Header Critique : REVOLTES DE L'AN 2000, LES (QUIEN PUEDE MATAR A UN NINO ?)

Critique du film et du DVD Zone 2
LES REVOLTES DE L'AN 2000 1976

QUIEN PUEDE MATAR A UN NINO ? 

Tom et sa femme enceinte, Evelyn, sont des anglais en vacances dans le Sud de l'Espagne. Cherchant à fuir les villes trop touristiques, le couple loue une barque pour se rendre sur une petite île méconnue. En arrivant sur place, ils sont étonnés de trouver un village déserté. A la recherche des habitants, Tom et Evelyn vont croiser des enfants au comportement étrange.

Tourné en 1976, l'espagnol LES REVOLTES DE L'AN 2000 possède un titre qui nous évoque la science-fiction. Une fausse piste, puisque le film fait parti d'un sous-genre très différent : le film d'enfants tueurs. Inauguré avec LA MAUVAISE GRAINE de Mervyn LeRoy dans les années 50 ou encore LE VILLAGE DES DAMNES de Wolf Rilla en 1960, la thématique du bambin meurtrier trouveras une forte résonance dans les iconoclastes années 70 avec des films comme L'AUTRE de Robert Mulligan et LE MONSTRE EST VIVANT de Larry Cohen ou bien de façon indirecte comme dans LA MALEDICTION de Richard Donner ou encore L'EXORCISTE de William Friedkin. Des films durs, qui placent la perversion au plus profond de ce que nous pensions jusqu'alors «innocent». Très librement adapté d'un roman de Juan José Plans par l'homme de télévision Narciso Ibanez Serrador (ce dernier n'a qu'un autre film à son actif, le vénéneux LA RESIDENCE), LES REVOLTES DE L'AN 2000 aborde son sujet de manière encore plus crue et frontale. Le titre original, beaucoup plus évident, est QUIEN PUEDE MATAR A UN NINO ? ("Qui peut tuer un enfant ?"). Une question choc qui soutient tout le discours du film : si les enfants décident de se révolter contre les adultes, aurons-nous seulement la force de nous défendre contre eux ?

Provocateur, LES REVOLTES DE L'AN 2000 s'ouvre sur un générique de près de dix minutes passant en revue des images réelles d'enfants morts ou à l'agonie lors de l'holocauste, la guerre d'Indochine ou encore lors de la famine au Nigeria. Des images insoutenables, rythmées par une petite comptine intermittente. Dès son ouverture, le film montre la souffrance des enfants suite à la folie des adultes. Des adultes plaçant (en surface) la vie des enfants au sommet de la chaine humaine («les femmes et les enfants d'abord») mais pourtant prompts à les tuer de manière indirecte lors de guerres ou de famines. Cette introduction, difficile à supporter, va servir de justification à la révolte des gamins puisqu'aucune véritable explication ne nous sera donné par la suite.

Avec son rythme posé misant beaucoup sur l'ambiance (on cite souvent LES OISEAUX d'Alfred Hitchcock), LES REVOLTES DE L'AN 2000 suit pas à pas les découvertes du couple de héros sur l'île maudite. Des découvertes au compte goutte. D'abord des enfants pour seuls occupants, puis leurs jeux macabres (comme cet homme pendu par les pieds servant de «pinata» à une jeune fille armée d'une serpe). Devenu des monstres meurtriers, les enfants n'en garde pas moins leurs attitudes innocentes, comme de rire spontanément après avoir roué de coup un vieillard. L'horreur reste pour eux un jeu sans conséquence, comme une vulgaire partie de «chat». Le film va parfois très loin, en montrant par exemple une petite fille attirant son propre père dans un guet-apens. Et lorsque nos héros décident de se rebeller et de quitter l'île à bord d'une voiture, les enfants forment des barrages humains persuadés que les adultes n'auront pas la force de les écraser pour s'enfuir.

Perturbant, LES REVOLTES DE L'AN 2000 aura connu une carrière chaotique. Censuré en Espagne, interdit en Finlande, victime de lourdes interdictions au moins de 16 ou 18 dans le reste du monde, le film va devenir peu à peu un invisible à la réputation inattaquable. Certes, il s'agit d'un très bon film, puissant et courageux. Mais son aura de chef d'oeuvre oublié mérite peut-être quelques bémols. Le rythme du film est son principal défaut. L'ambiance à beau être au coeur de la mise en scène, les séquences semblent étirées en longueur jusqu'à provoquer une érosion de leur efficacité. Le spectateur a parfois le temps de prendre de «l'avance» sur les évènements du film, ce qui est gênant dans un cadre qui fonctionne aussi comme un survival. On trouve parfois le temps long également, entre deux explosions de violences aussi fascinantes que dérangeantes. Si le ton du film est très adulte et engagé, LES REVOLTES DE L'AN 2000 cède pourtant à plus d'une reprise à des idées très "bis" un peu indignes de ses interrogations. On pense surtout à l'héroïne enceinte qui se fait attaquer de l'intérieur par son foetus en pleine rébellion. Des défauts qui n'occultent cependant pas la force du film et son éprouvant final. Un final qui remua les spectateurs du festival d'Avoriaz en 1977 où le film décrocha le prix de la critique.

Invisible en France depuis son édition VHS d'époque, LES REVOLTES DE L'AN 2000 nous arrive dans une édition double disque particulièrement soignée. L'image a été restaurée pour un rendu et une propreté très satisfaisantes. Les pistes audio proposées sont deux monos d'époques, en français et en version originale. Version originale ? Pas tout à fait. Il s'agit du doublage espagnol alors que la véritable version originale est en anglais. Un oubli d'autant plus gênant puisque le film joue avec les langues car il met en scène deux touristes anglais face à des locaux parlant espagnols. La piste française se montre d'ailleurs intelligente puisqu'elle a l'initiative de ne doubler que les parties en anglais pour laisser les parties en espagnol sous-titrées. On pourra sans mal préférer cette dernière.

L'édition propose de nombreux bonus à l'intérêt parfois inégal. Narciso Ibanez Serrador est interviewé sur une dizaine de minutes malheureusement un peu vides. L'homme enchaîne les lieux communs sans approfondir certains points plus pertinents, comme la direction des comédiens enfants ou encore la réception du film à l'époque. Heureusement, un entretien avec José Luis Alcaine, le directeur de la photographie du film, va combler toutes ces lacunes. Méthodiquement, Alcaine nous explique chaque étape et chaque choix ayant été accomplis durant la production du film. Il revient sur les décors éclatés en différents lieux de tournage puis réunis au montage (avec parfois des soucis de raccord lumière à résoudre), ou encore sur la volonté de donner au film une photographie «classique» en plein jour pour se démarquer des films d'horreurs exploitant la nuit et l'obscurité. Cet entretien, qui brasse de plus les anecdotes personnelles, est l'une des meilleures surprises de cette section.

L'éditeur se fend de deux suppléments inédits pour l'occasion. Profitant de distribuer des titres issus du catalogue fantastique espagnol contemporain, ce dernier nous propose un melting pot d'interviews où Juan Antonio Bayona (L'ORPHELINAT), Guillermo del Toro (LE LABYRINTHE DE PAN) et le duo Jaume Balaguero (DARKNESS et [REC]) et Paco Plaza (LES ENFANTS D'ABRAHAM et [REC]) s'expriment sur Serrador et son cinéma. Les «jeunes» sont dithyrambiques au sujet de leur aîné, aussi parce que Serrador a longtemps été un visage connu de la télévision de leur enfance. A la manière d'Alfred Hitchcock, il présentait des histoires courtes sur le petit écran que nos réalisateurs en culottes courtes dévoraient en frissonnant. L'anecdote est amusante et occulte presque la suite des propos, centrée sur une analyse «d'égal à égal» des deux films de Serrador. Certains en font d'ailleurs un peu trop, comme Plaza louant la capacité du «maître» à créer une «narration resserrée» !

Le second reportage inédit est plus didactique puisqu'il donne la parole à l'historien du cinéma espagnol Emmanuel Vincenot. Ce dernier va nous servir de fil rouge dans un récapitulatif qui donne au passage la parole à Jorge Grau, Paul Naschy ou encore Jess Franco. Réservé aux néophytes, le reportage se suit avec plaisir même si les questions posés aux réalisateurs sont du coup bien trop généralistes. Outre une galerie photos et la filmographie de Serrador, l'édition se termine par un bonus caché amusant montrant un moment de bêtisier entre Balaguero et Plaza.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
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287 critiques Film & Vidéo
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Un film choc
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Une narration parfois distendue
Absence de la version «originale» anglaise
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L'édition vidéo
QUIEN PUEDE MATAR A UN NINO DVD Zone 2 (France)
Editeur
Wild Side
Support
2 DVD
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h46
Image
1.85 (16/9)
Audio
Spanish Dolby Digital Mono
Francais Dolby Digital Mono
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • Serrador vu par... (26mn40)
    • L'histoire du cinéma fantastique espagnol (27mn48)
    • Entretien avec José Luis Alcaine (16mn04)
    • Entretien avec Narciso Ibanez Serrador (9mn11)
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