Coursier à vélo, Anna est poursuivie par un policier sur le même moyen de locomotion. Après l'avoir rattrapé, le représentant des forces de l'ordre laisse son numéro de téléphone avant de s'en aller. Séduite, elle l'appelle et couche avec lui. Mais, prise de remords, elle prends la décision de partir, avec son petit ami légitime, à la montagne pour y faire de la randonnée loin de la ville...
A écouter les distributeurs de films et les éditeurs de DVD, les petits films d'horreur ne se vendent pas, ça n'intéressent personne ! Et pourtant, force est de constater que les structures de production fleurissent miraculeusement un peu partout dans le monde. C'est le cas de Abnormal Pictures, label de K5 Film, monté spécialement en vue de produire des films de genre à destination du marché international. Et pour atteindre cette cible, malgré les origines allemandes de la maison de production, le tournage va donc se faire en langue anglaise avec des acteurs importés. Cela ne s'avère pas des plus difficiles puisque de toutes façons, BLOOD TRAILS met surtout en avant trois personnages, les autres protagonistes étant quelque peu silencieux ou peu bavards...
Avec ses personnage isolés en forêt, on pense tout de suite à DELIVERANCE, SURVIVANCE ou encore DETOUR MORTEL. Mais si l'on s'attendait à un survival donnant l'occasion à ses créateurs de nous présenter une traque sauvage, BLOOD TRAILS s'apparente bien plus à une sorte de HITCHER au milieu des arbres. Le tueur qui poursuit Anna en forêt a manifestement une motivation très particulière pour entamer cette poursuite. Il va même par moment jusqu'à laisser sa proie s'échapper pour mieux continuer à jouer avec. De son côté, Anna va régulièrement se heurter à l'incrédulité de ceux qui la rencontrent lorsqu'elle annonce qu'on essaie de la tuer. Image léchée avec tournage en milieu naturel et en Scope, BLOOD TRAILS ne devrait donc pas avoir de mal à convaincre. Le cinéaste allemand soigne l'image de son film bien que l'on notera parfois quelques tics comme cette façon régulière de cadrer des moitié de visages en les plaçant sur le bord gauche ou droit. Quoi qu'il en soit, le soin apporté à l'image du film est plutôt appréciable, surtout par les temps qui courent.
Pourtant, le film de Robert Krause souffre d'un énorme problème et pas des moindres. Car le scénario de BLOOD TRAILS ne tient pas la route et accumule les invraisemblances ainsi que les situations complètement ridicules. Prenons un exemple concret... Vous rencontrez un garde chasse qui vous indique une croix qui se voie à des kilomètres à la ronde sur le plus haut sommet du coin. Ensuite, vous courez jusqu'à ce sommet et vous appelez la police avec votre téléphone portable. Et lorsque l'on vous demande où êtes vous alors que vous êtes adossé à cette énorme croix, véritable point de repère géographique immanquable, vous répondez «Je ne sais pas ! Dans la montagne !». Malheureusement, c'est bien à ce type de situation que l'on est confronté dans BLOOD TRAILS. On pourra encore citer l'envie évidente de l'héroïne de se planter lorsqu'elle emprunte sur son vélo un tunnel sombre et au sol très inégal. Forcément, elle se vautre alors que la plupart des personnes sensées, et plus particulièrement ceux qui font de la randonnée, seraient probablement descendues de leur monture pour faire les quelques mètres à pieds. Les gamelles, elle doit aimer ça, de toutes façons, puisque notre héroïne adore rouler à toute allure en hurlant tout en fermant les yeux !
Le scénario permet surtout aux scénaristes, le réalisateur accompagné de Florian Puchert, d'exposer une fuite en avant dans la forêt qui mène le personnage principal d'une rencontre à une autre. Le garde chasse, déjà évoqué, ou bien encore deux bûcherons qui finiront mal. L'occasion aussi de donner, un peu artificiellement, à notre tueur des victimes à assassiner. Hache, tronçonneuse, couteau... Tout y passe jusqu'à l'improbable égorgement à coup de plateau denté du pédalier lors d'un vol plané en VTT. Difficile d'y voir pour autant un slasher, film alignant les cadavres comme d'autres alignent les scènes d'action, puisque le tableau de chasse est quand même plutôt maigre en fin de métrage. Reste donc quelques petites scènes gores qui expliquent probablement le succès du film dans certains festivals (Prix du Public au Dead By Dawn 2006, ex-aequo avec BROKEN, par exemple).
Robert Krause essaie bien d'étoffer son métrage en y injectant des flash-backs révélateurs. Cela pourrait venir renforcer le profil psychologique du personnage d'Anna face à sa culpabilité d'avoir tromper son petit ami mais cette piste sera à peine esquissée. Les retours en arrière sont, à l'évidence, surtout placée là de manière à habiller encore plus la forme du métrage de Robert Krause. Embarrassant puisque cette histoire « d'adultère » donne l'impression que le film condamne son personnage féminin à souffrir pour son écart moral. Durant le dernier quart d'heure le film change un peu la donne en modifiant le cadre, le film perd au passage son côté un peu luxueux hérité des extérieurs boisés pour un dernier face à face assez glauque entre la victime et son bourreau. Mais cela s'avère bien tardif après cette interminable escapade en forêt. A l'évidence, le film de Robert Krause a été mal pensé ce qui lui fait perdre très vite toute forme d'efficacité.
Bien que le film ne soit pas à la hauteur, Free Dolphin soigne son édition DVD. Le transfert 16/9 au format large (2.35) rend justice aux belles images du film, surtout celles en forêt. Aucun véritable défaut n'est notable à l'image et le rendu est donc de très bonne tenue. Les pistes sonores en Dolby Digital 5.1, version originale anglaise sous-titrée et doublage français, sont du même niveau. Les pistes disposent d'une belle répartition sonore qui rend l'écoute appréciable. Du côté des suppléments, cela n'est pas la fête puisqu'il n'y a rien d'autre que la bande-annonce.
Pas de quoi s'enthousiasmer outre mesure pour ce BLOOD TRAILS. Mais, soyons optimiste et notons que le film de Robert Krause a au moins le mérite de faire une entrée dans le cercle très fermé du film d'horreur sur deux roues. Mieux encore, il parvient a nous montrer une mise à mort, certes défiant les lois de la physique, à coups de vélo. Peu banal, les exemples dans le domaine de la bicyclette meurtrière sont assez rares à l'image de l'empalement sur un cadre de vélo dans PRINCE DES TENEBRES. Si on retiendra BLOOD TRAILS, ce sera pour ça mais aussi pour les leçons que l'on pourra en retenir. A savoir que coucher avec n'importe qui, c'est dangereux tout autant que de rouler à vélo en fermant les yeux !