En quelques années, le congrès américain s'est octroyé les pleins pouvoirs et a réussi à instaurer une véritable dictature. Bien sûr, cela ne s'est pas fait sans heurt et l'Amérique a dû traverser deux guerres civiles ravageuses. Résistante lors de la seconde guerre, Barbara Kopetski (surnommée «Barb Wire») a aujourd'hui, en 2017, opté pour une neutralité qui lui permet de tenir un bar en plein cœur de Steel Harbor, dernière ville libre des Etats-Unis… Malheureusement, son passé ne va pas tarder à la rattraper et bien vite, elle va devoir combattre à nouveau aux côtés de la rébellion.
Barb Wire (signifiant «fil barbelé») voit le jour en 1994 sous la forme d'un Comics créé par une équipe de cinq auteurs/artistes répondant au nom de CGW (Comics' Greatest World). De cette équipe, nous retiendrons essentiellement le nom de Chris Warner qui, en plus d'être à l'origine du projet Barb Wire, oeuvrera en 1998 comme encreur et scénariste sur les quatre volumes de la mini-série «Barb Wire : Ace Of Spades». La série dite «classique» s'étendra pour sa part sur deux années seulement (1994 et 1995) et ne comportera que neuf petits volumes compilés par la suite dans un pavé intitulé «Barb Wire : Omnibus»… Le succès du personnage sera donc très éphémère mais il tombe en réalité à point nommé. C'est en effet la maison d'édition Dark Horse Comics qui se charge de la parution des aventures de la blonde expéditive. Or, la société connaît un vif succès depuis 1988 avec la saga «Alien» dont elle possède les droits d'adaptation sur papier. Elle fera de même quelques années plus tard avec «Predator» et publiera en 1992 le premier Comics «Alien versus Predator». Ces deux juteuses licences permettront à la firme de créer en 1992 une branche cinéma nommée «Dark Horse Entertainment». Dés lors les films s'enchaînent et c'est ainsi qu'arrivent sur nos écrans le DR. RICTUS, THE MASK, TIMECOP et, en 1996, le BARB WIRE dont il est question ici.
Le Comics d'origine reposait essentiellement sur une chose : Son personnage principal. Blonde, plantureuse, vêtue de cuir, dotée d'un caractère volcanique semblable à celui de TANK GIRL et de méthodes aussi expéditives que celle d'un JUDGE DREDD, Barb Wire se devait d'exploser à l'écran. La production s'orientera alors vers l'actrice Pamela Anderson Lee, blondinette bien connue pour avoir couru au ralenti durant des années sur les plages d'ALERTE A MALIBU. Mais il serait dommage de réduire sa carrière à ce seul «tremplin» puisque la miss avait déjà à son actif en 1992 une bonne poignée d'apparitions dans différentes séries télévisées. En 1993, elle se dénude pour les besoins du long métrage SNAPDRAGON et conserve cette même tenue d'Eve pour STRIP GIRL en 1994 et NAKED SOULS en 1995. Ses «vidéos de vacances», la taille très variable de sa poitrine synthétique et ses nombreux déboires sentimentaux prennent le relais, alimentent le mythe et font d'elle l'une des icônes des années 90…
Malgré son jeu d'actrice très limité, la Dark Horse fait sans aucun doute à cette époque un excellent choix en lui confiant le rôle titre de BARB WIRE. Pour Pamela Anderson Lee, le film est l'occasion d'une première incursion significative sur grand écran. Consciente que cette chance ne se renouvellera peut être pas, l'ex-Playmate n'hésitera pas à donner de sa personne en enchaînant des journées de 18 heures et ce dans des conditions particulièrement difficiles. On lui demandera ainsi de courir, bondir et se trémousser dans d'improbables tenues de cuir si moulantes que son tour de taille sera, lors du port du corset, réduit à 43 malheureux centimètres ! De telles «prouesses» ne seront bien évidemment pas sans conséquence et l'actrice aura à souffrir d'une fausse-couche durant le tournage et des complications lors de la phase de post-production… Reste que le résultat de tant d'efforts est là : Bien que les dialogues soient débités sans talent, Pamela Anderson EST Barb Wire. Sexy jusqu'à la vulgarité, aussi sauvage qu'une panthère et plus teigneuse qu'un pou, l'héroïne prend vie de la manière la plus fidèle qui soit. Évoquant la Brigitte Bardot qui n'avait, dans les années 60, besoin de personne en Harley Davidson, la seule photographie de Pamela Anderson Lee chevauchant un monstre mécanique (une Triumph 900 T-Bird) suffit à créer l'attente…
Arrivant très tôt dans la genèse du film, le choix de l'actrice ne sera pas cependant sans conséquences. En effet, la blonde incendiaire a des engagements et doit annuellement ré-enfiler son maillot de bain rouge afin de donner la réplique à David Hasselhoff. La production de BARB WIRE se voit donc contrainte de réduire ses délais et de se ré-organiser en dépit du bon sens… Les scènes d'action par exemple sont réfléchies bien en amont, avant même qu'un début de scénario n'ait été rédigé. En fait, c'est même sur la seule description de ces séquences que Pamela Anderson Lee a signé son contrat ! La pré-production débute donc d'un mauvais pied et bien vite, la scénariste alors débutante Ilene Chaiken est contactée pour rédiger dans l'urgence un script qui tienne la route. Particulièrement inspirée, celle-ci va calquer son histoire sur celle de l'un des classiques de la Warner : CASABLANCA. Ledit métrage avait cependant de nombreux défauts dont ceux de proposer un développement des personnages (via un flashback parisien) et même des dialogues ! A quoi cela pouvait-il bien servir ? A rien bien évidemment… Qu'à cela ne tienne : Ilene Chaiken va donc s'associer à Chuck Pfarrer (NAVY SEALS, CHASSE A L'HOMME, etc...) pour remplacer ces séquences laborieuses par quelques phrases hygiéniquement douteuses («Je vous arracherai le coeur par l'anus et vous le remettrai en place par la gorge») et les fameuses séquences d'action qu'il faut bien caser quelque part !
Reste qu'outre ces quelques modifications destinées bien évidemment à valoriser le film (!?), BARB WIRE n'est autre qu'une ré-adaptation éhontée mais par ailleurs très fidèle du chef d'œuvre de Michael Curtiz. Chaque personnage de CASABLANCA trouvera ainsi écho dans le script de Ilene Chaiken… Barb Wire est la décalque pulpeuse de Rick Blaine (incarné à l'époque par Humphrey Bogart), farouche résistant durant la seconde mondiale et tenancier d'un bar à la mode. Ingrid Bergman, qui incarnait à l'origine Ilsa Lund, se voit pour sa part supplantée par le très imposant Temuera Morrison (L'AME DES GUERRIERS) et Jack Noseworthy prend la place jadis tenue par Peter Lorre. Citons encore Xander Berkeley qui occupe dans BARB WIRE le rôle du flic collabo tenu par Claude Rains dans CASABLANCA et Steve Railsback qui prend la relève de Conrad Veidt dans la peau du fasciste tout de cuir vêtu… L'imaginaire seconde guerre civile américaine prend par ailleurs le relais de la seconde guerre mondiale et les nazis sont ici remplacés par des soldats du congrès américain aux tenues particulièrement évocatrices.
La liste des emprunts (le visa qui devient ici des lentilles de contact, le bar tenu par le héros, le final dans le hangars, etc...) étant encore bien longue et son exhaustivité ne présentant, à dire vrai, que peu d'intérêt, évoquons maintenant le cas du réalisateur Adam Rifkin. Rapidement toutefois puisque celui qui fût le metteur en scène de A TOUTE ALLURE et PSYCHO COP 2 prendra la porte après une semaine seulement de tournage ! La raison de ce départ précipité sera bien évidemment l'habituel «différent artistique» qui oppose la vision sombre du bonhomme avec celle, plus décontractée, que souhaitent les producteurs… David Hogan, réalisateur de quelques clips pour Sheryl Crow («Leaving Las Vegas», «All I wanna do»…) et responsable des séquences mouvementées de ALIEN 3 et BATMAN FOREVER, est alors approché dans l'urgence par le producteur exécutif Brad Wyman. L'amitié fait parfois faire des choses stupides et Hogan prend donc le relais de Rifkin au pied levé. Les quelques séquences déjà tournées (l'arrivée du «Parrain» Big Fatso en bulldozer) ne conviennent pas au nouveau réalisateur qui va donc tout reprendre depuis le début et, bien évidemment, dans la précipitation. Un nouveau départ est donc donné et le nouveau «maître des lieux» entend bien capitaliser au maximum sur le charme de son actrice principale. Force est de reconnaître que l'homme y parvient sans mal et se montre même particulièrement habile…
L'abondance, la redondance et la longueur des séquences dédiées aux courbes de la demoiselle ont cependant un effet pervers et inattendu : L'ennui. La danse d'introduction, dévoilant Pamela Anderson en train de réaliser un striptease soft de plus de cinq minutes, en est d'ailleurs le parfait exemple. De nombreux changements de tenues prendront le relais en cours de métrage, détournant volontairement mais aussi malheureusement l'attention du spectateur. A trop vouloir exhiber la plastique de Barb Wire, David Hogan en oublie manifestement de développer ses personnages. Ainsi, bien que les intervenants de la bande dessinée d'origine répondent tous ici présent, ceux-ci souffrent d'une sous-exploitation très notable et surtout très regrettable. Udo Kier n'est dès lors plus bon qu'à passer le balai en sifflant «Lili Marlène» ou à servir des verres, «rôle» qu'il tenait déjà dans JOHNNY MNEMONIC un an plus tôt… De même, Jack Noseworthy, incarnant le frère de Barb Wire, n'est ici qu'un pauvre alcoolique, source de nombreux problèmes pour l'héroïne.
Mais outre son manque de profondeur manifeste, l'un des principaux soucis de BARB WIRE est bien évidemment son aspect terriblement fauché. Réalisé avec 14 millions de dollars au lieu des 20 initialement prévus, le film semble par instants n'en avoir coûté que la moitié ! Outre le bar de l'héroïne (le «Hammerhead Bar»), les différents décors ne sont autres que les ruelles et entrepôts de Long Beach (en Californie), ville portuaire ayant servi de lieu au tournage. Les aménagements sont pour ainsi dire inexistants et bien qu'il soit supposé se dérouler en 2017, le film de David Hogan possède un «cachet» tristement contemporain. Si l'aspect «cyberpunk» du matériau d'origine est bien présent, constatons qu'il demeure léger et très simplement retranscrit via quelques maquillages et gadgets sophistiqués. Rien de bien réjouissant donc, surtout après un JOHNNY MNEMONIC qui, doté d'un budget certes plus confortable (26 millions de dollars), s'avérait pour sa part très convaincant…
BARB WIRE a donc tout du bien triste gâchis. Particulièrement fidèle à l'esprit du comics, porté par une actrice principale faite pour le rôle et nourri d'intentions louables, le film n'en est pas moins une déception aux allures d'oeuvrette réalisée sans le sou. Bien que le résultat ne soit pas dramatique et puisse se ranger aux côtés de TANK GIRL et autre CHERRY 2000, il demeure donc très en deçà des attentes et détruit malheureusement le fort potentiel du comic-book de Chris Warner. En plus de cela, il réduira à néant le travail acharné de Pamela Anderson Lee (impliquée jusque dans la bande originale aux côtés de son mari le batteur Tommy Lee), la contraignant dès lors à retrouver le petit écran et ses abominables prestations de godiche pulpeuse…
Sorti tout d'abord sous la bannière Polygram, le DVD est ressorti par la suite chez Universal sans pour autant se voir modifié d'une quelconque façon. Le DVD Zone 1 chroniqué ici est donc disponible depuis quelques années déjà. Reste qu'il était bon d'en parler puisqu'il comporte quelques singulières spécificités. Tout d'abord, comme beaucoup de disques américains, il propose de découvrir le métrage via deux cadrages différents : le 1.33, destiné à la télévision, et le 1.77, très proche du ratio cinéma d'origine. Dans le premier, nous aurons bien évidemment un encodage en 4/3 alors que dans le second, nous pourrons profiter d'un 16/9ème de qualité. Dans les deux cas, les couleurs sont chaudes, les contrastes puissants et la définition très correcte. Les défauts de pellicule sont inexistants et les soucis numériques savent se faire très discrets. Nous n'avons en réalité rien de plus à reprocher qu'un léger manque de profondeur dans les noirs...
Sur le plan sonore, le disque nous propose la version originale anglaise en stéréo surround ou en Dolby Digital 5.1. Le doublage français est lui aussi présent mais uniquement via un encodage sur deux canaux. Les deux options stéréo surround sont d'une qualité indiscutable et font bien évidemment la part belle à l'action, sans pour autant empiéter sur les dialogues. L'ensemble est clair, nerveux et plutôt riche en basses. Le mixage anglais sur six canaux s'avère fort heureusement meilleur mais il n'apporte en réalité pas grand chose. La spatialisation n'a rien de transcendante et seules les séquences d'action ou celles se situant dans le nightclub profitent d'un réel gain d'ampleur. Reste qu'il s'agit, dans la mesure du possible, de la piste à privilégier. Les non-anglophones seront toutefois gravement pénalisés par l'absence totale de sous-titres sur le disque. Notons donc que le DVD zone 2 palie le problème et offre même un remixage Dolby Digital 5.1 du doublage français...
Lors de sa sortie dans les salles obscures, le film avait été purgé de quelques séquences dénudées qui auraient pu, à l'époque, engendrer un classement plus sévère. L'édition DVD les ré-inclus au montage pour nous proposer donc la version «Uncut» d'une durée de 100 minutes et 16 secondes. Avec le recul, il est assez amusant de constater que ce sont les mamelons féminins qui posaient problème ! En effet, la première coupe (la plus longue avec plus de deux minutes) intervenait dès l'introduction et le fameux striptease de Barb Wire. Si l'on voyait clairement Pamela Anderson Lee ouvrir son bustier et pétrir ses étonnantes miches de plastique, aucun téton n'avait en revanche l'audace de s'exhiber à l'écran. L'affront est désormais réparé ! Bien que ce fût sans aucun doute à l'époque une déception de taille pour les mammophiles de tous poils, cette coupe n'était en réalité qu'un mal pour un bien tant la scène complète s'avère longue et laborieuse… Les deux autres micro-scènes coupées n'excèdent pas la seconde et se trouvent lors de la première entrée dans le bar de Miss Wire. Dans les deux cas, des demoiselles se trémoussaient lascivement en ayant omis de porter Tee-shirt et soutiens-gorge... Là encore, le DVD réintègre les images et nous permet de profiter pleinement d'une collaboration réussie entre Dame Nature et le chirurgien local.
Vous pensiez chaque bout de sein siliconé désormais imprimé sur votre sensible rétine ? Grave erreur car le DVD propose en sus un bonus des plus indispensables : L'intégralité (vraiment intégrale cette fois !) des plans réalisés pour la séquence du striptease de la poupée peroxydée. Autant dire que cet étrange supplément ne s'adresse qu'aux fans, ceux qui ne jurent que par Pam, ses pare-buffles improbables et son déhanché proche de la dislocation… Ceux-là pourront donc profiter de neuf minutes et vingt-sept secondes d'une vulgarité crue et sans détour. Du bien bel ouvrage, pas soporifique pour deux sous…
Outre cela, le disque nous propose la bande annonce d'origine (ici au format 1.33) excédant de peu la minute et faisant la part belle à l'action. Il nous sera par ailleurs possible de voir et revoir encore Pamela sous tous les angles via une vingtaine de photographies de tournages. Nous finirons le tour de cette édition américaine avec les cinq filmographies qu'il propose sous forme de pages fixes à faire défiler...