Le docteur Dan Potter (Dwight Schultz, connu pour son rôle de «Looping» dans la série L'AGENCE TOUS RISQUES) s'installe avec sa famille dans une petite ville américaine suite à sa mutation dans un asile psychiatrique. L'établissement, riche en malades en tout genre (dont Martin Landau et Jack Palance) est dirigé par un directeur qui semble encore plus fondu que ses patients (Donald Pleasence). Alors qu'une panne d'électricité plonge la ville dans le chaos pour plusieurs heures, quatre fous furieux en profitent pour s'évader. Ils vont tuer quiconque se trouve sur leur chemin, jusqu'à prendre d'assaut la maison familiale du Dr Potter.
Daté de 1982, ALONE IN THE DARK n'a rien à voir avec la récente bouse homonyme du psychopathe de la pellicule Uwe Boll ! ALONE IN THE DARK n'a rien non plus à voir avec une adaptation de jeu vidéo puisqu'il s'agit d'une sorte de slasher, sous-genre qui faisait les belles heures du fantastique du début des années 80. Le film est réalisé par Jack Sholder, un inconnu qui montait jusqu'alors des bandes-annonces pour financer ses propres courts-métrages. ALONE IN THE DARK, qui fut aussi connu sous le nom de DEMENT, est également l'une des premières productions de New Line. Tout d'abord société de distribution, New Line s'aventura dans la mise en chantier de tout petits budgets, avant de remporter le jackpot avec le personnage de Freddy Krueger dans LES GRIFFES DE LA NUIT de Wes Craven. Sholder réalisera d'ailleurs le deuxième épisode, LA REVANCHE DE FREDDY, avant de mettre en scène HIDDEN à nouveau pour New Line.
Parfaitement ancré dans son époque, ALONE IN THE DARK surfe sur la mode du serial killer starifié par HALLOWEEN et VENDREDI 13. L'argument du métrage tenait en cette ligne : si les autres films n'ont qu'un seul serial killer, ALONE IN THE DARK en a quatre, soit quatre illuminés échappés d'un asile psychiatrique. Un pitch finalement très similaire à celui de HALLOWEEN. Si l'environnement typique de la petite ville américaine est là encore en commun avec les deux films, il faut savoir qu'ALONE IN THE DARK devait initialement se passer à New York. Le groupe de malades devaient commettre leurs méfaits dans le quartier de Little Italy, jusqu'à mettre en colère la mafia locale pour une vendetta sanglante. Les contraintes budgétaires évidentes ont exigé une réécriture du scénario pour inclure l'histoire en province, un choix beaucoup plus simple en termes de logistique de production.
Revoir ALONE IN THE DARK aujourd'hui ne met pas en relief ses capacités à créer la peur. Le film est finalement très basique dans son approche du slasher. Certes efficace, la mise en scène ne fait preuve d'aucune initiative particulière et rend sa copie avec une application qui n'exclue pas les nombreux clichés. La dernière partie, qui fait ouvertement référence aux films de «siège», relève un tout petit peu le niveau en proposant un suspense rondement mené bien que sans surprise.
C'est plus grâce à son très bon casting qu'ALONE IN THE DARK a su se maintenir hors de l'oubli durant plus de 20 ans. Alors dans un creux professionnel, Martin Landau et Jack Palance interprètent deux des quatre échappés de l'asile. Un bon calcul puisque la carrière des deux hommes redémarrera quelques années plus tard : Palance et Landau reçoivent tous deux un Oscar, respectivement en 91 (pour LA VIE, L'AMOUR, LES VACHES), et en 94 (pour ED WOOD). Donald Pleasence était quant à lui déjà ancré dans le genre avec son rôle du docteur Loomis dans HALLOWEEN et HALLOWEEN II. Dans ALONE IN THE DARK, le comédien joue d'ailleurs une sorte de parodie de ce personnage en interprétant un directeur d'asile complètement décalé et irresponsable, fumant des pipes à marijuana durant ses entretiens avec son personnel médical. Outre Dwight Schultz, qui fera ensuite de la télé et maintenant beaucoup de doublage de jeux vidéos, nous trouvons Erland Van Lidth dans un rôle d'importance. Ancien catcheur, l'homme se sera illustré dans RUNNING MAN de Paul Michael Glaser.
Avec ses portraits improbables de psychotiques ultra violents, et sa peinture d'un monde extérieur guère plus civilisé (voir comment un black-out de quelques heures plonge la petite ville dans le chaos), ALONE IN THE DARK mise sur un humour noir bienvenu. A l'époque inédit dans le sous-genre, cet humour se montre moins pertinent aujourd'hui. Mais il permet de relever la sauce d'un film honnête mais qui montre des signes d'obsolescence. ALONE IN THE DARK est en ce sens baigné dans une sorte de voile surréaliste, entre séquences de rêves outrées et dialogues acides parfois sans queue ni tête. Et que dire de la grande coïncidence du film ! Le quatrième larron meurtrier, très peu présent dans le film, commet ses méfaits coiffé d'un masque de hoquet. Un vil pompage de MEURTRES EN 3 DIMENSIONS (troisième opus de la série VENDREDI 13 où Jason commence à arborer ce célèbre look) ? Et bien non ! Si les deux films sont bel et bien sortis en 82, ALONE IN THE DARK (sorti en deuxième position) était pourtant achevé avant son concurrent. Il s'agit juste de l'une des correspondances d'inspiration les plus étonnantes du genre.
ALONE IN THE DARK est édité uniquement via une édition américaine malheureusement exempte de tout sous-titrage. Le film, au format, est présenté dans une copie restaurée d'une très grande qualité. Pour un petit film du début des années 80, l'effort n'est pas mince. Si la piste sonore originale stéréo est présente, le disque lui adjoint une piste en Dolby Digital 5.1 ainsi qu'une piste DTS. Bienvenue bien que superflues, ces deux pistes sont très propres et efficaces bien que les enceintes arrières soient quasi muettes.
En termes de bonus, là encore l'éditeur soigne son disque même si l'intérêt est inégal. Jack Sholder est présent pour un commentaire audio. L'homme a beaucoup de mal à démarrer, il trouve ensuite le rythme de croisière d'une parole précise et soucieuse du détail. Sholder livre quelques anecdotes intéressantes notamment sur Jack Palance, qui lui a causé pas mal de soucis sur le tournage suite à ses caprices de vieux briscards. Sholder ne se montre néanmoins pas plus passionné que ça sur cette première expérience de long-métrage, et profite de la moindre occasion pour nous répéter qu'il est un homme de lettres diplômé et un spécialiste pointu en musique classique !
Le film met en scène au détour d'une séquence un groupe de punk, The Sic F*ck. L'occasion de les revoir plus de 20 ans plus tard le temps d'une interview. Le chanteur et ses deux choristes ont pris un sérieux coup de vieux, et nous parlent majoritairement du mouvement punk. Si certaines anecdotes sont amusantes, l'interview peinera à intéresser les non-initiés. ALONE IN THE DARK zigouille une baby sitter au détour d'une séquence, la jolie Carol Levy. Une nouvelle interview avec cette dernière nous est donc proposée. Actrice de publicité et figurante de téléfilms, la comédienne (qui s'est pris là encore un méchant coup de vieux) n'a malheureusement pas grand-chose à raconter d'une carrière rachitique. Enfin, une bande-annonce et une section d'archive graphique clot le disque.
ALONE IN THE DARK, le premier film de Jack Sholder a bien vieilli. Slasher de routine d'où surnage un humour sarcastique bienvenu mais depuis dépassé, le film a néanmoins le mérite de son excellent trio en tête d'affiche. A réserver aux nostalgiques.