Heureux sont les quatre braqueurs qui viennent de dérober plusieurs millions de dollars à un casino ! Une vie confortable s'offre maintenant à eux mais pour l'instant, il leur faut fuir. Là encore, ils ont tout prévu et un hélicoptère les emmène bien vite au large. C'est alors qu'ils se retrouvent pris dans une tempête qui les force à atterrir précipitamment sur une île en apparence paisible et abandonnée. Bien vite, les quatre individus vont déchanter. Le coin de terre perdu sur lequel ils ont échoué est en réalité peuplé de dragons komodos, d'horribles prédateurs modifiés génétiquement par le savant fou local. Et justement, ce dernier prend conscience que le fruit de ses expériences est en train de lui échapper…
En 1999, le dragon de komodo est à l'honneur avec un long métrage sobrement nommé KOMODO. Michael Lantieri, spécialiste des effets spéciaux (A L'AUBE DU 6EME JOUR, HULK, MONSTER HOUSE, etc.), signe avec ce film sa première et, pour le moment, unique réalisation. L'homme nous livre donc un métrage qui, s'il ne brille ni par son scénario, ni par son rythme, s'avère assez respectueux du spectateur. KOMODO dispose ainsi d'une photo soignée et d'une petite coterie de bestioles plutôt sympathiques. Fort de son expérience sur la trilogie JURASSIC PARK, LA FAMILLE PIERRAFEU et CONGO, Lantieri s'assure par ailleurs que ses créatures vedettes offriront un minimum de crédibilité à l'écran, ce qui, reconnaissons le, sera le cas…
Cinq années plus tard, les amateurs de reptiles de synthèse ont pu en voir de toutes les couleurs avec notamment une pleine brouettée de direct-to-video aux budgets initiaux ridicules et aux résultats bien souvent en rapport… KING COBRA œuvrait donc dans ce sens en 1999 alors que PYTHON donnait, l'année suivante, bien du mal aux acteurs Robert Englund et Casper Van Dien. En 2000 toujours, BOA (connu aussi sous le titre NEW ALCATRAZ) nous offre sa variante à sang froid avant de virer au rouge dans un cross-over (BOA VS. PYTHON, 2004) pénible pour les yeux. L'année 2004 verra quant à elle l'arrivée du sympathique DINOCROC mais aussi du film qui nous intéresse à présent…
Pour cette séquelle au budget minuscule, Lantieri cédera la place à l'un des enfants terribles de l'industrie Corman : Jim Wynorski (oeuvrant sous couvert d'un pseudonyme, Jay Andrews). Malgré une carrière plutôt dense (près de 70 réalisations dont 27 pour Roger Corman), le bonhomme n'est jamais parvenu à enfanter un long métrage que l'on puisse qualifier de «bon». Wynorski se contente donc du médiocre ou du juste tolérable avec une remarquable constance et ce depuis plus vingt ans. Reste qu'il s'agit là d'un réalisateur filou qui, pour une maigre poignée de dollars, vous refilera un film vite emballé, bourré de stock-shots, de coups de feu et d'actrices aux formes généreuses. Un homme par conséquent très rentable…
Fidèle à ses habitudes, Wynorski applique avec L'ILE DES KOMODOS sa fameuse recette et renouera donc avec la comédienne Melissa Brasselle pour la seizième fois en moins de dix ans. Les performances dramatiques de la demoiselle ne sont évidemment pas le ciment d'une telle collaboration et c'est bien du côté de son décolleté qu'il faudra chercher l'explication. Melissa Brasselle est en effet une actrice disposant dans son corsage d'un don étonnant, celui de détourner l'attention du mâle hétérosexuel moyen. Ainsi hypnotisé, le spectateur devient totalement aveugle à la laideur du reste du métrage et sort conquis par l'oeuvrette qu'il vient de découvrir… Toutefois, pour L'ILE DES KOMODOS, Wynorski doute. L'homme est fébrile et sent que Melissa risque de ne pas suffire. Il s'adjoint donc les services d'une seconde demoiselle 100% silicone nommée Glori-Anne Gilbert (VAMPIRE CALL GIRLS, THE WITCHES OF BREASTWICK, etc.). Fier de son choix, le bonhomme nous offre alors une séquence particulièrement inutile dont l'impudeur devrait sans aucun doute produire l'effet escompté…
Mais pourquoi se donner tant de mal ? Que cherche-t'on à nous cacher à grands coups de poitrines plastifiées ? La réponse est pourtant simple : le komodo ! Car si le premier opus de la «franchise» pouvait se targuer d'effets visuels honnêtes, il n'en est rien de ce sous-produit lorgnant sans vergogne du côté des plus mauvaises pellicules vidéo pré-citées. L'ILE DES KOMODOS fait donc très fort en nous proposant une créature de synthèse particulièrement vilaine. Plus que du travail visuel bâclé, il s'agit d'une véritable catastrophe et ce sur tous les plans. L'interactivité se voit ainsi limitée au strict minimum et les mouvements même de la bête abasourdissent. Le monstre de plusieurs mètres de haut ne fait qu'avancer puis reculer d'un pas incertain durant l'ensemble du métrage. La même animation nous est resservie encore et encore, offrant à nos yeux un bien triste ballet reptilien. Bien entendu, numérique aidant, les angles de vue diffèrent. Mais le spectateur n'est pas aveugle et cet inlassable pas de danse révoltera bien plus qu'il n'amuse. Seule la séquence de poursuite permettra au monstre d'innover et de se découvrir de nouvelles possibilités motrices… Cette (trop) longue scène ne sera bien entendu pas sans évoquer celle de JURASSIC PARK ou de HATARI! avant lui. Reste que cela fait bien peu et que ces séquences, s'étirant sur la longueur, font bien vite perdre tout espoir quant au potentiel du film.
Espoir qu'il convient toutefois de relativiser à la lecture du scénario. Nous sommes en effet en terrain connu et aucune volonté d'innover n'a fait surface lors de la rédaction de la filiforme trame générale. L'ILE DU DOCTEUR MOREAU semble ainsi être la principale source d'inspiration mais ce n'est pas tout… Car Steve Latshaw, scénariste adepte du copier/coller massif, est avant tout un audacieux mélangeur d'idées improbables. Déjà brillant lors de la rédaction de SCORCHER, le bonhomme décide avec L'ILE DES KOMODOS de ne pas se contenter du trop classique «film d'animal tueur». Outre cette histoire de fugitifs échoués (déjà présente par exemple dans le CROCODILE 2 : DEATH SWAMP de Gary Jones), il ajoute donc à sa copie une idée alors très en vogue : celle du zombie ! Non, vous ne rêvez pas, le métrage de Wynorski comporte lui aussi son lot de morts-vivants aux regards hagards et aux aspirations culinaires malsaines. Tempérons toutefois car nos cadavres ambulants ne semblent ici être présents qu'à titre vaguement figuratif. Leur sous-exploitation laisserait même à penser qu'il s'agit là d'une cerise sur le gâteau, petite touche personnelle destinée à parfaire le ridicule d'un film déjà fort bien loti. Ainsi, la contamination des hommes arrive par la salive du dragon de komodo mutant. Qu'un individu touche une branche d'arbre sur laquelle le monstre a dédaigneusement bavé et malheur à lui, il est instantanément contaminé et condamné…
Il ne s'agit cependant là que d'une idée risible parmi tant d'autres. Les motivations du Professeur, par exemple, nous sont présentées comme louables. En effet, le pauvre homme ne pensait pas à mal en créant d'immenses komodos et souhaitait en réalité œuvrer contre la faim dans le monde ! La création de monstres démesurés n'était ainsi qu'une simple étape avant la génération de légumes géants… Méditons quant à ce choix scientifique des plus osés… La récurrence d'idées stupides et de dialogues idiots fini donc d'achever un film qui peine grandement à convaincre. Les quelques magnifiques décors et le rythme plutôt soutenu ne suffisent bien évidemment pas à relever un film écrit, réalisé et interprété sans le moindre talent. Encore une fois, Wynorski se réfugie derrière son amour pour le Bis et sa technique de travail prônant la générosité à moindre coût. Cela ne justifie cependant en rien l'énorme duperie de 87 minutes que représente ce nouvel opus dédié aux komodos tueurs. Le réalisateur retentera sa chance un an plus tard avec un KOMODO VS. COBRA menant bien entendu au même constat alarmant…
Ajoutons de plus que L'ILE DES KOMODOS se voit grandement desservi par le DVD Zone 2 ici chroniqué. Parfois dégotable sous les titres L'ILES DES KOMODOS GEANTS ou PREDATEURS MUTANTS, le disque propose la découverte de la chose via une image au ratio 1.33. Dès les premières minutes du métrage, il semble évident qu'il ne s'agit pas là du format d'origine. Celui-ci s'est en effet vu coupé en dépit du bon sens afin de coller au format télévisuel, largement plébiscité par nos amis d'outre-atlantique. Autant dire que sur de nombreuses scènes, c'est à une perte tout simplement inadmissible que nous assistons. Pire encore, lors de dialogues filmés de profil, les protagonistes disparaissent pour ne plus laisser qu'un bout de nez ou une maigre portion de visage à l'écran... Un bien mauvais travail donc, couplé à un encodage barbare juste acceptable. Les couleurs sont vives mais les défauts de compression sont omniprésents et ne cessent de gâcher les quelques belles images qu'aurait pu proposer le métrage… Concernant le son, nous n'aurons droit qu'à une version française convenable et sans esbroufe. Proposée au format stéréo, celle-ci aura en effet bien du mal à soutenir les quelques scènes d'action du film.
Inutile de s'attendre à du mieux du côté des bonus. Là encore, le disque se veut minimaliste et prend tristement exemple sur son grand frère Zone 1. A savoir que nous devrons nous contenter d'une petite bande annonce d'une durée inférieure à deux minutes… Un contenu éditorial plutôt triste qui aura au moins le mérite de vous faire passer à autre chose sans perdre plus de temps…