Bien que ANGOISSE fasse partie de la collection Fantastique des
Editions Montparnasse,
l'histoire n'a pas grand chose de vraiment fantastique. Pourtant, l'histoire
nous parle d'un véritable monstre. Pas des monstres imaginaires
mais de ceux qui se cachent derrière l'esprit humain.
Un soir d'orage, un docteur rencontre une dame d'un certain âge dans un train. La femme lui parait étrange au premier abord. Après avoir sympathisé, il apprend sa mort le lendemain. De là, il fera la connaissance de son frère, un homme riche et respecté, ainsi que de sa femme dont la beauté est troublante...
ANGOISSE est donc un drame romantique. Pourtant, la manière dont se déroule le récit nous ferait presque basculer dans le fantastique. De rencontres en évènements, un climat étrange s'installe. La scène où Alida sert le thé à la manière exacte d'un tableau peint et déjà exposé dans un musée en est le meilleur exemple. Au milieu de toutes les personnes qui se trouvent là, il n'y a que le personnage principal et les spectateurs qui sentent que la situation n'a rien de normal. Petit à petit, la lumière se révèle sur la situation et les motivations des personnages. Levant ainsi le voile sur tous les mystères et affichant l'orgueil ainsi que la folie de celui qui tire les ficelles.
Comme Nadia le soulignait si justement dans sa critique de L'HOMME LEOPARD, les personnages sont ciselés d'une manière étonnante. Ce qui est le cas des deux personnages clefs de l'histoire. Tout d'abord, Nick, homme que tout le monde rêve de fréquenter et qui s'avère être un homme pétri d'orgueil. Lorsqu'il voit qu'il risque de perdre sa femme, qu'il a en quelque sorte créée, alors qu'elle est amoureuse d'un autre homme. Il élimine le soupirant et tourmente sa femme chaque jour. Jusqu'à monter son propre fils contre elle. Il l'amène ainsi dans une spirale qui tendrait à la faire passer pour folle. Une femme qui toute jeune se complaisait dans une grande simplicité. Un bonheur qu'elle perd au fur et à mesure qu'elle grimpe les échelles sociales grandement aidée par son Pygmalion
.
Le début du film est excellent. Jacques Tourneur dresse tout ces portraits et alimente l'étrange des situations avec brio dans la première partie. Ensuite, lorsque tout s'accélère lors du final, l'atmosphère du film retombe dans un exercice beaucoup plus banal. Esthétiquement, c'est aussi éloigné des meilleurs films du réalisateur. En fait, la plupart des bonnes idées graphiques se retrouvent lors des flashbacks à la lecture de la biographie. Certaines images à ce moment ne sont pas sans rappeler CITIZEN KANE qui est le chef d'oeuvre que tout le monde connait (à paraitre en DVD prochainement chez le même éditeur). Ce n'est donc certainement pas le meilleur des films de Jacques Tourneur. D'ailleurs, on regrette qu'un film tel que RENDEZ VOUS AVEC LA PEUR (CURSE OF THE DEMONS) n'ait toujours pas été édité sur DVD. Il faudra donc se contenter des autres titres, plus intéressants, sortis dans la même collection que ANGOISSE : LA FELINE, VAUDOU et L'HOMME LEOPARD.