporter de miracle.
L'image ne fait pas, hélas, dans la moyenne. Plein cadre et noir et blanc d'origine, le transfert vidéo manque de détails et ne propose pas un contraste exceptionnel. Mais, le plus gênant, c'est surtout le tramage extrêmement visible lors des déplacements latéraux d'objets, personnages ou n'importe quoi. Ce souci, bizarrement, n'affecte pas du tout le gros supplément vidéo de cette édition. Toutefois, le niveau de détail dégringole un peu plus sur un épisode de la série télévisée TALES OF TOMORROW. Durant un peu plus de vingt minutes, on suit une adaptation d'une nouvelle de H.G. Wells. Un scientifique, interprété par Thomas Mitchell, se voit confié un œuf de cristal au travers duquel il est persuadé de percevoir la surface de Mars. Une histoire martienne qui reste, comme RED PLANET MARS, ancré sur notre bonne planète Terre. De fait, l'ajout est donc plutôt pertinent et, lui aussi, intégralement sous-titré en français ! Les autres suppléments se limitent à des filmographies et à une fiche technique. Enfin, comme d'habitude, chez l'éditeur, le disque est placé dans un digipack coloré plutôt soigné et qui tranche avec les designs sans saveurs que l'on connaît en France sur les films anciens. Un bon point qui aura un peu de mal à faire avaler l'image pas vraiment à la hauteur d'un film à découvrir pour ses bons et mauvais côtés !