WATCHERS est adapté d'un roman de Dean Koontz, que certains annoncent à juste titre comme irrespectueux du livre original (le héros a été changé en adolescent, la petite amie du livre devient la mère du héros, etc.). Il est vrai cependant que Dean Koontz a rarement bénéficié de traitement de faveur quant à l'adaptation de ses livres au cinéma. Voir les résultats médiocres de PHANTOMS ou SOUVENIRS DE L'AU-DELA. Seuls GENERATION PROTEUS ou encore WHISPERS peuvent prétendre à dépasser la moyenne. Mais nous parlons ici du film et non pas du livre.
Pour la petite histoire, le scénario est signé par Paul Haggis, responsable de CRASH et scénariste du surestimé MILLION DOLLAR BABY. La production du film fut stoppée au moment de la grève du syndicat des scénaristes américains (WGA). Elle fut alors relayée au Canada par Damien Lee qui réécrit le scénario. Haggis demanda à ce qu'un pseudonyme soit alors utilisé, du nom de Bill Freed.
Lors de l'explosion d'un laboratoire de recherche militaire, un golden retriever s'échappe dans la nature. Il est en fait relié télépathiquement à un monstre génétiquement modifié qui n'a qu'un idée : le tuer lui et tout ce qui se trouve sur son passage. Le chien atterrit dans la vie du jeune Travis (Corey Haim) qui le prend sous son aile. Mais la NSO, menée par Lem Johnson (Michael Ironside, carnassier) se lance aussi sur les traces des cadavres laissés par le monstre pour tenter de tout stopper. Vraiment ?
WATCHERS est un production canadienne dont le producteur exécutif n'est autre que Roger Corman via sa société Concorde. Le succès de ce premier opus entraînera trois séquelles. Roger Corman s'étant arrogé les droits d'exploitation du livre au grand dam de Dean Koontz, il épuisera le filon jusqu'au bout.
Jon Hess, ancien champion américain de karaté devenu réalisateur, emballe le film en 87 minutes. Ce réalisateur a à son actif des ratages tel que ALLIGATOR II LA MUTATION. Force est de constater que ce WATCHERS reste parmi ce qu'il a fait de moins médiocre. Si la caméra subjective prenant la place du monstre en se déplaçant est adroite, cela génère hélas très peu de frissons. Les attaques restent peu visibles (une main poilue ici et là venant attaquer les humains) et l'on est content de voir poindre quelques excès gore (le cadavre dans la cuisine, l'un des professeurs du lycée) qui relèvent l'intérêt mais surprennent par leur présence. Le traitement lisse et peu porté par le suspens aigu ne laissaient pas espérer de tels débordements. Quelques scènes d'attaque s'avèrent aussi totalement ratées, comme la poursuite des trois jeunes en vélo dans la forêt, bien trop lente pour être crédible. Avec le recul, le film se déroule comme une chasse au chien/à l'homme plutôt générique (mais non remboursé par la sécurité sociale).
Le scénario, excepté du fait qu'il ne respecte pas le livre d'origine, est pourvu de dialogues généralement risibles et fait vraiment preuve de crédulité. A aucun moment Corey Haim ne se pose des questions sur l'intelligence du chien et ne se trouve pas vraiment surpris lorsque celui-ci tape une phrase sur un clavier d'ordinateur ! Tout comme le jeune héros devient un Rambo de cour de récré avec ses bombinettes fabriquées maison en allant à la droguerie du coin.
Le film adopte cependant un rythme régulier, lui faisant accéder au statut de film de monstre plutôt standard. On notera une pointe de compassion pour le monstre au final, alors que celui-ci est demeuré plutôt en retrait tout au long du métrage, visuellement tout comme psychologiquement. Parlons-en du monstre, justement. Suivant le précepte cormanien de ne le révéler qu'en fin de parcours, c'est plutôt bien joué, tant le visuel poilu et la tête est d'un ridicule achevé. De bien jolies dents pointues dans un gueule béante en gros plan, mais dès que la caméra révèle le monstre sur pied, c'est l'éclat de rire général. Il n'y a guère que la version créée par John Carl Buechler dans son WATCHERS REBORN qui donnera au monstre un look acceptable. Dommage que le film le soit moins !
Un casting très années 80 avec la présence énergique de Corey Haim, à l'époque jeune espoir du genre avec ses interprétations dans PEUR BLEUE ou encore PRAYER OF THE ROLLERBOYS. Il arriva sur le tournage de WATCHERS tout auréolé du succès de GENERATION PERDUE. Son rôle de teenager mi-rebelle en passe de devenir adulte lui sied comme un gant. On remarquera aussi Jason Priestley dans un tout petit rôle, ainsi que la nièce de Franck Zappa, Lala, qui tient le rôle de la petite amie séquestrée par… Michael Ironside. Ah, Michael, que serait un film de série B canadien sans toi ? Sa dégaine assurée, sa gueule patibulaire, ses coups de poings mortels assurent sa réputation de TERREUR A L'HOPITAL CENTRAL jusque TOTAL RECALL et même, soyons fous, dans PROM NIGHT II : HELLO MARY LOU. Il assure ici le salopard de service qui traque la bête et la belle (et son beau). Il traque tout le monde, en fait. Sacré Michael.
La Pologne… ses pirogi fourrés aux choux et à la viande, sa krakowska goutue, le bigos généreux et mariné à la bière… et ses éditions DVD à tout petit prix. Dont ce WATCHERS premier du nom, traduit ici en OBSERWARTOZY, dont les droits sont tenus par Studio Canal. Les accros du générique de fin (dont votre serviteur fait partie) verront que l'infatigable Robert Misiorowski (réalisateur de SHARK ATTACK ou DERAILED) s'occupait de la coordination de la production pour le compte… de la Carolco des Mario Kassar et Andrew Vajna (BASIC INSTINCT, MUTANT AQUATIQUE EN LIBERTE…). Dont le catalogue a été racheté par Studio Canal. Tout s'explique !
Concernant l'édition, nous avons droit pour la première fois à une version au format de 1.78 agrémenté d'un transfert 16/9 plutôt réussi. Un joli piqué de couleurs avec cependant un manque de contraste dans les scènes les plus sombres et une teinte tirant vers le clair dans les scènes de jour. Pas de griffures ou autres scories. Dans l'ensemble on se contentera d'un télécinéma de qualité assez satisfaisante. La piste sonore polonaise… nous la mettrons de côté. Un doublage hasardeux et des effets sonores plaqués n'ont pour les audiophiles fervents de version originale aucune importance. La piste anglaise a été mixée en Dolby Digital 5.1 à partir d'un master cinéma avec piste mono. Force est d'avouer ici l'inutilité du procédé, tant certains moments de la (pauvre) partition de Joel Goldsmith sont certes parfois mis en évidence, mais c'est bien tout. Les dialogues sont concentrés sur la voix centrale. On remarquera quelques effets sonores grappillés ça et là sur les canaux gauche et droite, mais les ambiances demeurent sans relief particulier. Ce mixage n'apporte rien de flagrant ni de neuf, hormis peut être moins de souffle par rapport au DVD américain.
Cette édition représente en fait un léger mieux par rapport à l'édition Zone 1, parue chez Artisan aux Etats-Unis, où le film était en double feature avec sa séquelle WATCHERS II. Format plein cadre et Dolby 2.0 surround, tout comme l'édition Zone 2 britannique. Par ailleurs, l'édition Zone 2 de chez Kinowelt, sortie en Allemagne (16/9 et version anglaise + allemande) en octobre 2006, offre un métrage apparemment moins long, à savoir 86 minutes.
Les bonus sont bien évidemment tous en polonais (les biographies et filmographies), tout comme la pléthore de films annonces, tous intégralement doublés de manière anecdotique en polonais avec la piste originale anglaise qui se fait encore entendre en bruit de fond ! Vision étant aussi éditeur de CD-Audio, un accès à certains titres de leur catalogue musical est également présent.
Rien de honteux, donc, mais rien de fabuleux non plus. Un film qui ne surprend jamais, même le retournement final laissera de marbre le spectateur qui aura deviné depuis longtemps la véritable raison de cette traque. Spectacle honorable qui laissera cependant la trace d'un monstre des plus boiteux et ridicule. Un comble pour ce qui est supposé faire peur. Mais il n'y a rien de tout cela ici où ce film routinier (mais jamais ennuyeux) laissera place à un WATCHERS II qui se révèlera plus un remake qu'une séquelle. Puis un WATCHERS III qui tient plus que de l'escroquerie tant il a plus de rapport avec PREDATOR qu'avec le roman de Koontz. Et finalement, à bout de souffle comme dirait Jean-Luc, un WATCHERS REBORN pauvrissime remake de la séquelle, qui était déjà plus un remake qu'une séquelle. Bref, Liebig version Corman, quoi !