Header Critique : AMERICAN WAY, THE (RIDERS OF THE STORM)

Critique du film et du DVD Zone 2
THE AMERICAN WAY 1986

RIDERS OF THE STORM 

Rescapée de la guerre du Vietnam, une bande de fous à lier diffuse depuis un vieux bombardier une télévision pirate hippie et contestataire. Interrompant net les programmes habituels, «S&M TV» est le symbole de l'Amérique de la liberté pour toute une tranche de la population suivant avec jubilation les délires de ces doux dingues. Mais lorsque les prochaines élections présidentielles montrent comme favori Mme Westinghouse, une candidate ultra conservatrice et hyper extrême droite, nos anarchistes cathodiques vont déclarer une guerre de l'image visant à faire tomber la prétendante.

Le festival d'Avoriaz de 1987 était clairement sous le signe du grand retour de Dennis Hopper au cinéma. Débutant dans LA FUREUR DE VIVRE de Nicholas Ray, comédien halluciné notamment sur APOCALYPSE NOW de Francis Ford Coppola, réalisateur du mythique EASY RIDER, Hopper vit sa prometteuse carrière tomber en morceau sous l'effet de la drogue et de l'alcool dès le début des années 80. L'acteur remonta doucement la pente en apparaissant dans RUSTY JAMES de Coppola, OSTERMAN WEEK-END de Sam Peckinpah, ou encore LES AVENTURIERS DE LA QUATRIEME DIMENSION de Jonathan Betuel. Ce qui nous amène sous la neige de Haute-Savoie en 87, où Hopper tenait les rôles principaux du vénéneux BLUE VELVET de David Lynch (qui obtiendra d'ailleurs le Grand Prix du Festival), du déroutant MASSACRE A LA TRONCONNEUSE 2 de Tobe Hooper (un film que le comédien essaie aujourd'hui d'oublier par tous les moyens) et cet obscur THE AMERICAN WAY de Maurice Phillips (un film que, pour le coup, tout le monde a oublié).

Réalisateur de clips vidéos d'origine anglaise, Maurice Phillips travaille un jour sur un projet télé où une station pirate s'amuserait à diffuser des vidéos musicales au milieu de programmes traditionnels. De ce concept prétexte au robinet à clips, Phillips décide d'en tirer un scénario de long métrage avec son compère Scott Roberts. Etant lui-même de la génération de la guerre du Vietnam (il déjouera son appel en s'exilant au Canada), Phillips a pour idée de mettre en scène l'Amérique contestataire de l'époque dans tout son folklore. THE AMERICAN WAY n'est donc pas une charge anti-américaine mais bel et bien une espèce de film patriotique, où l'hymne national aurait définitivement adopté sa célèbre interprétation faite par Jimmy Hendrix.

Déjouant les clichés du clippeur, Maurice Phillips ne base pas son film sur le visuel mais bel et bien sur sa troupe de pirates improbables. Outre Hopper en capitaine, nous trouvons un génie de l'électronique aux méthodes des plus obscures (Michael J. Pollard, revu récemment dans HOUSE OF 1000 CORPSES de Rob Zombie), un co-pilote continuellement sous marijuana et se rejouant l'attaque des hélicoptères d'APOCALYPSE NOW avec une mitraillette peinte en rose dans les mains (William Amstrong, de nombreuses séries télés dont BAND OF BROTHERS), un bricoleur estropié encore plus bionique que Steve Austin (Eugene Lipinski, croisé dans le ROLLERBALL de John McTiernan), un cuisinier black ayant la particularité de réparer les moteurs de l'avion en plein vol (Al Matthews, le fameux sergent Apone de ALIENS de James Cameron), ou encore un vietnamien mutique qui passe son temps à faire du Tai-chi debout sur une bombe (Michael Ho, revu dans pas grand-chose).

Cette fine équipe n'est bien évidemment que le noyau dur de «S&M TV», puisque cette dernière possède un envoyé spécial au sol (Derek Hoxby, de passage dans CLIFFHANGER de Renny Harlin). Un beau gosse se déplaçant avec un jet pack emprunté à James Bond et usant de son charmant sourire pour décrocher ses scoops. Bien entendu, de nombreux sympathisants font vivre l'antenne pirate, des groupuscules de cinéastes amateurs tout droit sortis de CECIL B. DEMENTED de John Waters en passant par les spectateurs prêts à se cotiser pour que le désordre perdure.

Face à eux, THE AMERICAN WAY met en scène une candidate à la présidence totalement abjecte. Au-delà des idées particulièrement dures de la dame, le film nous montre avec détails la fabrication d'une machine de guerre électorale, où l'adoption des positions radicales n'est uniquement justifiée que par la volonté de rafler les électeurs associés, le tout sans aucun sens moral ni idéal politique.

Vingt ans après sa réalisation, THE AMERICAN WAY est toujours un spectacle déroutant. Un film a l'ambiance totalement unique malgré de nombreux patinages narratifs. Le contenu des émissions de «S&M TV» est totalement sous exploité, reléguant son apparition à une toute petite poignée de scènes fortes (comme cet excellent moment où nos pirates entrecoupent une séquence de gymnastique d'une émission catholique avec des extraits de Mondo composés de cérémonies vaudous). Le film préfère tout miser sur ses personnages et la performance embuée de ses acteurs, au risque de faire tomber à plat les moments forts du scénario sous l'égide d'une improvisation sympathique mais limitée (voir la séquence où le bombardier est sur le point de se faire exploser par une nuée de missiles).

THE AMERICAN WAY est néanmoins un moment agréable, il est vrai conseillé à ceux qui ont pied avec l'époque référence du film soit les années 60/70. Une grande part du plaisir du métrage tient dans les références et leurs juxtapositions, d'un journal télévisé parasité par un clip où Alice Cooper se fait griller sur une chaise électrique, ou encore un caméo de Ozzy Osbourne au fin fond d'un écran d'arrière plan. Il est juste dommage que THE AMERICAN WAY n'ait pas la personnalité de son sujet, et n'ait pas traversé les années comme l'électron libre cinématographique qu'il aurait dû être. Ce qui n'empêcha pas le film de décrocher à l'époque d'Avoriaz plusieurs prix (le Prix Spécial du Jury, le Prix de la Critique et le Prix Antenne d'Or). De son côté, Maurice Phillips enchaîna deux autres longs métrages (dont un énième véhicule pour Richard Pryor et Gene Wilder) pour ensuite se consacrer, ironiquement, à une gentille carrière télévisuelle.

THE AMERICAN WAY est édité en France dans une édition minimale destinée à alimenter le marché du Discount. L'image est heureusement au format mais non anamorphosée pour le 16/9. La qualité technique de cette dernière est tout juste passable. La définition est limitée, l'image est souvent trop sombre, la compression est à peu près correcte, et la copie n'est pas très propre. Le tout se laisse néanmoins regarder à condition de n'être pas trop difficile. Le disque propose heureusement la version originale comme son doublage français, un bon point. Il n'y a par contre aucun bonus.

Il est évident que THE AMERICAN WAY mériterait mieux que cette édition de fond de bac à soldes. Reste qu'aucun éditeur ne semble prêt à s'intéresser à cette petite bobine branquignole au vu des DVDs internationaux rachitiques dédiés au film de Phillips. En espérant que le petit prix de l'ensemble (moins de 8 euros, en tout cas chez les marchands de journaux) fera craquer les quelques hippies reconvertis curieux de ce petit film oublié.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
48 ans
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287 critiques Film & Vidéo
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Un spectacle sympathique
Des séquences de piratage cathodique mémorables
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Un film qui n’est pas à la hauteur de son concept
Une édition juste passable
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L'édition vidéo
RIDERS OF THE STORM DVD Zone 2 (France)
Editeur
Support
DVD (Simple couche)
Origine
France (Zone 2)
Date de Sortie
Durée
1h41
Image
1.85 (4/3)
Audio
English Dolby Digital Stéréo
Francais Dolby Digital Stéréo
Sous-titrage
  • Français
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      Aucun
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