Header Critique : CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE (ESTA NOITE ENCARNAREI NO TEU CADAVER)

Critique du film
CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE 1967

ESTA NOITE ENCARNAREI NO TEU CADAVER 

CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE est la suite du film d'épouvante brésilien A MINUIT, J'EMPORTERAI TON ÂME de 1964. Il est à nouveau réalisé et interprété par José Mojica Marins, qui reprend le personnage délirant de Zé du Cercueil.

A MINUIT, J'EMPORTERAI TON ÂME a été produit avec des moyens de fortune, mais son tournage a pourtant laissé Marins endetté. Pour gagner de l'argent, il participe sans être crédité à la réalisation de O DIABODE VILA VELHA de Ody Fraga et Armando de Miranda en 1966.

Marins ramène ensuite à la vie Zé dans CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE, avec des finances meilleures que pour A MINUIT, J'EMPORTERAI TON ÂME. Il s'entoure toujours d'un casting d'acteurs inconnus et tourne dans le même quartier de Sao Paulo.

CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE commence quand se termine A MINUIT, J'EMPORTERAI TON ÂME. Zé a survécu à ses horribles blessures, et après une opération chirurgicale et du repos, il ressort de l'hôpital en pleine forme, égal à lui-même ! Sa philosophie n'a pas bougé d'un iota. Il se veut un homme libre et fort, refuse de s'astreindre à une religion ou à des superstitions. Il ne croit qu'au principe de la vie circulant dans le sang des hommes. Pour atteindre l'immortalité, il lui faut transmettre son sang, c'est-à-dire faire des enfants. Il repart donc à la recherche de la femme parfaite. Elle devra être forte, courageuse et partager les mêmes convictions singulières que lui ! Par ailleurs, Zé reste confronté aux habitants de la ville, peureux et superstitieux, convaincus qu'il est un assassin (ce qui n'est pas infondé !) et qu'il a pactisé avec le Diable (auquel il ne croit pas).

Zé du Cercueil, le fossoyeur libre-penseur, repart donc en quête de la femme digne de porter son fils. Mais son caractère malcommode et sa philosophie très personnelle ne lui facilitent pas la tache. Cette fois-ci, il s'y prend plus méthodiquement que dans A MINUIT, J'EMPORTERAI TON ÂME. Il kidnappe plusieurs belles jeunes filles athées (condition sine qua non pour être la mère de ses enfants) et il les soumet à des épreuves cruelles afin d'éprouver leur force d'esprit (il lâche des mygales dans leurs lits). Porter l'enfant de Zé implique une personnalité exceptionnelle, capable de donner naissance à un être supérieur qui une fois adulte, mènera l'humanité vers un nouvel âge d'or marqué par l'abandon des religions. Une nouvelle race supérieure et libre sera ainsi fondée, mue par l'instinct et l'intelligence.

Mais les recrues de Zé ne lui donnent pas satisfaction. Seule l'une d'entre elles s'est montrée à la hauteur de ses épreuves. Mais elle est tombée amoureuse de Zé et l'amour est une faiblesse corruptrice, éliminatoire pour notre célibataire exigeant ! Zé rencontre ensuite par hasard une jeune femme digne en tout point d'être la mère de son fils. Hélas, elle est la fille du Colonel, un détestable notable local qui emploie la brutalité pour tenter de nuire à Zé.

CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE enrichit le caractère de Zé en démontrant qu'il n'est pas en totale harmonie avec les exigences de sa philosophie très élevée. C'est là la grande innovation de cette aventure. Marqué par une éducation religieuse qu'il veut surmonter par son intelligence et sa force morale, une malédiction lancée par une de ses victimes réveille ses frayeurs ancestrales et superstitieuses, enfouies au fond de son subconscient. Ce qui donne lieu à une séquence de cauchemar étonnante.

Zé rêve qu'un homme en noir le traîne hors de son lit pour le mener dans un cimetière (cette partie du rêve est inspiré d'un véritable cauchemar que Marins a fait au début des années 1960 et qui lui a donné l'idée du personnage de Zé). Des mains surgissent des tombes, saisissent Zé et l'entraînent en Enfer, dans une étonnante séquence en couleurs (la seule du film), à la fois baroque et naïve. Il y voit des pécheurs tourmentés par des démons dans un Enfer dirigé par un Satan évoquant Jupiter. A son réveil, Zé comprend que ce rêve manifeste sa peur du châtiment, inscrite en lui par sa "mauvaise" éducation chrétienne. Heureusement, il est convaincu que son fils, qu'il élèvera selon les principes de la vérité et de l'intelligence, sera débarrassé de ces entraves morales et atteindra enfin la perfection.

CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE est techniquement plus abouti que son prédécesseur. Les séquences horrifiques sont plus spectaculaires et soignées. Pourtant, ce second volet des aventures de Zé du Cercueil souffre encore de petits défauts. Si son personnage est bien renouvelé,il n'en reste pas moins que ses discours paraissent redondants. Le film souffre de petites chutes de rythmes et paraît un peu long sur la fin.

Nous relevons une conclusion assez étonnante au cours de laquelle, avant de périr, Zé admet l'existence et la suprématie de Dieu ! Il a parfois été écrit que l'ajout de ces scènes viendrait de la censure brésilienne (le pays était alors une dictature militaire depuis 1964). Mais, en fin de compte, nous pouvons aussi relevé que ce dénouement reste dans la lignée de la personnalité paradoxale et au fond dualiste de Zé du Cercueil. Il trouve en lui-même le pire ennemi à ses propres convictions !

CETTE NUIT, JE M'INCARNERAI DANS TON CADAVRE reste un fort bon film, porté par son personnage central, ici enrichi sans que cela nuise à sa cohérence passionnante. Nous retrouvons les habituelles scènes de sadisme et le léger érotisme caractéristiques de cette série. Dès le début des années 1960, Marins envisage de tourner une saga de Zé du Cercueil en six parties consécutives. Mais le manque d'argent l'en empêche. Escroqué par ses distributeurs, il ne bénéficie pas assez des retombées financières des deux films de Zé du Cercueil. Pourtant, ce personnage réapparaît dans d'autres de ses films à venir comme O ESTRANHO MUNDO DE ZE DO CAIXAO ou EXORCISMO NEGRO.

Rédacteur : Emmanuel Denis
Photo Emmanuel Denis
Un parcours de cinéphile ma foi bien classique pour le petit Manolito, des fonds de culottes usés dans les cinémas de l'ouest parisiens à s'émerveiller devant les classiques de son temps, les Indiana Jones, Tron, Le Dragon du lac de feu, Le Secret de la pyramide... et surtout les Star Wars ! Premier Ecran fantastique à neuf ans pour Le retour du Jedi, premier Mad Movies avec Maximum Overdrive en couverture à treize ans, les vidéo clubs de quartier, les enregistrements de Canal +... Et un enthousiasme et une passion pour le cinéma fantastique sous toutes ses formes, dans toute sa diversité.
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