La boite de Pandore est détruite et le Mal qu'elle contenait va se répandre sur Terre… Zeus, domicilié sur la Lune avec les autres divinités, décide d'intervenir et d'équilibrer les forces du Bien et du Mal. Pour cela, il crée Hercule en donnant à un bébé orphelin une intelligence et une puissance sans limite. L'enfant sera recueilli et élevé par un couple modeste, honnête et aimant. Devenu adulte, Hercule est maintenant la cible des Dieux. Un ours divin tue tout d'abord son père adoptif puis c'est au tour d'un robot géant aux allures de mite d'éliminer sa douce maman. La rage est grande mais Hercule, à nouveau sans famille, n'en a pas fini avec les caprices des Dieux et devra affronter mille dangers.
Au début des années 80, la mode est à nouveau aux jupettes et aux sandales. Des Etats-Unis et d'Angleterre déboulent alors de fiers héros prêts à affronter démons, sorcières et dragons dans CONAN LE BARBARE, LE DRAGON DU LAC DE FEU, EXCALIBUR, VOLTAN LE BARBARE et consort. L'Italie, friande de concepts porteurs et rentables, se jette alors dans la brèche ouverte et c'est en 1982 que Franco Prosperi nous offre un GUNAN IL GUERRIERO aux inspirations évidentes. La même année, Bruno Mattei est en grande forme puisqu'il nous livre pas moins de deux films dans lesquels des héros en tunique n'hésitent pas, justement, à tomber leurs vêtements. CALIGULA ET MESSALINE (qu'il produit) et LES AVENTURES SEXUELLES DE NERON ET POPPEE (qu'il réalise) nous narrent donc les expériences sexuelles d'antiques (anti-)héros en sandalettes. Sur la même lancée, Mattei co-réalise avec son complice Claudio Fragasso une variante en jupette du chef d'œuvre de Kurosawa avec LES 7 GLADIATEURS pour le compte de la Cannon. Le projet fleure bon le navet mais Lou Ferrigno, héros de la chose, se sent l'étoffe d'une future star. Sacré «Monsieur Univers» à plusieurs reprises et paradant de nombreuses années dans le Livre Guinness des records (livre le plus vendu au monde après la Bible et le Coran) pour son tour de poitrine hors norme, le culturiste aspire à un succès similaire à celui que vient de rencontrer Arnold Schwarzenegger dans CONAN LE BARBARE. Pour cela, il met provisoirement de côté le rôle de L'INCROYABLE HULK qui le rendit célèbre et propose au duo Golan et Globus (la firme Cannon) de devenir un Hercule à l'image des mythiques bodybuildés que furent par exemple Steve Reeves et Gordon Scott. La Cannon se dit intéressée et Bruno Mattei débute l'écriture d'un premier script. L'homme, fidèle à ses habitudes, imagine le fils de Zeus faire sauter le slip et s'adonner à d'étonnantes frasques érotiques sur fond de drapés rouges... La société de production rejette l'idée et les premiers rushes de LES 7 GLADIATEURS incitent tout simplement à oublier Mattei et Fragasso pour un Luigi Cozzi plus "conventionnel". Un bien grand mot toutefois puisque notre homme, chamboulé par SUPERMAN et LA GUERRE DES ETOILES, décide de faire de son Hercule un héros «à la SUPERMAN» évoluant dans un monde mêlant sans complexe la Grèce antique et les lasers futuristes. Nous pensions que CONTAMINATION et STARCRASH n'étaient que d'inoffensives et sympathiques oeuvrettes mais force est de constater qu'elles ont sans doute marqué le réalisateur de manière bien plus indélébile que prévu…
Aux côtés de Lou Ferrigno, c'est tout une part du casting de LES 7 GLADIATEURS que nous allons retrouver dans HERCULE. Le culturiste Brad Harris, grand habitué des produits d'exploitation italiens de tous poils vient donc incarner un Augias qui, étrangement, ne roulera pas des mécaniques. Sybil Danning vient elle aussi apporter une contribution remarquée. Jamais avare de ses charmes, elle incarne ici une Ariadne, diabolique fille de Minos, au bustier sur le point d'exploser. Dans le même registre, nous citerons Ingrid Anderson donnant vie à une séduisante Cassiopée à la poitrine chastement cachée derrière deux coquilles saint-Jacques ainsi que la ténébreuse Mirella D'Angelo interprétant la sorcière Circé dans une tenue proche de celle des Claudettes. Un casting haut en couleurs donc, mis en valeur par d'étranges tenues semblant appartenir à une mouvance que nous qualifierons de «disco-érotico-dérangée».
S'il est évident que les accoutrements étonnent, ce n'est cependant rien en comparaison du reste... Passons bien entendu outre les nombreuses libertés prises avec le personnage de Hercule et la mythologie grecque en général pour nous attaquer directement à la folie visuelle qui touche le métrage. Grand amoureux de science fiction et d'épopées spatiales, Cozzi décide donc de moderniser son héros, ses aventures et bien entendu ses ennemis. Pour cela, il parsème sans honte son film d'innombrables impacts multicolores aux bruitages futuristes et de faisceaux lasers. Mieux encore, il remplace les monstres grecs qu'affectionnait tant Ray Harryhaussen par d'horribles créatures mécaniques qui raviront sans aucun doute les maniacolegossifs (amateurs de Lego) de tous poils. Le Minotaure devient ainsi un étrange cheval mécanique attaquant sur une plage alors que l'Hydre de Lerne perd nombre de ses têtes (elle devrait en avoir neuf mais n'en a que trois) et tire au laser rouge sur notre héros… Un véritable massacre, réalisé dans une Stop Motion (animation image par image) approximative et dont la vision ne peut que laisser perplexe.
Cozzi étoffe de plus son film d'influences diverses et variées que l'amateur dégottera sans grand mal. La description de l'univers en début de métrage dégage ainsi quelques effluves du SUPERMAN de Donner, la séquence de labourage rappelle étrangement celle des travaux forcés dans CONAN LE BARBARE, l'écartement des continents nous ramène tout droit au Neptune de JASON ET LES ARGONAUTES, le combat final prend des allures de STAR WARS du pauvre, etc... Malgré les nombreuses ponctions que fait donc le réalisateur chez la concurrence, rien ne tient debout dans ce HERCULE et l'ensemble a l'air plus de lorgner du côté de la parodie involontaire. Aux nombreuses fautes de goût vient donc s'ajouter le ridicule, voire l'inutilité de certaines situations. Comment justifier ainsi l'arrivée de Hercule dans le labyrinthe de Minos ? A quoi bon ce labyrinthe puisque notre héros n'y reste qu'une poignée de secondes ? Quel est ce voyage spatial au milieu des météorites que réalisent Hercule et Circé à bord du char de Prométhée tracté par un rocher ? Tant de questions qui, malheureusement, ne trouveront pas de réponse ici…
Le féru de mythologie sera aussi bien déçu de constater que les douze travaux sont expédiés à la vitesse grand «V» par un Luigi Cozzi décidément très pressé. Ainsi, alors que nul ne saurait dire comment et pourquoi Hercule est arrivé devant Augias, on apprend qu'«il vient d'accomplir toutes les épreuves sans difficultés» ! Voilà qui nous soulage d'une incroyable pression et nous permet d'enchaîner aussi sec sur quelques altercations sans aucune valeur… «Facilité» semble donc être le maître mot de l'entreprise et Cozzi, parti dans ses délires futuristes, ne semble plus obstiné que par sa vision alternative et ô combien géniale du mythe. Reconnaissons toutefois à la décharge du monsieur que les décors faits de papier mâché coloré ajoutent un charme naïf indéniable à l'ensemble. Il en va de même de certaines créatures comme par exemple ces étranges tentacules qui agressent notre héros encore enfant ou cet ours fait de moquette que Lou Ferrigno expédie sans mal dans l'espace…
HERCULE prend alors des allures de conte pour enfants, d'aventure décomplexée et débarrassée de toutes les subtilités qu'offre la mythologie grecque. Le jeu des acteurs, globalement consternant, ne fait qu'aggraver le constat et amplifier encore et toujours la candeur générale de l'entreprise. A cela s'ajouteront la bêtise des dialogues, la mollesse des actions ainsi que l'innocente niaiserie du héros, pourtant doté par son père de facultés surhumaines… Ce n'est donc qu'avec un œil enfantin et particulièrement tolérant que nous pourrons apprécier HERCULE pour ce qu'il est : Une incroyable mixtion des genres virant au délire «pop» franchement crétin. Une recette qui, si elle n'est pas véritablement indigeste, laisse un incroyable goût de gâchis et d'arnaque. Etrangement, malgré le constat qui est le notre aujourd'hui, la Cannon sera satisfaite par les premières images du film et mettra en chantier une suite ainsi qu'une aventure de Sinbad avec toujours Lou Ferrigno en vedette. De nombreuses restrictions budgétaires viendront rendre la genèse de ces films tout simplement incroyable mais, arrêtons là car tout cela est une autre histoire…
Ayant récupéré une majeure partie du catalogue de la défunte Cannon, la MGM édite donc quelques savoureux titres en DVD. Parmi ceux-ci, un double DVD contenant le HERCULE dont il est question ici et LES AVENTURES D'HERCULE, son incroyable suite faisant l'objet d'une autre chronique. Le disque américain double face nous propose donc de découvrir les deux collaborations entre Lou Ferrigno et Luigi Cozzi, et ce dans une qualité tout à fait honorable. HERCULE se voit donc doté d'un transfert 16/9ème proposant le film au ratio 1.85 d'origine. L'image est assez granuleuse et par instant légèrement floue mais ce sont essentiellement là des défauts liés au matériau d'origine. Il en va de même pour la colorimétrie variant d'un plan à l'autre. Ce ne sont là que de légers défauts qui n'empêchent en rien la découverte d'un métrage ne souffrant pas de réel problème d'encodage. Les couleurs pétantes voulues par Cozzi sont bel et bien présentes et restituent avec efficacité l'ambiance disco-kitsch du métrage.
Le disque propose de profiter du film via la piste anglaise encodée dans un stéréo plutôt propre et clair. Nous noterons que, comme ce fût très souvent le cas, la voix de Lou Ferrigno est doublée et que ce n'est donc pas l'acteur que nous entendons dans HERCULE. Il ne s'agit pas là d'une preuve de l'incompétence du bonhomme (comme nous le voyons trop souvent écrit) mais tout simplement d'une résultante de sa surdité précoce. Ferrigno est en effet malentendant à 80% depuis ses trois ans. De fait, sa diction est imparfaite et sa véritable voix n'est que très rarement utilisée dans ses films… A titre d'anecdote, nous ajouterons même qu'il fût doublé pour la série L'INCROYABLE HULK puisque les grognements étaient assurés par l'acteur Charles Napier… Reste que ce re-doublage, s'il est par moment très visible, ne se montre pas gênant le moins du monde.
Afin de rendre le métrage accessible au plus grand monde MGM a ajouté à son disque des sous-titres anglais, français et espagnol d'une qualité honnête. Nous noterons cependant que les noms des différentes divinités sont bien souvent écorchés… Plutôt avare en bonus, le disque Zone 1 ne propose que la bande annonce du film, d'une durée plutôt courte. Celle-ci est présentée en version originale sans le moindre sous-titre. Bien que la qualité ne soit pas optimale, nous sommes heureux de retrouver ce court condensé des instants les plus fous du métrage !