Après une éruption volcanique au Mexique, deux géologues se rendent sur place pour étudier le phénomène. Ils vont bien vite découvrir qu'une catastrophe en cache une autre car le bétail ainsi que des habitants de la région sont retrouvés morts. Mais ces décès ne sont nullement liés au volcan...
A l'origine, la production aurait bien aimé confier la mise en scène du film à Eugène Lourié. Cependant, ce ne sera pas le réalisateur du MONSTRE DES TEMPS PERDUS qui va finalement diriger les scorpions du film mais un autre cinéaste d'origine russe. Difficile de savoir si le fait d'avoir fait s'affronter John Wayne et une pieuvre de bonne taille dans LE REVEIL DE LA SORCIERE ROUGE aura joué en faveur de Edward Ludwig pour le poste de réalisateur. A l'évidence, le film essaie de suivre les traces laissées par les fourmis rencontrées dans DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE. L'histoire se déroule dans un environnement désertique et l'épilogue prend place dans un cadre urbain alors que le son des scorpions est repris directement du film de Gordon Douglas dont il s'inspire. Néanmoins, les effets spéciaux vont être réalisés grâce à de l'animation image par image en lieu et place de peu crédibles reproductions d'insectes en taille réelle. Grâce à ce type d'animation, les scorpions du film vont ainsi effectuer des mouvements moins hésitants.
Pour donner vie aux créatures du SCORPION NOIR, on engage Willis O'Brien. C'est-à-dire le légendaire spécialiste qui anima le premier KING KONG. Pour le seconder, il va choisir Pete Peterson avec qui il a travaillé sur MONSIEUR JOE. Les deux hommes vont alors se partager l'animation des scorpions mais aussi de toute la faune qui peuple LE SCORPION NOIR. Et c'est probablement la plus grande des qualités du film car les deux animateurs vont réussir à produire un résultat très honorable alors que la production connaît des soucis financiers. Certaines séquences d'effets seront d'ailleurs utilisées à plusieurs reprises dans le film, très probablement pour pallier la dépense générée par la création de plans spécifiques et on rencontrera aussi quelques trucages à base de transparence, bien moins réussis que l'animation. Si l'on trouve donc des scorpions géants dans le film, l'un des passages les plus spectaculaires nous emmène sous terre dans une caverne oubliée de tous où grouillent tout un tas de créatures fort peu sympathiques. Pour certaines d'entre elles, Willis O'Brien se servira d'ailleurs de quelques modèles utilisés une vingtaine d'années auparavant dans la fameuse scène des araignées de KING KONG. C'est d'autant plus intéressant que cet intermède dans une caverne où cohabitent de nombreux insectes renvoie directement à une séquence de KING KONG qui est, à présent, totalement perdue.
Sur sa durée, LE SCORPION NOIR ne lésine pas sur les rebondissements spectaculaires une fois que les créatures géantes sont révélées. Déraillement d'un train provoqué par les bestioles, affrontement dans un stade... Alors, bien sûr, LE SCORPION NOIR peine un peu à démarrer avant d'en arriver là mais apparaît aussi comme un métrage plus brut et plus vulgaire que DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE par exemple. Vulgaire dans le sens où le film n'hésite pas à jouer de la facilité pour terrifier son auditoire. Ainsi, les nombreux gros plans d'une tête de scorpion peuvent prêter à sourire, car la chose est peu crédible, mais sa représentation a du être saisissante pour l'auditoire de l'époque. La bestiole bavant plus que de mesure lui donnant des airs de prédateur dégoûtant vient ainsi renforcer les attaques parfois très brutales visuellement pour un film des années 50. A l'évidence, LE SCORPION NOIR a été mis en boîte avec la seule envie de produire un effet immédiat. Cette approche directe, on va la retrouver dans les ambitions du scénario. Ici, on ne viendra pas gêner le spectateur avec des arrière pensées menant à une réflexion sur les dangers du nucléaire, comme c'est le cas dans pas mal de films du genre.
L'action prime et l'animation fait son effet mais LE SCORPION NOIR affiche aussi quelques soucis dans le déroulement de son scénario fort convenu. Affublé d'un pote mexicain un peu contraint d'être le spectateur, notre gentil héros américain fait chavirer le coeur de la belle jeune femme du coin et finit même par avoir dans les pattes un gamin. Alors que le film démarre sur des images lui donnant un côté documentaire et sensationnaliste, le sujet sera bien vite désamorcé par le traitement bien trop classique de ses personnages. Les spectaculaires et violentes agressions des scorpions perdent finalement de leur méchanceté au contact des relations anodines que tissent les personnages face aux événements. Notons enfin que le titre, LE SCORPION NOIR, résume le film à une seule bestiole alors que les scorpions sont, dès le début, plusieurs à commettre leurs méfaits.
LE SCORPION NOIR, est disponible en DVD, chez Warner et aux Etats-Unis, sous son titre original : THE BLACK SCORPION. L'éditeur a fait le choix de proposer le film en plein cadre alors qu'il était prévu, à l'origine, pour une diffusion dans les salles au format 1.85. Le transfert proposé ici ne fait que révéler plus d'images en haut et en bas. La mention «Standard version presented in a format preserving the aspect ratio of its original theatrical exhibition» au dos du DVD est donc quelque peu mensongère même s'il est probable que certains cinémas américains ont dû effectivement projeter le film de cette façon. Néanmoins, les scènes d'animation ne souffrent pas de ce changement de cadrage et, au contraire, s'exposent bien mieux ainsi. L'image est, en tout cas, très satisfaisante avec une définition très correcte et une belle retranscription du noir et blanc. Quelques petits défauts de pellicule apparaissent ici ou là sans que cela ne gêne aucunement la vision.
La piste anglaise en mono d'origine est, comme souvent chez Warner, encodée sur un seul canal. Aucun défaut ne vient entacher la sonorisation du film, même si elle montre les limites de son mixage original. La version originale est épaulée par des sous-titrages en anglais, espagnol et français. Toutefois, les sous-titres se borneront au film car les suppléments en sont complètement dépourvus !
«Stop Motion Masters» est une petite intervention de Ray Harryhausen qui raconte sa rencontre avec Willis O'Brien et leur première collaboration. Le titre ronflant de cette petite vidéo risque de décevoir puisque au bout de trois petites minutes, c'est terminé et, finalement, on ne nous dressera pas un bilan complet de la carrière du célèbre animateur pour ce qui n'est, après tout, qu'un petit hommage de Ray Harryhausen à son mentor. Plus passionnant, on trouve une introduction de Ray Harryhausen à la séquence préhistorique de THE ANIMAL WORLD. Ce passage du documentaire de Irwin Allen a été réalisé par Willis O'Brien et Ray Harryhausen avant le tournage du SCORPION NOIR. Après la petite introduction, on découvre donc l'intégralité de cette séquence où l'on peut voir évoluer divers dinosaures. Enfin, il est aussi possible de découvrir deux séquences d'animation personnelles de Pete Peterson dont l'une, au moins, a été réalisée par le technicien dans les décors utilisés pour LE SCORPION NOIR. Ces séquences d'animation sont constellées de défauts de pellicule mais il s'agit d'images rares.
Pour terminer cette édition DVD, Warner propose une petite sélection de bandes-annonces avec celle du SCORPION NOIR mais aussi celles de LA VALLEE DE GWANGI, LE MONSTRE DES TEMPS PERDUS et LE CHOC DES TITANS. La bande-annonce du SCORPION NOIR utilise, au passage, quelques extraits du MONSTRE DES TEMPS PERDUS et DES MONSTRES ATTAQUENT LA VILLE pour relier les succès précédents du studio dans le genre monstres géants avec leur dernière production.