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Critique du film
FRANKENWEENIE 2012

 

Astucieux et inventif, le jeune Victor Frankenstein est de ces enfants plutôt renfermés, favorisant des loisirs individuels aux sports collectifs. Toujours à ses côtés, le chien Sparky est tour à tour ami, confident et même acteur dans quelques films amateurs. Mais un beau jour, une voiture passe un peu vite et «paf !» le chien. Désespéré, Victor s'intéresse néanmoins à l'un de ses cours de physique dans lequel il apprend qu'un courant électrique peut stimuler les muscles d'une grenouille morte. Le jeune garçon décide alors de ressusciter son chien à l'aide du plus fort des courants électrique à sa disposition : La foudre. L'opération réussit, Victor et Sparky sont à nouveau réunis et ce dans le plus grand des secrets. La nouvelle s'ébruite cependant et bien vite, de nombreux camarades de classe tentent de réanimer leurs animaux disparus...

Passionné de cinéma, de dessin et d'étrange, Tim Burton finalise ses études dans le domaine de l'animation au California Institute of Arts. A l'issue de sa formation, il est embauché par les Studios Disney qui cherchent du sang neuf et tentent de renouveler leur image. A ce titre, Burton réalise quelques «concepts arts» pour l'un des dessins animés les plus atypiques de la firme : TARAM ET LE CHAUDRON MAGIQUE. Il travaillera également sur ROX ET ROUKY, un film qui pour le coup ne lui ressemble pas du tout. Reste que la griffe du jeune Tim impressionne le Studio aux grandes oreilles qui lui confie alors un budget de soixante mille dollars pour tourner un premier court. Ce sera VINCENT, un petit film d'animation dans lequel la personnalité introvertie de Burton fusionne avec celle de son héros de toujours, l'acteur Vincent Price. Passionné par les écrits d'Edgar Allan Poe, le jeune protagoniste de cette pellicule muette rêve d'expériences pour le moins morbides, comme la transformation de sa tante en poupée de cire ou la mutation de son chien en zombie... Narré par Vincent Price lui-même, VINCENT ne trouvera pas grâce aux yeux des dirigeants de Disney. Ces derniers offrent toutefois une seconde chance au jeune réalisateur et lui permettent de porter à l'écran l'une de ses histoires : FRANKENWEENIE.

Moyen-métrage de trente minutes, FRANKENWEENIE sera donc mis en boite en 1984, avec cette fois-ci des acteurs «live», des décors réels (quoique souvent irréels !) et une photographie en noir et blanc. Là encore, le métrage sera mal perçu, poussant Burton à quitter les Studios dans la foulée. On peut donc voir une certaine ironie dans la sortie du FRANKENWEENIE version 2012, réalisé par Burton et produit par Disney. Il faut dire qu'entre temps, le réalisateur a fait du chemin et aligné quelques gros succès pour la Warner. Cela explique notamment que Disney ait tiré du placard un poème de Burton datant de 79 pour les besoins de L'ETRANGE NOEL DE MONSIEUR JACK, sorti en 1993. Cela justifie également que Mickey ait finalement fait les yeux doux au réalisateur pour LES AVENTURES D'ALICE AU PAYS DES MERVEILLES qui, à défaut d'être une véritable réussite artistique, fera office de jackpot en rapportant plus d'un milliard de dollars en salles...

Le FRANKENWEENIE nouveau s'inscrit donc dans la logique de cette nouvelle collaboration entre la firme Disney et un Tim Burton dont l'authenticité artistique semble s'étioler depuis quelques années. Pourtant rapidement, le métrage démarre et se veut rassurant. La patte visuelle du monsieur est bien là, les personnages sont splendides et l'animation parfaite. Mais plus que tout, la sombre poésie est bien présente et nous retrouvons l'univers Burtonien des débuts. L'enfant introverti, son univers personnel fait de monstres imaginaires, le quartier pavillonnaire déjà vu dans EDWARD AUX MAINS D'ARGENT, les références au cinéma horrifique classique, etc... Tout y est ! La magie opère, les personnages sont attachants et Burton décrit l'amitié entre Victor et Sparky d'une manière plus convaincante encore que dans le FRANKENWEENIE de 84. Il intègre également une curieuse voisine dont le chat prédit l'avenir grâce à ses crottes, et offre un professeur de sciences bien mieux croqué dans cette nouvelle version, ne serait-ce que pour son physique rappelant le comédien Vincent Price.

Durant près d'une heure, Burton calque (jusque dans certain détails visuels) son nouveau FRANKENWEENIE sur l'ancien, en étire la durée avec une certaine élégance, ajoutant même quelques clins d'œil à sa propre carrière. Ce sera par exemple le cas lors de l'usage d'un cerf-volant en forme de chauve-souris, que l'inévitable collaborateur Danny Elfman soulignera via quelques notes évoquant BATMAN et sa suite... Dans le même esprit, les voix des personnages seront toutes tenues par des acteurs ayant traversés les grandes œuvres du monsieur. Winona Ryder (BEETLEJUICE, EDWARD AUX MAINS D'ARGENT) et Martin Landau (ED WOOD, SLEEPY HOLLOW) répondront donc présents, de même que Catherine O'Hara (BEETLEJUICE, L'ETRANGE NOEL DE MONSIEUR JACK) et Martin Short (MARS ATTACK !) qui incarneront chacun trois personnages ! Les spectateurs ne connaissant pas la version courte de FRANKENWEENIE seront donc sans doute aux anges devant ces deux premiers tiers de métrages, très authentiques et dépaysants. Les autres salueront une resucée sans concession artistique, nous ramenant des années en arrière, aux sources de l'art Burtonien...

Malheureusement, le métrage dure près d'une heure et demie et, pour arriver à cette durée cinéma «standard», le scénariste John August aura tout de même du étoffer l'ensemble. Le dernier tiers est donc totalement inédit par rapport au court d'origine, prenant la forme d'un concours de science qui dégénère et entraine un monstrueux capharnaüm au sein de la petite bourgade. Et là, autant dire que la rupture est brutale. D'une œuvre sensible et poétique, nous basculons au cœur d'un univers bordélique dans lequel s'alignent des personnages vidés de toute substance et des références qui, bien qu'en adéquation avec l'univers de Tim Burton, sont amenées sans la moindre finesse. Une mini-momie, un loup-garou (aux allures de singe-rat !), un chat-vampire (Chacula ?), quelques créatures du Lac Noir (évoquant curieusement GREMLINS) et même un Gamera seront donc de la partie. Reconnaissons que certaines séquences sont amusantes mais le contraste est trop important, la sauce ne prend pas et cette ultime partie en forme de «toujours plus» tourne rapidement à vide, incitant même au bâillement.

En toute fin, FRANKENWEENIE tente de refaire surface en reprenant l'épilogue de son modèle, mais le bilan s'avère malgré tout amer car trop inégal. Miroir d'une confrontation entre l'ancien et le nouveau Tim Burton, le métrage souffre d'une dualité dissonante, confrontant l'intimisme touchant à l'hollywoodien bruyant. Dés lors, chacun pourra décider de voir le verre à moitié plein, ou à moitié vide, mais il nous apparaît difficile de voir en ce FRANKENWEENIE la complète réussite tant espérée...

Rédacteur : Xavier Desbarats
Photo Xavier Desbarats
Biberonné au cinéma d'action des années 80, traumatisé par les dents du jeune Spielberg et nourri en chemin par une horde de Kickboxers et de Geishas, Xavier Desbarats ne pourra que porter les stigmates d'une jeunesse dédiée au cinéma de divertissement. Pour lui, la puberté n'aura été qu'une occasion de rendre hommage à la pilosité de Chuck Norris. Aussi, ne soyons pas surpris si le bougre consacre depuis 2006 ses chroniques DeViDeadiennes à des métrages Bis de tous horizons, des animaux morfales ou des nanas dévêtues armées de katanas. Pardonnez-lui, il sait très bien ce qu'il fait...
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