2. Films rares

SCENT OF MYSTERY, réalisé par Jack Cardiff. Directeur photo avisé et parmi les plus talentueux : il se trouve derrière les lumières des CHAUSSONS ROUGES, du NARCISSE NOIR, GUERRE ET PAIX, LES VIKINGS… Il se retrouve aux manettes de ce curieux  projet qu'est SCENT OF MYSTERY. Un an après l'échec de l'AROMARAMA développé pour THE GREAT WALL, le fils de l'inventeur du système TODD-AO se décida à produire un nouveau phénomène : le Smell-O-Vision. En 70mm TODD AO (format de projection de 2.21:1) et agrémenté d'un système diffusant des parfums pendant le film, - ceux-ci ayant une action spécifique dans la progression narrative. Un détective privé en vacances en Espagne (Denholm Elliott) se lance à la poursuite d'une jeune femme (Beverly Bentley) ayant échappé sans le savoir de peu à un assassinat. Le film, hésitant entre comédie policière et travelogue, fut un échec total au même titre que le système Smell-O-Vision qui ne fonctionnait pas correctement et qui fut aussitôt abandonné. Racheté par la firme Cinerama qui comptait profiter de son succès avec ses documentaires-travelogues, SCENT OF MYSTERY fut convertit en Cinerama projections en 3 bandes (format 2.59 :1), coupé d'une vingtaine de minutes, dont un long plan sur un pain chaud sortant d'un four, histoire de profiter du parfum de pain développé pour l'occasion ! Re-titré HOLIDAY IN SPAIN, il rencontra un nouvel échec qui expédia le film dans les douves de l'oubli. Il faut avouer que qualitativement parlant, SCENT OF MYSTERY ne force pas le respect. Une voix-off envahissante du héros se borne à parler de ce qui se passe sur l'écran ou de ses états d'âme ainsi que des avancée de l'enquête couplé à un scénario qui patine. On comprend le désarroi des critiques et du public, le film ne démarrant vraiment qu'au bout de trois quarts d'heure… le personnage du chauffeur de taxi joué par Peter Lorre apporte une touche d'humour bienvenue, mais l'ensemble ne brille pas par son originalité. La dernière demi-heure offre néanmoins des poursuites spectaculaires, des plans magnifiques qui justifient à eux seuls l'utilisation du format choisi, tous comme certaines cascades audacieuses… jusqu'à un amusant twist final. La copie présentée (la seule restante ?) a subi les affres du temps et a fait place à du Pink-O-Vision. En effet, la seule couleur a être vraiment présente est le rose – ce qui n'empêche en rien le film d'être d'une qualité visuelle splendide. Il n'y a qu'à s'arrêter sur les différents gros plans du film pour constater une qualité assez incroyable en terme de définition et de précision des traits. Ceci vaut aussi pour les courbes généreuses de Diana Dors. Ce même phénomène de perte de couleurs s'observera subséquemment sur THE GOLDEN HEAD.

THE GOLDEN HEAD demeure également un cas assez particulier. Première co-production entre la Grande-Bretagne, les USA et la Hongrie, THE GOLDEN HEAD fut le premier film à avoir été tourné au-delà du rideau de fer. Visiblement commencé en Cinerama – mais les sources divergent sur cet état de fait - par Jack Hill et avec Hayley Mills, il fut arrêté en cours de tournage en 1961. Il sera repris ensuite par Richard Thorpe avec deux nouveaux acteurs engagés pour la circonstance : George Sanders et Buddy Hackett. Se joignirent à la production Jess Conrad, un teen idol de l'époque, ainsi que Cecília Esztergályos, véritable star en Hongrie. Le tournage se poursuivi en Super Technirama 70, sauf la séquence finale de poursuite à travers Budapest et au-dessus du Danube en MCS-70 – les deux systèmes donnant un format égal de projection 2.21 :1. Suite à la première à Londres, le film ne tint – selon Jess Conrad et d'autres sources - qu'une semaine à l'affiche. Des problèmes légaux dus, entre autres, à la situation de la société Cinerama, firent que le film disparu quasi-complètement de la circulation. Il ne fut jamais projeté aux USA, jusqu'à devenir une légende d'un film dont toute trace était perdue. Une sortie hongroise, puis allemande en 1966 et le film s'évanouit dans la nature. Quelques photos dans le livre Wide Screen Movies (éditions McFarland, 1988) attestaient de son existence. Jusqu'à ce que cette copie 70mm soit retrouvée. Comme pour SCENT OF MYSTERY, la copie a viré au rose-magenta. Mais là aussi, on ne peut que rester pantois devant la qualité de la définition de l'image, encore quasi-intacte presque un demi siècle après. Une précision dans la définition des visages, des gros plans d'une beauté qui laisse à penser que, quelque part, on ne verra pas grand-chose de mieux. THE GOLDEN HEAD s'avère plutôt plaisant : une comédie policière familiale qui cède à la tentation du travelogue à de très rares moments. 46 ans auparavant, il s'agissait de la première fois qu'une équipe de tournage avait l'autorisation de filmer Budapest et la Hongrie. Il fut donc logique de parcourir le Danube et de bénéficier de vues imprenables sur les bâtiments caractéristiques de la ville et des éclairs de la "culture" local (comprendre : les danses typiques). Et bien sûr sous le meilleur angle possible, la police secrète hongroise surveillant jalousement les faits et gestes de l'équipe allant jusqu'à placer des automobiles dans le film, alors que la population en était dépourvue, hormis les officiels du gouvernement et de la police. Autre originalité : Richard Thorpe profita de la construction du Pont Elisabeth enjambant le Danube afin de terminer par une poursuite finale aux confins du grandiose (et du danger). A se demander comment les équipes techniques ont pu gravir les arches du pont en construction et filmer la course-poursuite sur les coursives temporaires entre les arches, au-dessus du fleuve !

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Dossier réalisé par
Francis Barbier