Tout semble paisible au royaume des Dieux. Zeus, satisfait du travail effectué par son fils, coule aujourd'hui des jours heureux… Bien entendu, cela ne dure pas et quatre Divinités lui volent ses sept éclairs magiques, rompant ainsi l'équilibre de l'univers. Blessé par une telle félonie, Zeus décide d'avoir recours une nouvelle fois à Hercule pour retrouver les précieuses reliques, rétablir l'ordre et repousser le mal. Parallèlement à cela, Urania et Glaucia partent à la recherche d'un héros capable de stopper le sacrifice des vierges malheureusement très à la mode ces derniers temps. Leur chemin croisera bien entendu celui du musculeux Hercule qui se fera une joie de terrasser les tueurs de pucelles et autres gredins ou assimilés. Comble du hasard, chacun de ces odieux individus libérera, une fois éliminé, l'un des fameux éclairs…
C'est en 1983 que HERCULE, incarné par le monstrueux culturiste Lou Ferrigno, arrive sur les écrans. Ecrit et dirigé par un Luigi Cozzi obnubilé par la science-fiction, le film étonne et s'avère être un incroyable patchwork d'influences dissonantes… Qu'importe car la Cannon, productrice de l'oeuvrette, est satisfaite dès les premiers rushes et décide aussitôt de remettre le couvert avec un nouveau film d'aventure réunissant le duo Ferrigno/Cozzi. Ce sera SINBAD, du moins en théorie. Car en pratique et bien que Cozzi ait déjà rédigé un script, la Cannon peine à trouver des investisseurs… Reste qu'en attendant, cette même Cannon a dans ses cartons un incroyable navet, un film infâme qu'elle n'ose montrer à personne. Ce film, c'est bien entendu LES 7 GLADIATEURS réalisé par l'infernal tandem que forment Bruno Mattei et Claudio Fragasso. En attendant donc que le projet SINBAD se débloque, la société de production de Golan et Globus demande à Cozzi de voir ce qu'il peut faire pour sauver LES 7 GLADIATEURS. L'idée est alors de demander à Lou Ferrigno de tourner durant deux semaines quelques séquences supplémentaires et alternatives. Cozzi pourra ainsi remplacer quarante minutes d'abjections par quarante nouvelles minutes fraîchement tournées et peut être, enfin, rendre le film acceptable. Cozzi charcute donc le métrage d'origine et n'en conserve que la moitié. L'autre moitié, il la tourne avec un Lou Ferrigno de retour pour l'occasion…
Mais alors que le projet semble prendre une forme définitive, la Cannon change son fusil d'épaule et suggère de profiter de Ferrigno deux semaines de plus pour ainsi avoir un métrage complet ! La totalité des images de LES 7 GLADIATEURS passe donc à la trappe et il en sera de même pour la trame réécrite par Cozzi. Malheureusement, les délais accordés restent insuffisants pour réaliser un film complet et Lou Ferrigno ne sera pas payé puisqu'il n'était supposé tourner que des séquences additionnelles ! Le culturiste tire donc sa révérence pour rejoindre le navire de SINBAD qui vient d'échouer entres les mains de Enzo G. Castellari. Luigi Cozzi a donc en sa possession une série de scènes n'ayant pas de véritable lien entres elles et surtout, il n'a pas de fin pour son film ! L'homme devra donc réaliser un incroyable travail de montage et user de tout son système «D» pour donner naissance au film LES AVENTURES D'HERCULE. Plus qu'une suite, ce nouvel opus des péripéties de Hercule est donc un magnifique exemple de ce que l'industrie du cinéma peut être amenée à produire pour rentrer dans ses frais… Nous noterons toutefois que cette regrettable expérience sonnera le glas de la branche Italienne de la Cannon judicieusement nommée «Cannon Italia Srl».
Le générique d'introduction l'annonce clairement : Malgré les nombreux problèmes liés à la genèse du film, Luigi Cozzi persiste à nourrir son œuvre d'influences futuristes et/ou décalées. SUPERMAN II n'est donc pas étranger à la forme qu'empruntent les cinq premières minutes du métrage. Images spatiales, noms inscrits en solides caractères bleus et séquences de l'opus précédent s'entremêlent sur fond de musique pseudo-orchestrale. S'en suit un étrange ballet de planètes, toutes parfaitement sphériques et colorées, sur lequel une voix-off nous expose les premiers faits. Les tracas de Zeus cohabitent difficilement avec ceux des pucelles en voie d'extinction et très vite, la perplexité cède la place à l'ennui profond. Mais où est Hercule ? Il n'est pas là… Il brille par son absence à tel point que les différents protagonistes eux-mêmes se posent moult questions. Seul Zeus, bien entendu, détient la réponse et se décide enfin, après près de dix-huit minutes de métrage, à faire apparaître notre héros. En voilà un qui se sera fait désirer… Débarqué d'on ne sait où, Hercule chevauche donc fièrement sa magnifique monture lorsqu'un monstre aux allures de serpillière l'agresse sans sommation. L'issue du combat ne se fait pas attendre et bien vite, notre héros peut reprendre sa route vers l'inconnu. Lorsque subitement, un nouveau monstre décide de se mesurer au fils de Zeus… Inutile d'aller plus loin. Nous sommes là en présence d'une structure narrative très particulière consistant à faire se succéder des altercations sans queue ni tête dont l'issue est systématiquement la même : Hercule obtient un nouvel éclair qui ravira son divin paternel. Bien entendu très handicapé par son tournage plus que chaotique, LES AVENTURES DE HERCULE ne possède en réalité pas de véritable trame scénaristique. Aussi, le génial Cozzi construit son film comme une série de séquences sans lien, une suite de mini-aventures ou micro-altercations sans but d'une durée allant de cinq à dix minutes chacune… Les vierges et les éclairs de Zeus viennent bien entendu cimenter le tout et donner un semblant de cohérence à l'ensemble mais le spectateur n'est pas dupe. Nombreuses sont les séquences «bouche-trous» durant lesquels Urania devra aller seule consulter de petits êtres pour connaître la marche à suivre. Nombreux aussi sont les mêmes plans de Lou Ferrigno que nous reverrons une, puis deux et parfois même trois fois en l'espace d'une demi-heure... La faible présence sur le plateau de l'acteur principal se fait sévèrement sentir et l'absence de scénario est un fait établi. Cozzi rallonge artificiellement bon nombre de scènes et multiplie les dialogues entre les deux sœurs. Les Dieux eux aussi dissertent de longues minutes afin de tenter de nous distraire mais rien n'y fait. Ce deuxième volet des péripéties de Hercule sonne creux et barbe son public…
C'est du moins le triste constat auxquels nous mèneront les deux premiers tiers du métrage. Bien que les ennemis soient nombreux et variés, ils ne présentent en réalité que peu d'intérêt. Qu'ils soient «hommes-boue», «hommes de lumière», collectionneurs d'âmes ou amazones, tous meurent sottement en l'espace de quelques secondes. Sortent toutefois du lot une Gorgone plutôt laide animée dans une Stop Motion de qualité et le fameux monstre dévoreur de vierges. Ce dernier offre en effet la particularité d'être le sosie parfait de la créature du film PLANETE INTERDITE ! Luigi Cozzi frappe encore et, en plus du film de Fred McLeod Wilcox, rend «hommage» à la célèbre saga de George Lucas. Les transitions si particulières de l'épopée STAR WARS sont ici utilisées à outrance et le combat final contre Minos, devenu grand adepte des rayons lasers, rappelle étrangement l'altercation ultime du RETOUR DU JEDI…
Cet étonnant combat entre chevaliers Jedi cède cependant bien vite la place à l'incroyable, à une chose à laquelle le spectateur n'était bien évidement pas préparé et qui le sortira fort brutalement de sa torpeur. Définitivement privé de son culturiste Herculéen, Cozzi décide tout simplement de poursuivre le duel spatial sous la forme d'un dessin animé expérimental d'une incroyable laideur ! Mais le plus fou reste à venir car, libérés de leur enveloppe physique, nos combattants peuvent maintenant épouser différentes formes. C'est ainsi que Minos opte pour une apparence de tyrannosaure puis de serpent géant et que Hercule, pour sa part, devient un gorille ! Alors que personne ne s'y attendait, Cozzi nous livre donc mine de rien une version très schématiquement dessinée des différents combats vus dans les KING KONG de 1933 et 1976.
LES AVENTURES D'HERCULE est donc un film qui, grâce à sa genèse extraordinaire et son réalisateur illuminé, peut sans aucun mal être cité au chapitre des films les plus fous et bordéliques de l'histoire du cinéma italien (pourtant très riche dans ces domaines). Mêlant encore une fois des genres antagoniques, associant ennui profond et démence graphique, aspergeant le tout de performances d'acteurs exécrables et usant d'artifices aussi visibles qu'un muscle pectoral au milieu d'un Lou Ferrigno, le film de Cozzi atteint les limites de l'acceptable, puis les dépasse sans hésitation. Bien que truffée d'idées et de trouvailles visuelles (rémanence, transparence, superposition d'image, etc...), cette suite au périple herculéen terrifie mais aussi, grâce à son incroyable nullité, fascine. Un film atypique donc, qui ne doit en aucun cas être goûté sans une préparation psychologique et un échauffement des sens digne de ce nom.
L'amateur de curiosités sur pellicule n'aura pas à débourser grand-chose pour découvrir LES AVENTURES D'HERCULE. En effet, le métrage se trouve au verso du disque américain proposant le premier opus sobrement nommé HERCULE. Deux films sur une même galette donc, disponible de surcroît pour une poignée d'euros chez nos voisins d'outre atlantique.
Tout comme le premier film, déjà chroniqué sur le site, LES AVENTURES D'HERCULE dispose d'un transfert au format 1.85 encodé en 16/9ème. La restitution est d'honnête facture malgré un grain assez présent. Les couleurs sont belles et la compression numérique ne se fait sentir que lors du long générique, étrangement moins maitrisé que le reste du métrage. Nous noterons cependant un rendu très variable d'une scène à l'autre et des teintes passant régulièrement du terne au lumineux lors des changements de plan. Ceci n'est bien entendu pas imputable au disque en lui-même mais plutôt à l'historique chaotique du métrage. Les éclairages varient donc, les couleurs changent et l'ensemble s'assombrit par instant, nous faisant partager l'aspect «bricolé» de ce que Cozzi lui-même appelle un inextricable puzzle…
Comme c'est le cas pour HERCULE, ce second volet nous est proposé en version originale anglaise avec sous-titrage français, anglais ou espagnol. L'interprète principal est toujours doublé mais pour une fois, cela sert le travail du réalisateur qui peut ainsi faire parler la doublure de Lou Ferrigno lorsque l'acteur n'est plus à l'écran ! Un subterfuge de plus pour palier l'absence de la star musculeuse… La piste anglaise, encodée en stéréo, est par ailleurs très claire et ne souffre d'aucun défaut notable, s'il on excepte bien entendu le fait qu'elle ne délivre que d'imbéciles et ennuyeux dialogues...
Au chapitre des bonus, c'est encore une fois le grand vide et nous devrons donc nous contenter d'un chapitrage et d'une bande annonce en version originale non sous-titrée.