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Critique du film
DISCOPATHE 2013

 

New York 1976. Un jeune homme nommé Duane Lewis (Jéremie Earp-Lavergne) devient tueur en série dès lors qu'il entend de la musique disco. Il fuit au Canada où sa psychose rebondit de plus belle. Le titre-même DISCOPATHE, très auto-référentiel et «camp» dans son approche, donne le ton. Production canadienne tournée en langue anglaise, il s'agira d'une oeuvre mi film de genre, mi parodie. Qui tente de trouver un rythme bien à lui au milieu du tempo disco qui parsème de manière parfois répétitive le film. Problème : sa conduite bicéphale le mène droit dans le mur (du son).

On sent le ton du film tiraillé entre un traitement tout à fait sérieux d'un sujet qui ne l'est pas vraiment. Puis, brutalement, basculer dans le second degré le plus total. Ce qui aurait du faire son charme sur le papier transforme DISCOPATHE en gloubiboulga horrifico-comique qui ne fonctionne que rarement d'un côté comme de l'autre. Fatalement, on finit par un peu regarder sa montre, ne pas s'attacher aux divers personnages qui passent à l'écran. La volonté de coller à un certain schéma préexistant et de tenter la double lecture qui fait le clin d'oeil au spectateur complice (comme la rencontre de Duane avec sa petite amie au début du film) ne résiste pas longtemps. La tentative de créer un film «en costumes» donne cependant un peu l'illusion sur l'endroit et le moment où est supposé se dérouler l'action. On aura une fournée de chemise en col pelle à tarte, de pantalons pattes d'eph' et de musique disco. La photographie réussit un joli tour de force visuel de rendre le film tel qu'un film de série B US 70's tourné pour des drive-ins pouvait ressembler. Même si le terme a souvent été galvaudé, le look «Grindhouse» parait approprié pour DISCOPATHE. Un peu ce que Ti West avait tenté pour le look de HOUSE OF THE DEVIL.

Au milieu du format Scope choisi, surnagent quelques superbes scènes magnifiquement mise en scènes. Ainsi l'excellente idée de la jeune fille tuée sous la piste de danse en verre, pendant que les amateurs de disco se déhanchent furieusement. Là, il existe clairement un éclair de génie, une brillance… malheureusement qui reste un éclair car le reste du film demeure au stade de la bonne idée malgré quelques trouvailles visuelles éparses. L'exécution étant aléatoire, ce sont les bonnes intentions qui restent surtout en tête après la vision du film. Il demeure également dommage que l'acteur qui interprète Duane ne soit pas toujours à la hauteur d'un méchant charismatique. Un peu au diapason des autres acteurs.

La critique de l'hypocrisie religieuse qui transpire en filigrane est d'une lourdeur démonstrative qui désespère plus qu'elle ne fait mouche. Il est toujours facile et aisé de rire des transgressions des gardiens de l'ordre moral - cible idéale, parfois drôles mais déjà testé et approuvé par nombre de cinéastes qui ont dénoncé cet état de fait sociétal de manière générale de façon beaucoup plus fine. En fait, dès le saut en 1980 où Duane se réfugie dans cette école catholique et se fait passer pour sourd (autre bonne idée du scénario, par ailleurs!), le récit manque cruellement de point de vue et s'éparpille en fonction des interventions des différents seconds rôles. Le rebondissement aux USA vers le dernier tiers parait singulièrement artificiel… en fait, l'écriture se révèle insuffisante, à la progression dramatique chaotique. On ne se sent jamais vraiment concerné par l'enquête en elle-même, manquant totalement d'intérêt à la fois pour l'histoire et, par ricochet, dans le film.

Si vous venez par contre pour le Gore, vous serez servi. DISCOPATHE fonce dans le sirop de maïs et le latex à grandes enjambées pour s'y complaire joyeusement. Comme la mode est aux hommages en tous genres depuis quelques années, DISCOPATHE rentre donc dans le moule des années 70, et des effets spéciaux à l'ancienne. Certaines scènes sont volontairement poussées à l'extrême, versant quelquefois dans un ridicule très limite, comme les deux lycéennes massacrées dans leur chambre (et où l'on remarque que les effets spéciaux ne sont justement que des effets!)

Au bout du compte DISCOPATHE est un long métrage ambitieux dans son essence mais qui passe un peu à côté de son sujet. Si la sincérité du projet ne saurait être mise en doute, ce qu'on voit à l'écran reste décevant. Cela ne satisfera pas pleinement les amateurs de film de genre, ni les fervents adaptes de film décalé. La volonté de parodie tire le film vers le bas : il faut voir la scène ridicule où Duane s'habille en nonne pour échapper à la Police : digne du niveau du GENDARME DE SAINT TROPEZ. France Anglade power, quoi. On comprend que ce l'auteur souhaite faire, mais il a la main trop lourde et met le film par terre. Comme s'il y avait deux films en un qui tentaient désespérément de coexister dans les 81mn du film, sans jamais vraiment tirer parti l'un de l'autre.

Rédacteur : Francis Barbier
Photo Francis Barbier
Dévoreur de scènes scandinaves et nordiques - sanguinolentes ou pas -, dégustateur de bisseries italiennes finement ciselées ou grossièrement lâchées sur pellicule, amateur de films en formats larges et 70mm en tous genres, avec une louche d'horreur sociale britannique, une lampée d'Albert Pyun (avant 2000), une fourchettée de Lamberto Bava (forever) et un soupçon de David DeCoteau (quand il se bouge). Sans reprendre des plats concoctés par William Friedkin pour ne pas risquer l'indigestion.
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