Le réalisateur israelien Avi Nesher quitte son pays, en 1985, à l'occasion de la réalisation de CONQUEROR, une très libre transposition italienne des aventures d'"Elle-qui-doit-être-obéie", personnage créé par H. Ridder Haggard. Il lui faut attendre cinq années pour sortir son second film, TIMEBOMB, un thriller de science-fiction produit par Dino De Laurentiis et plutôt bien accueilli. Son film suivant, LE DOUBLE MALEFIQUE, est donc relativement attendu. Comme vedette, il bénéficie de l'actrice Drew Barrymore, âgée de seulement 18 ans, qui fait alors son come-back après une cure de désintoxication et la publication d'un livre dans lequel elle relatait ses problèmes liés à l'alcool et à la drogue. A ses côtés, on retrouve quelques émérites seconds couteaux, comme Leslie Hope (SHADOWBUILDER…) ou Dennis Christopher (FONDU AU NOIR…).
Patrick Highsmith, un jeune scénariste californien sans le sou, décide de co-louer son appartement. Une charmante jeune femme, Holly Gooding, répond à son annonce et s'installe chez lui. Venant de New York, elle souhaite rendre visite à son frère, un jeune homme attardé, interné après avoir assassiné son propre père. Patrick étant déconcerté par les imprévisibles changements d'humeur de Holly, elle finit par lui avouer qu'elle se croit hantée par un "Doppelganger", un double maléfique qui prend sa place pour commettre des méfaits…
La sage Holly commet-elle des crimes abominables sous l'effet de la schizophrénie, ou bien est-elle effectivement sujette à une malédiction surnaturelle, l'affligeant d'un sosie malfaisant qui sème le malheur et la mort autour d'elle ? Ce thriller, louvoyant entre fantastique et récit policier, semble, dans un premier temps, largement favoriser l'hypothèse de la maladie mentale. Jonglant avec les thèmes du double, de l'identité et des apparences trompeuses, LE DOUBLE MALEFIQUE a alors tout du thriller américain classique, et multiplie les références plus ou moins hitchcockiennes (SUEURS FROIDES, PAS DE PRINTEMPS POUR MARNIE, mais aussi LA MAISON DU DOCTEUR EDWARDS…).
Mais Avi Nesher n'est ni Hitchcock, ni Brian De Palma. Son thriller affiche rapidement des ambitions modestes, et il ne cherche pas à pasticher avec virtuosité les classiques du suspens américain. Au contraire, il louche plutôt vers la série B des années 80. Oscillant entre un léger érotisme, quelques séquences d'épouvante et une touche de comédie, l'ensemble est bien mis en valeur par une troupe de comédiens sympathiques.
Malheureusement, LE DOUBLE MALEFIQUE gâche son honnête potentiel, à cause d'un scénario d'une rare médiocrité. Lent, laborieux, il perd rapidement l'attention du spectateur, lassé par tant de bavardages et de faux moments mystérieux (le policier menaçant…). Plus grave, le dénouement se perd dans des révélations aussi incohérentes que contradictoires, laissant le film se terminer dans le flou le plus complet. Certes, cette conclusion nous vaut quelques beaux maquillages signés par l'équipe KNB, mais elle laisse aussi sur une impression de frustration.
Petite production très moyenne, LE DOUBLE MALEFIQUE vaut surtout pour ses interprètes sympathiques et quelques rares moments érotiques ou horrifiques. En tout cas, il reçoit un accueil commercial assez tiède.
Déjà distribué en DVD en Grande-Bretagne et aux USA, LE DOUBLE MALEFIQUE arrive donc en France au sein d'une collection "Frissons" publiée par Elysées Editions et son label Elephant (bien que ce nom ne soit pas mentionné sur la jaquette mais seulement avant le menu du DVD !).
LE DOUBLE MALEFIQUE n'étant apparemment pas sorti en salles dans son pays d'origine, il est difficile d'établir un ratio de cadrage original pour ce film. Il est proposé ici en 1.33, sans pertes d'images sur les côtés (comme sur les DVD américain et britannique), sans doute comme il a toujours été montré en vidéo. Toutefois, il est possible de recréer un cadrage panoramique artificiellement (en zoomant sur une télévision 16/9), et on obtient un résultat artistiquement plus satisfaisant (mais le sous-titrage devient inutilisable). Sinon, le télécinéma est loin d'être extraordinaire (pas mal de petites saletés et des contrastes assez ternes), mais reste globalement acceptable.
La bande-son est disponible ou bien en version originale, ou bien en version française, dans son mixage "Ultra-Stéréo" d'origine, lequel a malheureusement un peu tendance à mettre les dialogues en retrait par rapport à la musique. En français, un nouveau mixage Dolby Digital 5.1 est disponible, ainsi qu'un sous-titrage optionnel.
En guise de suppléments, on trouve trois filmographies (uniquement avec les titres anglophones) dédiées à George Newbern, Drew Barrymore et Avi Nesher, ainsi que des bandes-annonces pour LE DOUBLE MALEFIQUE et les autres titres sortant simultanément dans cette collection "Frissons" (on remarque toutefois que la "bande-annonce" de HOUSE III est un simple extrait du film). Tout cela est complété par un documentaire américain (en anglais sous-titré en français) revenant sur la carrière de Drew Barrymore, du début des années 1990 jusqu'à WEDDING SINGER, en recyclant apparemment des morceaux de featurettes promotionnelles.
Apportant des nouvelles options sonores francophones par rapport aux éditions anglo-saxonnes, ce DVD du DOUBLE MALEFIQUE s'avère donc plutôt honnête.