Header Critique : C'EST LA FIN (THIS IS THE END)

Critique du film
C'EST LA FIN 2013

THIS IS THE END 

Basé sur le court-métrage JAY & SETH VS THE APOCALYPSE, Seth Rogen et Evan Goldberg ont réussi à mettre sur pied un projet peu banal : chaque acteur jouera son propre rôle lors de l'apocalypse qui s'abat sur la Terre. Sous la forme d'une comédie rude, grossière, gore et très cul. Cela donne donc THIS IS THE END devenant fort logiquement C'EST LA FIN en France. Et si, indéniablement, le rire prend le dessus, on reste quand même dubitatif sur la portée de cet objet filmique parfois identifié... Quoique...

Film de potes, délire de sales gamins d'une quarantaine d'années, semi-critique d'Hollywood... Un peu de tout cela à la fois ? Certainement et de manière totalement assumée par les auteurs ! Seth Rogen a fait le film, on imagine, juste parce qu'il pouvait le faire. Un beau cumulard : acteur principal, metteur en scène, scénariste et réalisateur ! Il accueille donc son ami Jay Baruchel à l'aéroport de Los Angeles. Bien qu'il déteste cette ville et Hollywood, Jay Baruchel ne vient dans la cité des anges que pour passer un moment avec son pote en mode fumette, films et jeux videos. Or, ce dernier est invité à une gigantesque fête organisée par James Franco dans sa nouvelle villa. Peu enthousiasmé, Jay Baruchel hésite mais s'y rend tout de même. Alors qu'il est coincé entre Jonah Hill, Craig Robinson et, entre autres, Rihanna, un tremblement de terre marque un tournant dans la fiesta. La catastrophe et l'apparition de monstres obligent les convives survivants à se terrer dans la maison. L'Apocalypse serait-elle en marche ?

Si vous ne supportez pas la vision égocentrique d'Hollywood, passez votre chemin ! Car même si le tandem Rogen/Goldberg injecte une énorme dose d'autodérision, de second, voire de 36ème degré, cela reste un film d'acteurs qui jouent aux idiots tout en se regardant le nombril. Il demeure assez rare de voir des personnalités rire d'eux-mêmes et de leur position dans un film de fiction. Ainsi, on se moque du film VOTRE MAJESTE ou plutôt de sa suite que Danny McBride ne doit surtout pas faire selon James Franco. Ou bien évoquer le fait que Seth Rogen s'est «vendu» pour LE FRELON VERT ou joue toujours les mêmes rôles tout en spéculant sur une suite à DELIRE EXPRESS tout en extrapolant sur un tournage hautement improbable ! Ajoutons encore James Franco qui ironise sur sa prestation dans SPIDER-MAN 3 ou encore sa manie de collectionner les objets de tournage comme la caméra de 127 HEURES qui finira par resservir ici... Cela fera sûrement sourire plus d'un spectateur. Plus osé, on s'attaque ensuite aux travers personnels, ce qui relève de l'inattendu et du risqué. En ce sens, Michael Cera vole la vedette à tout le monde et donne le meilleur numéro d'acteur du film. Son image de gentil naïf néo-Woody Allen-esque geek de SUPERGRAVE, UNE NUIT A NEW YORK ou encore JUNO est passée au lance-flammes. Il illustre ainsi le parfait manuel de la façon de se flinguer une carrière en dix minutes à l'écran.

L'humour joue de manière permanente sur le grossier le plus extrême... Ainsi, on verra Seth Rogen boire sa propre urine. De son côté, Jonah Hill se fait sodomiser par un démon priapique. Alors que Michael Cera est dépeint comme un cocaïnomane obsédé par les femmes qui se fait bouffer le cul et sucer dans les toilettes de la maison de James Franco. Oui, les termes sont osées mais appelons un chat un chat pour ce film qui ne fait pas dans la dentelle. Car les "auteurs" font tout pour offenser le spectateur conservateur moyen qui, sauf erreur, n'ira, de toutes façons, pas voir ce film. Certains gags sont tout de même à hurler de rire : Seth Rogen et ses potes se déchainent comme jamais et on frôle l'improvisation déjantée dans certaines scènes. Le dialogue entre James Franco s'engueulant avec Danny McBride pour qu'il arrête de jouir sur tout ce qui bouge vaut le détour et est proprement hallucinant ! Le métrage demeure tout le long sexiste avec ses héros adulescents proche de la névrose sexuelle et perdus dans leur monde, voire dans les pages de magazines cochons. Le métrage se ménage des plages de subversion bienvenues. Plusieurs plans rapides montrent des détails ahurissants comme cette affiche d'un film prochainement à l'affiche, NINJA RAPIST, qui s'effondre à l'apparition d'une faille.

Maintenant, C'EST LA FIN apparait comme un géant lourdaud à deux têtes. Une fois le groupe d'ami enfermé dans la maison de James Franco, le film fait un monstrueux surplace. Entre dialogues de geeks enfumés, clins d'œil à l'état de la culture actuelle (et pan dans les Reality Show) ou la participation des copains, la première partie du film piétine au bout de quinze minutes. Rihanna reprenant en cœur «baisse ta culotte», se fait mettre la main aux fesses par Michael Cera alors que l'on assiste à la pleutrerie de nombre des protagonistes qui feignent de sauver des vies lors du tremblement de Terre : amusant au début. Mais lassant dans les invectives et autres hésitations du script. Quelques moments tentent de faire rebondir l'action. Emma Watson semble définitivement affranchie de la saga HARRY POTTER : elle manie le verbe et la hache comme personne. Au milieu d'une floppée de personnages qui jouent à celui qui sera le plus gros con, elle fait office de fraicheur inattendue.

Et le gore répond présent ! Décapitation, corps transpercés, membres arrachés, possession démoniaque à la EXORCISTE ou ROSEMARY'S BABY... Le film ne se refuse rien. On sent que les auteurs ont voulu se lâcher par rapport aux normes hollywoodiennes de la bienséance, comme un pied-de-nez géant à la censure de la MPAA. Ceci posé, la seconde partie va pointer vers un déluge d'images numériques plus ou moins réussies et même carrément foireuses sur les plans aériens d'Hollywood qui sont très laid. Les monstres apparaissent cependant superbement animés. Avec une mention spéciale au démon géant qui détruit tout sur son passage et pourvue d'une énorme paire de testicules doublé d'un sexe (évidemment) géant bien mis en évidence. On dirait qu'entre ça, les blagues sur les gouts sexuels de James Franco, la sodomie de Jonah Hill, les sous-entendus sexuels évidents lors de la première nuit passés seuls entre hommes... les auteurs ont comme un souci (répétitif) avec le sujet.

Assez incroyable qu'une major ait accepté de distribuer une telle comédie horrifique qui à la fois honore ce que le système en place engendre de mieux et de pire. Pire pour des acteurs qui bouffent la main qui les nourrit en suivant un schéma emprunté mille fois afin de délivrer un message profondément idiot. Meilleur car repoussant les limites de l'acceptable à l'écran tout en s'y vautrant avec délectation. Clair que les amoureux de EN CLOQUE MODE D'EMPLOI ou DELIRE EXPRESS représentent la cible rêvée et visée par le film. Les autres qui ne sont pas fans de l'humour infantile et immature genre fin de soirée arrosée passeront gentiment leur chemin puisque cela représente la totalité des 107 minutes du métrage !

C'EST LA FIN repose sur les archétypes et l'iconographie du film d'horreur américain chrétien : pour mieux s'en moquer mais sans jamais se départir de la rédemption attendue. Et honnêtement, si monter au ciel dans une belle lumière blanche garantit, dans C'EST LA FIN, d'assister à un concert d'un boys band des 90's déchu, on préfère l'enfer. Tout autant que de jouer au cannibale avec Danny McBride et Channing Tatum, ce dernier opère ici un caméo foutraque de la plus belle espèce. Il restera donc au spectateur français, pour qui la sous-culture «stoner/slacker» ne dira probablement rien, de se laisser aller à prendre au sérieux (ou non) cette excroissance cinématographique sur l'amitié dévoyée hideusement osée, abominablement drôle et terriblement conne.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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