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Critique du film et du DVD Zone 2
THE DEADLY SPAWN 1983

 

Une météorite s'écrase sur Terre, lâchant dans la nature une créature extra-terrestre affamée. Après s'être fait les dents sur deux campeurs, cette dernière va investir la cave d'une maison dans une banlieue résidentielle pour y dévorer tous ceux qui passeront y faire un tour. Mais quelle gourmande celle-là !

Daté de 1983, THE DEADLY SPAWN nous ramène à une époque où n'importe quel petit entrepreneur se lançait tête-bêche dans le cinéma d'horreur afin de faire fructifier ses maigres dollars d'investissement. Ici, l'homme en question s'appelle Ted A. Bohus. Véritable passionné du genre, il s'était déjà associé à un certain Don Dohler sur deux petits films d'horreurs campys. Pour l'anecdote, leur second film, NIGHTBEAST, crédite dans son pôle de compositeurs musiques un certain J.J. Abrams, futur créateur de la série ALIAS et réalisateur de MISSION IMPOSSIBLE 3. Bohus se lance dans la production en solo avec THE DEADLY SPAWN, qu'il prend soin de nommer RETURN OF THE ALIENS : THE DEADLY SPAWN afin de faire croire à une fausse suite du film de Ridley Scott. Le métrage est réalisé par Douglas McKeown, un obscur metteur en scène dont c'est le seul et unique essai (il s'est depuis reconverti en comédien de théâtre). Tourné le week-end avec une équipe entièrement bénévole, le budget du film s'élèverait à 25 000 dollars. Une vraie misère.

Ce qui choque en premier lieu lorsque l'on regarde THE DEADLY SPAWN aujourd'hui, ce n'est pas tant le maigre budget de l'entreprise, mais son côté foncièrement amateur. Que ce soit au niveau de l'écriture (une enfilade de situations prétextes habillant une poignée de scènes « intéressantes » - on dirait un porno), au niveau de l'interprétation (personne n'est professionnel), ou encore au niveau de la mise en scène (les séquences de dialogues sont effroyablement peu inspirées). Raconté comme ça, THE DEADLY SPAWN n'est qu'une série B-Z de plus qui ne saura trouver grâce qu'aux yeux des amoureux de l'image granuleuse laissant débiter des dialogues de couloir à des acteurs improvisés (un peu comme chez Rohmer quoi). Mais heureusement, THE DEADLY SPAWN ne s'arrête pas à ça. Le film a dans sa botte un argument magique qui a séduit nombre de spectateurs à travers les années, jusqu'à lui conférer un statut de film culte alternatif. Cet argument, c'est bien évidemment sa créature.

Alors que le monstre de ALIEN était un organisme d'une complexité hors norme, alimentant à lui seul les rebondissements de la moitié du film, la créature de THE DEADLY SPAWN est au contraire d'une simplicité effarante. Son corps est composé d'un long tube digestif au bout duquel se trouve une gigantesque bouche émaillée d'une rangée de dents parmi les plus denses de l'histoire du cinéma. Après tout, quoi de plus logique pour une bestiole qui n'a qu'un but dans la vie : manger. Pour ajouter un peu de piquant à ce schéma simpliste, le film met en scène une créature «mère» (celle qui provient de la météorite ouvrant le métrage) qui prolifère à accouchant d'une multitude de petits «spawn» qui se glisseront un peu partout dans la maison.

Si l'on ne pensait pas se laisser impressionner par le design minimaliste de la créature, il faut bien avouer que les séquences la mettant en scène sont presque fascinantes. Est-ce la nostalgie du gros latex ? L'animation simple mais très efficace de la bête ? Ou encore son apparence de gros pénis suintant en permanence de son extrémité un liquide aux reflets blanchâtres ? Toujours est-il que l'alien de THE DEADLY SPAWN, dans toute sa grossièreté (et peut-être grâce justement à cette grossièreté), est un personnage absolument marquant du genre. Son créateur, John Dods (qui travaillera plus tard sur GHOSTBUSTERS 2, X-FILES ou ALIEN LA RESURRECTION) est par ailleurs co-producteur et réalisateur de certains plans d'effets spéciaux.

Un autre point fort qui est pour beaucoup dans la réputation de THE DEADLY SPAWN, c'est sa propension à jouer la surenchère dans le détail gore et sordide. Et ne vous laissez pas décevoir par les deux premiers meurtres, timidement filmés en ombres chinoises. Pour l'époque, le film va très loin, et nous livre son lot de séquences saignantes et crapoteuses. On retient particulièrement cette séquence de visage dévoré en gros plan, tout ce qu'il y a de dérangeant et de dégeulasse ! Outre son audace graphique, THE DEADLY SPAWN étonne également en dézinguant gratuitement ses personnages. C'est ainsi qu'un caractère de premier plan est envoyé à la boucherie à la stupeur générale lors d'une séquence à suspense que l'on pensait pourtant couru d'avance pour la survie de nos héros.

Pas la peine de chercher midi à quatorze heure, THE DEADLY SPAWN est une petite bobine bricolo et amateur qui ne tient pas à s'inscrire durablement dans le genre mais à en donner pour son argent au spectateur grâce à ses effets spéciaux spongieux et dans l'ensemble généreux. Qu'ils soient parfaitement réussis (voir les petites larves se déplacer dans la cave) ou totalement ratés (lorsque la mère des bestioles course les héros dans la maison), les effets tiennent le haut du pavé d'un film qui ne mériterait sûrement pas que l'on s'en souvienne si ces derniers n'étaient pas là. La rumeur veut que la tête de la mère spawn soit maintenant la propriété de Gene Simmons, le chanteur de Kiss et accessoirement fan du film. Quant à Bohus, il tournera une suite au film en 90, DEADLY SPAWN 2 : THE METAMORPHOSIS, avant de curieusement le re-titrer METAMORPHOSIS : THE ALIEN FACTOR pour supprimer le lien entre les deux films.

Edité chez nous sous le titre LA CHOSE à l'époque, THE DEADLY SPAWN était déjà disponible en Zone 1 chez l'éditeur Synapse. En France, c'est un vaillant nouvel éditeur, Le Chat qui Fume, qui s'occupe de l'édition du film. Techniquement, l'image est optimum compte tenu du fait qu'il s'agit d'un tout petit film tourné il y a plus de vingt ans. L'image a été très efficacement ré-étalonnée et nettoyée, hormis quelques petites poussières ça et là, tout en gardant l'aspect un peu granuleux et vintage du titre. Le son est une piste mono au choix en anglais ou en français, un peu étouffée par le temps tout en restant de bonne qualité. Initiative intéressante et originale de l'éditeur : vous pourrez choisir la taille et la couleur de vos sous-titres sur le film.

Niveau bonus, l'éditeur reprend une majorité de la grosse section proposée par le Zone 1, tout en l'agrémentant à sa façon. Si le commentaire audio réunissant entre autres le réalisateur Douglas McKeown et John Dods a disparu, celui du producteur Ted A. Bohus est présent et intégralement sous-titré. Une gageure, tant l'homme est un moulin à paroles. Résultat, ce commentaire est extrêmement sympathique et se suit avec humour et intérêt. L'homme ne se fait pas prier pour ironiser sur l'inexpérience totale de l'équipe sur ce film (à commencer par la sienne), et nous fait l'inventaire des bourdes que le tournage a dû essuyer. Comme cette anecdote où John Dods s'est trouvé comme un idiot à quelques heures du premier coup de manivelle : ayant construit la grosse créature dans sa propre cave, il n'avait pas pensé que sa taille l'empêcherait de passer les portes afin de quitter son atelier.

Si le disque US proposait une dizaine de minutes de Making Of en Super 8 muet (principalement des images des coulisses des effets spéciaux), l'éditeur à l'excellente idée de faire commenter ces bobines par deux spécialistes des effets spéciaux : le journaliste Julien Dupuy et le maquilleur Jacques-Olivier Molon. Leurs propos passionnés associés à certains trésors de trouvailles des effets de THE DEADLY SPAWN en font un supplément à visionner d'urgence pour qui s'intéresse aux monstres et maquillages prosthétiques.

Passons rapidement sur une vidéo d'audition des comédiens (de quoi s'apercevoir que leurs jeux et leurs textes n'étaient pas meilleurs en pré-production) pour nous arrêter sur une visite exclusive de l'antre de Ted A. Bohus, où ce dernier nous présente sa collection de bibelots SF (dont beaucoup de merchandising autour de THE DEADLY SPAWN). Preuve en est que le bonhomme est un vrai amoureux du genre. La section s'achève par une copieuse archive photographique, dont certains clichés sont commentés à nouveau par Bohus, une courte et amusante présentation du film au journal télévisé américain de l'époque, puis par une collection de bandes-annonces du film.

La qualité des bonus est bien évidemment une valeur ajoutée certaine à ce métrage oublié qui n'en demandait certainement pas tant. Si l'on précise que cette édition sera vendue une quinzaine d'euros, la redécouverte de ce petit film à la fois maladroit et fun dans ses excès est tout à fait recommandable.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
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287 critiques Film & Vidéo
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Les séquences avec la créature
Une très bonne édition
On n'aime pas
Un côté amateur parfois assommant
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L'édition vidéo
RETURN OF THE ALIENS : THE DEADLY SPAWN DVD Zone 2 (France)
Editeur
Chat Qui Fume
Support
DVD (Double couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h20
Image
1.33 (4/3)
Audio
English Dolby Digital Stéréo
Francais Dolby Digital Stéréo
Sous-titrage
  • Français
  • Supplements
    • Commentaires audio de Ted A. Bohus
    • Making of d’époque sur les effets spéciaux (9mn17)
      avec commentaire audio de Julien Dupuy et Jacques-Olivier Molon
    • Les vidéos du casting des acteurs (15mn20)
    • Les collectors de The Deadly Spawn (4mn39)
    • The Deadly Spawn au journal américain (2mn33)
      • Galeries photos
      • Affiches
      • Flyers
      • Promo (3mn)
      • Maquillage (2mn25) avec commentaire audio de Ted A. Bohus
      • Sur le tournage (5mn16) avec commentaire audio de Ted A. Bohus
      • La Bestiole (2mn)
      • Les dessins (1mn16)
      • Principaux acteurs (2mn09)
    • Bandes-annonces
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