Pour être sauvé de la ruine, Pierre de L'espérance souhaite marier son fils, Mathurin, à une jeune et riche héritière. Mais cette union doit se concrétiser très rapidement et sous l'égide du Cardinal de Balo sans quoi Lucy Broadhurst ne pourra toucher son héritage…
Au début des années 70, Anatole Dauman produit LES RENDEZ-VOUS EN FORET d'Alain Fleischer. Jugeant qu'il serait bon d'épicer un peu plus le film, il demande à Walerian Borowczyk d'imaginer une fin toute différente puis de la tourner. L'idée d'une créature monstrueuse fait son chemin mais le réalisateur, Alain Fleischer, refuse catégoriquement que l'on touche à son film et fait tout ce qui est en son pouvoir pour éviter cela. Finalement, la fin alternative ne sera jamais tournée mais la créature n'est pas mise au rebut et Walerian Borowczyk pense déjà la recycler dans un court-métrage qui sera nommé «La véritable histoire de la bête du Gévaudan». Ce segment aurait du être intégré à l'anthologie des CONTES IMMORAUX tournée ensuite mais finalement il en sera écarté.
Le court-métrage d'une vingtaine de minutes deviendra plus tard LA BETE. La partie de la rêverie concernant la séquence érotique entre la créature et Romilda deviendra le cœur d'une autre histoire qui est, en quelque sorte, son prolongement à notre époque. Eloigné des considérations fantastiques, le récit nous présente une famille d'aristocrates déchus à la manière d'une comédie satirique. Il est ainsi assez amusant de suivre les efforts de Pierre de L'espérance prêt à tout pour perpétuer la lignée et le rang de sa famille. Toute cette partie de l'histoire s'apparente à l'accouplement des chevaux placé en préambule du récit. Cette séquence filmée de manière très crue montre une jument en chaleur vers laquelle plusieurs personnes amènent un étalon en rut. La représentation d'un mariage arrangé sous sa forme la plus bestiale est sans équivoque.
Passé ce premier choc visuel filmé sans fard par Walerian Borowczyk, l'intrigue prend forme et l'on entre dans le microcosme du château qui dissimule de nombreuses choses. Après la découverte de la saillie des chevaux, Lucy Broadhurst met la main sur divers objets érotiques disséminés ici ou là (un dessin derrière un tableau, un livre…) qui ne font qu'exacerber son désir auquel elle s'abandonne. Dans le même temps, le domestique essaye vainement de se taper la fille de bonne famille, tandis que le père essaye de s'attirer les bonnes faveurs de l'église par l'intermédiaire d'un prêtre aux accents pédophiles. Mais avant d'atteindre la révélation finale de LA BETE, la plus grosse provocation érotique est encore à venir avec les images du fameux court-métrage initialement inspiré par l'histoire de la bête du Gévaudan.
Pendant son sommeil, Lucy Broadhurst rêve de Romilda de L'espérance et de sa rencontre bestiale en forêt. La jeune femme aurait été violée par une créature mais la rêverie prendra des tournures autres… La séquence érotique du viol puis de l'abandon sexuel à la bête pour enfin la dominer est mise en image de manière grotesque et il est alors difficile de la prendre au sérieux. Encore moins avec la musique entraînante au clavecin qui accompagne les images de cette scène. Il n'en reste pas moins que la suggestion n'a pas court ici et que la jeune femme batifole avec une créature poilue au sexe énorme délivrant des litres de sperme. Voilà de quoi choquer nombre de spectateurs, amuser une autre frange de ceux-ci voir en émoustiller certains ce qui, à l'époque de sa sortie au milieu des années 70, provoqua de vives réactions en rapport avec les images. Avec un tel sujet, les trois jeunes actrices principales se dénudent donc largement des gentillettes mais osées masturbations de Lisbeth Hummel jusqu'au corps à corps humide de Sirpa Lane avec la fameuse bête.
Arte Vidéo sort LA BETE avec un transfert 16/9 au format cinéma 1.66. L'image est de bonne tenue et n'est sonorisée que par une piste française en mono. Cette dernière est, elle aussi, sans grand défaut et ne montre finalement que les limitations inhérentes à son enregistrement monophonique d'origine. Par contre, il apparaît étonnant que l'éditeur n'ait pas pensé à mettre le doublage anglais réalisé à l'époque surtout que l'actrice Lisbeth Hummel a sûrement été post-synchronisée par la suite en français. L'adjonction de cette piste sonore n'aurait peut être pas apporté beaucoup plus de satisfaction aux spectateurs français mais il aurait été intéressant de pouvoir passer de l'une à l'autre.
En ce qui concerne les suppléments, il n'y a rien concernant le film lui-même. Encore une fois, on peut être surpris puisque Cult Epics a sorti très récemment une édition sur trois DVD du film de Walerian Borowczyk avec scènes de tournage (sans parole), interview du cinéaste, bandes-annonces et galerie photographique. Cette grosse édition contenait en plus un montage du film plus long d'une poignée de minutes qui avaient été supprimé par Walerian Borowczyk dans sa version finale. Ces quelques minutes de dialogues auraient pu faire l'objet de scènes coupées…
Pour en apprendre un peu plus sur LA BETE, il reste donc le livret qui accompagne le digipack du disque où l'on retrouve une biographie détaillée de Walerian Borowczyk et où l'on peut obtenir quelques informations sur le film en particulier.
S'il n'y a rien à propos du film sur le DVD, il n'est pas pour autant proposé complètement nu. Le disque contient six courts-métrages de Walerian Borowczyk. Par contre, parmi ceux-ci, il n'y a pas L'Escargot de Vénus indiqué comme avoir été distribué avec LA BETE dans les salles à l'intérieur du livret. Cet ajout est, en tout cas, une vision plus globale de l'univers du cinéaste au travers de courts des années 50 aux années 80. En rapport avec LA BETE, on évoquera Une Collection Particulière où Walerian Borowczyk expose une nouvelle fois la thématique du désir et de l'objet érotique. Mais aussi Scherzo Infernal avec son histoire d'anges et de démons aux désirs à priori incompatibles avec leur statut et qui finissent par se rencontrer pour un accouplement contre nature.
Si cette édition de LA BETE déçoit en raison de son contenu informatif très faible en regard du film de Walerian Borowczyk, elle apparaît tout de même très attractives ne serait ce que par la présence des courts-métrages, certains non édités encore à ce jour en DVD. En plus d'une excellente retranscription du film, LA BETE se pare d'un digipack à la belle finition avec un livret et même la reproduction de 6 œuvres de Walerian Borowczyk sous la forme de cartes postales. Reste à savoir si LA BETE vous amusera, vous choquera ou vous excitera… Mais ça, c'est à vous de voir !