Ils sont jeunes, ils sont en bagnole et ils tombent en panne au milieu de nulle part… Pas de bol surtout que la seule ferme aux alentours abrite une colonie de vilaines chauves-souris qu'il est préférable de ne pas déranger !
Officiellement, THE ROOST a été produit pour 50.000 dollars. Mais il faut surtout remettre dans son contexte cette somme pour que cela soit tout à fait honnête. Au sein de sa maison de production, Glass Eye Pix, Larry Fessenden monte une structure avec laquelle il entend produire des films d'horreur à petit budget. Le financement des films Glass Eye Pix est déjà assez bas et cela donne tout de suite le ton pour ce qui est de l'argent qui sera alloué aux films produits dans le cadre de Scare Flix. Larry Fessenden ne cache pas qu'il cherche à s'inspirer de la méthode Roger Corman en matière de production. Le mot d'ordre étant de travailler en famille ou pour le dire autrement en ne percevant qu'une rémunération limitée voire faire preuve de bénévolat. C'est ainsi que sur la douzaine de personnes qui composeront l'équipe de tournage, le réalisateur, Ti West, avoue que personne n'a été payé. Autre truc, certains traitements du film ont été confectionnés en interne par Glass Eye Pix ce qui allége encore la facture. Finalement, on se demande si la facture de THE ROOST ne se limite pas à celle des quelques plans d'effets numériques traités par une société extérieure ou encore dans l'enregistrement de la musique du film. Sans vouloir dévaluer les capacités ou le talent de Ti West, son film n'aurait probablement pas coûté la somme annoncée dans une situation totalement différente et donc s'il n'avait pas été chapeauté par l'infrastructure mise en œuvre par Larry Fessenden. Le coût réel de THE ROOST reste donc quelque peu nébuleux... En soit, cela n'aurait pas d'importance si on ne nous agitait pas devant le nez la prouesse d'avoir réalisé un film pour 50.000 dollars.
THE ROOST est donc le deuxième film à passer par Scare Flix après OFF SEASON de James Felix McKenney. On le retrouvera d'ailleurs au générique de THE ROOST, le principe familial est de mise, et il signera aussi AUTOMATONS, le troisième film de Scare Flix. Mais pour en revenir à THE ROOST, Ti West fait la rencontre de Larry Fessenden avant qu'il n'ait terminé ses études. Ayant vu les courts-métrages du jeune réalisateur, Larry Fessenden lui laisse sa carte de visite. En quittant l'école, Ti West arrive donc avec le projet d'un film traitant du vaudou. Pas franchement emballé, Larry Fessenden fait la moue. Pas démonté, Ti West propose alors une histoire de chauves-souris sans même avoir réellement travaillé le sujet. Et voilà les deux hommes sur un terrain d'entente. Ne reste plus à Ti West qu'à écrire un scénario ce qu'il va faire en trois semaines. Le tournage débutera assez vite avec une véritable équipe technique d'une douzaine de personnes tous dopés par l'envie de faire du cinéma. Le film rentre alors dans sa phase de post-production où il faudra tout de même trois mois de travail sur la musique et les effets spéciaux numériques ainsi qu'un mois supplémentaire pour le montage. Cadré et chronométré, nous sommes tout de même très loin des épiques aventures cinématographiques à la Sam Raimi (EVIL DEAD), Peter Jackson (BAD TASTE) ou, plus récemment, Pablo Parés et Hernán Sáez (PLAGA ZOMBIE : ZONE MUTANTE).
Mettons de côté les histoires d'argent pour nous intéresser à l'essentiel. C'est à dire le film lui-même car, après tout, le consommateur n'en a peut être rien à faire de savoir que le métrage qu'il achète à coûter 200 millions ou 50.000 dollars. Surtout que le prix du DVD ne varie pas du tout en fonction du budget du film que l'on va regarder et il en va de même en ce qui concerne les places de cinéma. Au-delà de l'argent que l'on nous balance sur les écrans, c'est donc le talent qui prime. Il est vrai qu'il est préférable d'avoir beaucoup d'argent et pas de talents ! Ti West est plutôt talentueux ce qui ne veut pas pour autant dire que THE ROOST est un chef d'œuvre, loin de là. Mais dans le cadre d'une petite production comme en voit beaucoup, il réussi à insuffler dans son film une patte ou en tout cas une certaine personnalité. Cela donne à l'ensemble un côté "cinéma professionnel", mais pas forcément extraordinaire, qui sera malheureusement handicapé par un scénario sans envergure.
Dans THE ROOST, il y a des chauves-souris, on l'a déjà dit. Mais le film se permet de faire un rapprochement évident entre vampirisme et mort-vivant. Le vampire est, le plus souvent, un mort-vivant qui contamine ses victimes à l'instar des morts-vivants tel que nous les connaissons depuis LA NUIT DES MORTS-VIVANTS. Cela permet donc de faire évoluer le récit avec l'attaque des chauves-souris qui sont à même de ramener des créatures tout aussi dangereuses. Une excellente idée qui n'est utilisé que de manière très sommaire. Car THE ROOST manque finalement d'ambition en ne propose aucune cohérence ni même aucune finalité à son histoire. On ne sort pas de la banalité du film d'horreur produit en série. C'est d'autant plus dommage que c'est ce qui tire le film vers le bas. Alors que Ti West a des qualités certaines pour la réalisation, son point fort n'est sûrement pas l'écriture !
Ses chauves-souris et ses morts-vivants, Ti West ne les exploite que vulgairement dans son scénario. Il en va de même de ce qui aurait pu donner un cachet décalé à THE ROOST. Aux Etats-Unis, il y a une tradition qui est plus ou moins inconnue en France. Celle de présenter à la télévision des films d'épouvante dans un cadre horrifique et avec un présentateur grimé. L'exemple le plus connu étant Elvira (Cassandra Peterson) ou, en France, Sangria qui présenta des films d'horreurs sur la 5. Un tel personnage est aussi au cœur de l'amusant VAMPIRE VOUS AVEZ DIT VAMPIRE. Donc, THE ROOST met en scène un présentateur qui introduit le film. En plein milieu d'une scène «dramatique», il réapparaît en fustigeant le cliché de la situation. On ne le reverra plus du tout avant la fin du film. Il aurait pu être éventuellement judicieux de lui faire jouer une part plus importante dans l'histoire ce qui aurait nécessairement fait dévier le style du film mais au moins lui aurait donné un rythme plus soutenu. Il n'en est rien, ce présentateur s'avère être un gimmick assez inutile et ce même si l'interprétation au second degré de Tom Noonan est très réussie.
Encore une fois, THE ROOST se place essentiellement au niveau de sa forme, sans éclair de génie, plutôt que de développer un fond solide ou une intrigue véritablement travaillée. Le début du film laisse déambuler ses personnages dans la nuit pendant un bon tiers du métrage dont la durée est inférieure à 80 minutes. Puis, tout ce petit monde va jouer à cache cache avec des chauves-souris et des morts-vivants avant un final sans intérêt où Larry Fessenden apparaît le temps d'être attaqué par une nuée de chauves-souris. Au final, cela s'avère franchement décevant ! Enfin, notons que la stressante partition musicale a été composée par Jeff Grace qui était l'assistant de Howard Shore lorsque celui-ci travaillait sur LE SEIGNEUR DES ANNEAUX.
Le tournage de THE ROOST s'est fait en Super 16mm et en DV. A vrai dire, on n'aperçoit pas vraiment de caméra Super 16 dans le Making Of. Quoi qu'il en soit, le réalisateur a voulu donner à son film un look un peu sale et il a donc été choisi de forcer la visibilité du grain. Lorsque l'on regarde l'image, c'est tellement présent que l'on pense plus à du bruit vidéo qu'à un grain cinéma accentué. Mais, après tout, si c'est l'effet voulu, nous n'allons pas voir là dedans un défaut. Ce qui mène à dire que l'image a donc bel et bien un aspect brut de décoffrage qui risque de rebuter et ce qui rend d'autant plus difficile son appréciation technique. Au moins, la compression évite de se faire trop sentir ce qui est un gros danger dans le cas de telles images.
Deux pistes audio nous sont proposées. Toutes les deux sont encodées sur deux canaux mais sont, à priori, des mixages monophoniques. Pourtant, le résultat dispose d'une belle dynamique ce qui donne un tant soit peu de relief à l'ensemble. Bien évidemment, un sous-titrage français est disponible sur la version originale anglaise. Par contre, on ne peut pas en dire autant en ce qui concerne les suppléments. Car l'éditeur a choisi de sous-titrer seulement la moitié d'entre eux !
Et cela commence mal puisque le Making Of est donc dénué d'une traduction française ce qui risque de rendre quelque peu ardu sa compréhension. Surtout qu'il est composé en grande partie d'images arrachées sur le vif du tournage et donc sans une prise de son parfaite. Cette petite vidéo d'une trentaine de minutes cadre donc le tournage et survole très rapidement, voire éclipse, la partie de post-production. La fin nous donne l'occasion de voir Ti West et une partie de l'équipe du film lors de la présentation du film à un festival. Difficile de parler de documentaire puisque cela ressemble plus à un assemblage d'images sans véritable ligne directrice ni même l'envie de nous apprendre quoi que ce soit.
Le second et dernier supplément à ne pas avoir la chance d'être sous-titré porte le titre de «Scènes coupées». Les non anglophones ne comprendront absolument rien alors que les autres seront sceptiques quant à l'appellation (non contrôlée) de ces trois minutes. Car il ne s'agit pas de scènes coupées stricto senso. Ce sont des chutes des prises de vue réalisées avec Tom Noonan et cela prend très vite la direction d'un bêtisier.
Pour la suite, les suppléments sont donc pourvus de textes en français qui s'affichent en bas de l'image. Et cela commence sur le court-métrage PREY de Ti West. Quelques minutes que l'on résumera par son maigre synopsis à savoir la poursuite de deux personnages dans une forêt par une créature que l'on ne verra pas vraiment. Cela s'avère assez léger puisque le concept n'a rien d'innovateur. Il n'aurait pas été plus mal de nous proposer les deux autres courts du réalisateur, THE WICKED et INFESTED, mais ce n'est pas le cas.
Si vous n'aimez pas les chauves-souris, on va essayer de vous faire changer d'avis avec une interview de Merlin Tuttle qui dirige une association pour la défense de ces bestioles. Quelques minutes assez amusantes puisque l'on nous démontre que les chauves-souris sont plutôt sympas en suppléments d'un film où ces créatures ailées attaquent tout ce qui bouge. Quelque part, voilà qui est une bonne intention ! Après cet intermède éducatif, il est encore possible de visionner une galerie de photos ainsi que les bandes annonces de THE ROOST et celles d'autres titres de WE Productions tel que l'excellent BUBBA HO-TEP.